Voyage au Centre du Cerveau

Les Virtuoses de la Mémoire (1)

Le cerveau humain est la matière la plus mystérieuse qui soit ! Il fonctionnait avec la même précision au Moyen-Âge qu'aujourd'hui, en surfant sur internet. Le cerveau peut aussi bien concevoir une symphonie que le pire des crimes. Ce n'est qu'aujourd'hui au XXI' siècle, avec l'aide d'ordinateurs de pointe, que les scientifiques sont en mesure d'observer le cerveau humain en action. Et ce n'est qu'aujourd'hui que nous commençons à comprendre que le simple fonctionnement de cette chose étrange dans nos crânes, tient du miracle. Or, certain miracle ne se révèle qu'après une panne ou un dérèglement. En effet, c'est suite à un dysfonctionnement de leur cerveau qu'une centaine de personnes au monde sont dotés de capacités quasi surnaturelles. Malgré leur handicap plus ou moins visibles, ses prodiges présentent des aptitudes jusqu'ici inexpliquées. Plus de la moitié de ces génies sont autistes, appelés autistes de haut niveau. Aujourd'hui les experts se posent la question de savoir si un génie caché sommeille en chacun d'entre nous. Notre voyage au centre du cerveau se propose d'explorer les capacités de ses prodiges, commençons par la mémoire.

Les Autistes de Haut Niveau

Dustin Hoffman a obtenu un Oscar pour son interprétation d'un autiste de haut niveau dans "Rain Man. Le personnage du film s'inspire de Kim Peek, originaire de Salt Lake City. "Quand il avait 4 ans et demi, nous avons découvert qu'il avait mémorisé les huit premier volumes d'une l'encyclopédie, les volumes qui comprenaient l'index", père de Kim.
Après un seul vol en hélicoptère, Stephen Wilshire dessine de mémoire des villes entières avec une extrême précision. En revanche, il a prononcé ces 2 premier mots à 5 ans, c'était crayon et papier. "Il est capable d'enregistrer comme un magnétoscope, il revient en arrière, il se met en lecture et il retranscrit sur papier", mère de Stephen.
Enfant, Matt Savage ne supportait aucun contact corporel, le bruit le rendait fou. À 6 ans, il a appris à jouer du piano en une seule nuit. Depuis l'âge de 7 ans, il compose des morceaux de jazz. "Il nous dit que la musique est en lui, il sait d'emblée se que le commun des mortels doit apprendre", mère de Math.
Aux USA, la plupart des élevages de bétails ont été construit selon les plans de Temple Grandin, autiste de haut niveau, reconnue pour sa parfaite compréhension des vaches. Le langage humain en revanche, lui est étranger.

Dans un contexte normal, nous ne les appellerions pas des autistes de haut niveau. On parlerait de génies ou d'individus très talentueux. Par définition ont constate chez eux, une cohabitation de capacités exceptionnelles et de déficit cognitif", Pr Elkhonon Goldberg, université de New-York.
"Tant que nous n'aurons pas élucidé le mystère des autistes de haut niveau, nous ne comprendrons pas notre propre mode de fonctionnement. Ce modèle ne sera pas complet tant qu'il ne rendra pas compte de cet incroyable disparité", Pr Darold Treffert, Société Médicale du Wisconsin. Le psychiatre D. Treffert recueille depuis 1962 des informations sur les autistes de haut niveau. Son premier patient était capable de mémoriser avec une précision d'ordinateur, l'intégralité du réseau de bus de la ville de Millwakie. Depuis Darold a découvert une centaine de prodiges, des virtuoses de la mémoire, dont les cerveaux présentent tous un dysfonctionnement. Tous ont époustouflé leur public avec des capacités surhumaines en mathématiques, en art, en musiques ou dans la mémorisation de données. Darold a passé sa vie a se posé la question du pourquoi. Aujourd'hui, les neurologues du monde entier sont face à la même énigme. Quelles sont les zones secrètes de notre cerveau auxquelles seuls les autistes de haut niveau ont accès ?
"Quand j'ai commencé à me pencher sur le syndrome des autistes de haut niveau, je me suis interrogé sur le potentiel humain en général. Si un individu souffrant d'un handicap grave peut manifesté un telles capacités, que peut-on en déduire pour le potentiel de l'ensemble des hommes ?", Pr Treffert.
"Nous pourrions simuler ses phénomènes chez les individus normaux. Nous pourrions débrancher une partie de leur cerveau pour activer ses capacités incroyables", Pr Allan Snyder, Université de Sydney.

Le cerveau humain a l'aspect d'une très grosse noix et la consistance d'un ouf à la coque. Pourtant rien n'est aussi complexe que cette masse gélatineuse composées de plus de 100 milliards de cellules nerveuses. Le mystère de la pensée humaine préoccupe les cerveaux depuis des siècles. Des cerveaux de génie sont conservés avec l'espoir qu'un jour ils en dévoileront toutes les caractéristiques. Nous savons que les caractéristiques et les capacités ne se logent pas dans des aires précises du cerveaux.

Rudiger Gamm

Les capacités prodigieuses des rares génies de ce monde sont les objets d'études les plus fascinantes qui soient. Exemple : Thorsten Fehr de l'université de Brême est chercheur neurologue spécialiste des génies de la mémorisation, et Rudiger Gamm prodige du calcul mental, est son cas le plus spectaculaire. "On va commencé avec une opération relativement simple, 62 divisé par 167. Pour les 30 chiffres après la virgule que l'ordinateur a calculé, c'est exact. On continue quelques puissances : 6733. Le résultat est exact à l'unité près".
"Je suis capable de faire 20 à 30 opérations à la seconde. C'est automatique. Et quand j'ai trouvé le résultat, je visualise le nombre dans mon esprit", Rudiger Gamm spécialiste de l'entraînement de la mémoire.
Au collège de son adolescence, son talent passe totalement inaperçu, sur son bulletin, il n'obtient qu'un 3/20. Ce n'est qu'à l'âge de 20 ans et par hasard, qu'il prend conscience de son génie. A l'occasion d'une émission de radio, il surclasse aisément un champion de calcul. Fort de son talent, il commence à s'entraîner sérieusement. Aujourd'hui, il maîtrise jusqu'à la puissance 50 tous les nombres à 2 chiffres, des fonctions trigonométriques à 8 chiffres et le chiffre Pi jusqu'à 5.000 chiffres après la virgule. Aujourd'hui il est entraîneur mental en Allemagne. Des équipes de football de première division, mais aussi des managers de haut niveau font appelle à lui pour améliorer leur concentration et leur mémoire. Aujourd'hui des chercheurs analysent les capacités de la calculatrice ambulante qu'est devenu Rudiger. Dans les laboratoire del'université de Magdebourg, un tomographe ultra performant retranscrit l'activité cérébrale de ce génie du calcul mental. Par le biais du la résonance magnétique, les neurologues pourront déterminer au millimètre près quels neurones sont activés et quand ! En effet, les zones actives consomment plus d'oxygène et de sucre. C'est pourquoi leur irrigation sanguine augmente momentanément. Rudiger prend place dans le tube et résout des opérations de calcul. Pendant ce temps, le tomographe enregistre les flux métaboliques observés sur les tissus de son cerveau. A New-York, les données recueillies sont animées en 3D par une équipe d'infographistes. Vue du cerveau montrant les zones actives lors d'un calcul complexe chez Rudiger. En vert, celles impliquées à la fois chez le calculateur prodige et chez non-experts. En rouge, celles activées uniquement par le prodige.
"Les technologies modernes nous permettent d'explorer pour la première fois les dimensions biologiques de ses comportements, de percevoir les modifications physiologiques qui les accompagnent, qu'il s'agisse de l'irrigation sanguine, des connexions entre les neurones. Cela permet d'expliquer pourquoi un cerveau est capable de mémoriser pendant 20 ans une information que le cerveau d'un autre individu, une personne souffrant d'Alzheimer, aura oublié au bout de quelques minutes ou quelques heures. En étudiant ses 2 situations extrêmes, on peut découvrir la clé du fonctionnement de la mémoire", Dr Jay Giedd, Washington. "Nous avons tendance à considérer que nous naissons avec un disque dur vierge, et une merveilleuse mécanique appelée cerveau, et que nous devenons se que nous gravons sur ce disque. Mais pour expliquer le prodige des autistes de haut niveau, il faut répondre à la question suivante : comment quelqu'un peut-il savoir ce qu'il n'a jamais appris ?", Dr Treffert.

Orlando Serrell

Orlando Serrell n'est pas né autiste de haut niveau mais il l'est soudainement devenu suite à un accident. À dix ans, c'est un enfant comme les autres, mais en août 1979, il est violemment frappé à la tête par une balle de base ball. Il perd connaissance et s'effondre. Aujourd'hui, il connaît par cour et sans y réfléchir la météo et le jour de la semaine correspondant à n'importe quelle date depuis son accident. Le test effectué à l'Institut National de la Santé de Washington, révèle qu'il maîtrise de mieux en mieux les dates avant son accident et cela sans jamais s'entraîner"Je ne connaît aucun autiste de haut niveau capable de restituer les dates et les événements de cette manière", Dr Greg Wallace. "Les capacités du cerveau sont stupéfiantes. Si Orlando peut se souvenir de tous ses détails, est-ce que nous sommes tous dotés d'une capacité de mémoire bien supérieure à celle que nous connaissons ?", Dr Jay Giedd. Un coup ciblé sur la tête peut-il doté notre mémoire d'une capacité illimitée ? Les scientifiques ont interrogé Orlando à plusieurs reprises. Toutes ses indications météo pour des dates postérieures à 1979 sont exactes. "Ça fait beaucoup pour un cerveau, tout c'est passé il y a 20 ans" dit Orlando, génie des calendriers, Virginie, en racontant des détails d'une journée d'il y a 20 ans. "Comment fais tu alors ?" Il répond, "je ne sais pas, c'est comme savoir que le 15 octobre est un lundi".
"Orlando apporte la preuve que nous procédons tous ces capacités, c'est une découverte scientifique majeure. Contrairement à ce que l'on pourrait penser, les autistes de haut niveau ne répètent pas jour et nuit pour arriver à ce niveau de mémoire. Notre premier objectif était de prouver que nous possédons des capacités analogues aux autistes de haut niveau mais que le cerveau les supprime délibérée", Pr Allan Snyder.

Le Cortex

Avec la tomographie, les neurologues ont constaté qu'il n'y avait pas une forme de mémoire, mais plusieurs qui se sont superposées au fil de notre évolution. Le cortex est le laboratoire de la pensée. Chez l'homme, il est donc d'une grandeur disproportionnelle et contient un nombre incroyables de neurones. Si on devait compter toutes les connections entre ses neurones au rythme d'une par seconde, il faudrait 32 millions d'années. La petite peur qu'on ressent lors la tomographie est dû au système limbique, commun à tous les mammifères, c'est notre mémoire émotionnelle et elle influe davantage sur notre comportement que tout le bon sens issu de notre cortex.
"Le cortex est le siège de la mémoire consciente, il contient un demi trillion de points de contact appelés synapses. Nous savons que nos souvenirs se trouvent sous forme codée dans ses connexions synaptiques. C'est le support de la mémoire. Chaque synapses parmis ce demi trillion, est à même de gérer une dizaine de niveau d'activité différente. Par conséquent, si on multiplie un demi trillion par 10, on se rend compte qu'en théorie avec ça, on peut tout stocker, même l'intégralité des molécules contenues dans l'univers. En principe notre capacité de mémorisation est donc totalement illimité", Pr Gerhard Roth, université de Brême.
"Nous enregistrons tous les événements de notre existence, mais nous n'y avons pas forcement accès. À moins qu'ils n'aient été associés à une émotion ou un événement exceptionnel, notre trentième anniversaire ou nos 25 ans de mariage. Ses souvenirs sont enregistrés parce que nous les marquons", Dr Treffert.

Kim Peek

Kim Peek mérite pleinement son surnom de kimputer, car il enregistre tout sans distinction et avec la même précision qu'un ordinateur. Le vrai "Rain Man" connaît les calendriers des 2000 années passées, tous les préfixes téléphoniques et toutes les autoroutes des USA, d'innombrables données historiques et toutes les mélodies qu'il a entendu. Mais il est incapable de se faire un ouf sur le plat, ou de s'habiller tout seul, il ne passera jamais son permis de conduire et n'aura jamais de petite amie car cela surpasse les capacités de son cerveau. A 50 ans passés, Kim vit à Salt Lake City chez Fran, son père, qui l'habille tous les matins, lui brosse les dents et l'accompagne à la bibliothèque municipale. Jusqu'à présent, Kim a lu plus de 12.000 livres dont il n'a pas oublié un seul mot. Il ne les a pas appris par cour, il s'est contenté de les lire une seule fois. Le disque dur de sa mémoire a tout enregistré. "On lui a fait passé un test, il devait lire 8 pages, ce qu'il a fait en 53 secondes. Deux heures plus tard, il était capable de restituer 98 % du contenu y compris le numéro des pages. Quelque chose dans son système optique lui permet d'organiser les informations. J'ai demandé a subir le même test, il m'a fallu 23 minutes pour lire le document qu'il avait lu en 53 secondes. Je me souvenais de 45 % du contenu, ce qui est normal", Fran.
"Il est capable de lire une page d'un oil, l'autre page de l'autre oil, et de tout enregistrer dans son disque dur", Dr Treffert. "C'est une véritable encyclopédie de la connaissance, c'est aussi une personne chaleureuse et sensible", Dr Richard Villalobos, Salinas Valley Hospital. "Tous les autistes de haut niveau sont dotés d'une mémoire remarquable, mais celle de Kim est exceptionnelle, j'ai consulté toutes les études menées depuis 145 ans et je n'ai pas trouvé de cas comparable", Dr Treffert.

Sur un carrefour d'une place, Kim serait totalement désemparé. Notre cerveau en revanche, exécute parfaitement les processus qu'il a appris, il choisit et il oublie. En une fraction de seconde, on évite des gens qu'on voit à peine, on évalue la vitesse de déplacement d'une voiture sans vraiment la regarder, notre cerveau a appris à faire des moyennes. Nos amis s'habillent différemment tous les jours, pourtant on les reconnaît instantanément, même au milieu d'une foule compacte. Notre cerveau possède des systèmes de filtres inconscient qui n'organisent pas seulement tout ce que l'on voit, mais aussi tout ce que l'on se souvient. Le cortex enregistre l'intégralité de tout ce que l'on perçoit et se qu'on peut restituer par la parole mais peu de temps après, on a plus accès qu'à une fraction infime de ces données. L'explication de ce phénomène n'a pas encore était établi définitivement. On sait en revanche que le système limbique contient deux circuit neuronaux : l'hippocampe et le complexe amygdalien. Ce sont eux qui nous donne la stimulation émotionnelle qui va faire qu'on oublie la date de naissance de Molière et ou le principe de la règle de 3, mais qu'on se souvient de la couleur ou d'un voyage en classe de mer. La somme de nos souvenirs détermine en partie se qu'on voit. Voilà pourquoi chacun d'entre nous voit un monde différent même quand nous sommes sur un même escalator.
"Pour fonctionner dans ce monde complexe, nous possédons dans nos têtes des modèles de se que nous avons déjà vu, se que j'appelle des grilles référentielles. nous voyons le monde à travers ces grilles référentielles. et cela nous simplifie la vie. Quand l'environnement se modifie un peu, c'est sans importance, nous ne le remarquons pas, nous projetons nos anticipations. Je prétends que les autistes de haut niveau ne possèdent pas ces grilles référentielles. Ils perçoivent le monde tel qu'il est vraiment, différent chaque jour", Pr Allan Snyder.
En Californie, des chercheurs de la NASA étudient à présent les circuits neuronaux de Kim Peek. Pour ce projet la NASA a permis de combiner une batterie de nouveaux tests de hautes technologie. Ces techniques serviront à organiser l'assistance médicale des spationautes de demain. "Kim a commencé à lire à 16 mois, et semblait y prendre plaisir", Fran. À 4 ans, il mémorise pour la première fois 8 volumes d'une encyclopédie, le réseau routiers, téléphoniques et télévisuels des USA. Pourtant, au yeux du monde, il passe pour un monstre. Ce n'est qu'à 33 ans qu'il rencontre Barry Morrow qui se lance dans la rédaction de "Rain Man". Dustin Hoffman lui dédiera son oscar et dira, "je suis peut-être la star, mais toi tu es le ciel". Grâce au succès du film, Kim s'est peu à peu départi de sa timidité et semble avoir pris goût à son nouveau rôle de prodige et d'amuseur. Lors de conférences, de visites dans les écoles ou séminaires de recherches, il répond inlassablement à des milliers de questions. "Le plus important, c'est qu'au cours des 15 dernières années, son cour est devenue plus grand que son cerveau. Il adore les gens", Fran.
À San Francisco, sur commande de la NASA, des chercheurs ont mis au point un nouveau test pour déchiffrer le mystère de la mémoire de Kim. Des scientifiques supposent que Kim, a l'instar de tous les autistes de haut niveau, a accès à tout le matériel brut de ses souvenirs. Cela signifierait que pour une raison inconnue, les filtres inconscients de son cerveau ne fonctionnent pas. Ces mêmes filtres qui permettent à un individu lambda, d'estimer la valeur d'une donnée et d'oublier les informations sans importances. Kim a appris à surnager dans un flot de souvenirs. Le cerveau humain s'adapte à toutes les situations. Ce qui reste mystérieux, c'est de savoir comment le cerveau de Kim parvient à surnager.
L'image du cerveau de Kim révèle que les ventricules emplies de liquide céphalo-rachidien sont plus grand que ceux du commun des mortels. Ils s'étendent jusqu'au cervelet, le siège de la motricité. La partie gauche du cervelet de Kim, est étrangement petite. Plus surprenant encore, il n'a pas de corps calleux, une commissure composée de tissus nerveux située au bas du cortex, et assurant habituellement, la communication entre les deux hémisphères cérébraux. L'absence de cette commissure n'était connue par les experts, que chez des patients présentant le syndrome de déconnections calleuses. Le plus souvent, des épileptiques chez lesquelles le corps calleux a été sectionné chirurgicalement, avec des conséquences stupéfiantes. "Si on leur montre un objet d'un côté de leur champ visuel, un seul hémisphère du cerveau le verra, l'autre hémisphère ignorera son existence. Chez une personne normal, le centre du langage est situé dans l'hémisphère gauche, si on présente un objet à son hémisphère droit, il ne sera pas capable de nommer l'objet car son hémisphère langagier de son cerveau ne l'a pas perçu", Dr Pratik Mukherjee, S.F.
L'aptitude de Kim à lire 2 pages en parallèle, s'explique de cette manière. C'est peut-être aussi pourquoi, il est incapable d'expliquer à son père pourquoi il épluche chaque jour de vieux annuaires et pourquoi il reporte d'interminables séries de noms sur des cahiers. Pour simplifier, on peut comparer le cerveau de Kim à 2 disques durs qui fonctionnent en parallèles et qui mémorisent des données. Mais cela explique-t-il que Kim fasse systématiquement appelle à l'ensemble de ses données. Pourquoi le cerveau de Kim n'a pas de touche "effacer" ? Et quel est l'élément de notre cerveau qui décide de qui ou de quoi nous nous souvenons ? Finalement pour les milliards de neurones dont nous disposons, chaque souvenirs correspond à une même stimulation, qu'il recèle le contenu de 12.000 livres, l'image d'un premier amour ou d'autres aptitudes insolites.

Howard Potter

C'est dans les stades désert que Howard Potter se sent le mieux. Il a du mal a regarder les gens en face, et n'a appris que récemment a aller acheter seul, une tablette de chocolat au bout de la rue. En revanche, son cerveau a enregistré le résultat de pratiquement toutes les parties de foot jouées dans monde entier. Et il connaît le jour de la semaine qui correspond à n'importe quelle date sur 22.000 ans avant et après J.-C.. La joie d'un but inscrit et les affres de la relégation dans une division inférieure lui sont inconnues, son cerveau ne voit que des nombres. "Il suit les mouvements du public, il ne fait rien de lui même. Si un but est marqué, il se lève car tous les spectateurs se sont levés", Freda Potter, sa mère. Enfant Howard a un goût prononcé pour la purée de patates et petits poids.
Un jour, il se plaint que son frère a eu 2 petits poids de plus que lui. Stupéfait, ses parents recomptent tous les petits poids de chaque assiette pour se rendre compte qu'il disait vrai. Plus tard, en famille dans le sud de l'Angleterre, il amuse la galerie avec des acrobaties mentales du même genre. Les Potter comprennent enfin que leur fils est un surdoué. Avec le temps, il se découvre un intérêt pour les nombres premiers, les racines carrées, les hit-parades et l'inépuisable réservoirs des résultats de football.
Au milieu de la foule, Howard se raccroche à ses chiffres, le calcul de racine carré tranquillise son cerveau. C'est un rituel quotidien comme l'est pour sa mère, la lecture du journal. Howard est incapable de passer un coup de fil, mais pour lui, le moindre annuaire téléphonique est un nouveau trésor dans la quête incessante de sa seule et unique passion, des nombres premiers. "Les autistes vivent dans leur propre univers, c'est un fait. Ils peuvent s'abstraire du monde extérieur. Nous pensons à des tas de choses, le crédit de la maison, faire les courses, les repas... Lui, il se coupe entièrement de l'extérieur pour se concentrer sur ses nombres", mère d'Howard.
À Londres, le Pr Brian Butterworth, un expert en mathématiques, examine Howard à l'aide d'un procédé nouveau, il mesure le signal lumineux émis par le sang en fonction de sa teneur en oxygène. Cela permet de mesurer l'activité cérébrale sans que le cerveau ne subisse le stress d'une IRM par tomographie. Après plusieurs centaines de tests de ce genres, Brain est convaincu que la mémoire des nombres repose certes, sur l'entraînement, mais bien plus sur notre patrimoine génétique. "Nous possédons un groupe de neurones, les cellules du cerveau, dans le lobe pariétal qui sont spécialisées dans les chiffres. C'est un trait que l'on retrouve à l'état d'embryon chez les lions, les singes, les chats et les chiens, les oiseaux et bien d'autres espèces. C'est la faculté d'enregistrer les paramètres chiffrés de l'environnement, de voir combien il y a d'éléments dans un ensemble. Si on ne possède pas cette faculté, on ne peut apprendre les mathématiques", Pr Brian Butterworth.

La Mémoire Automatique

"Quand on fait du vélo, on se dit qu'il faut mettre le pied ici, l'autre là et garder l'équilibre. Très vite, on pige le truc, cela devient automatique, c'est de la mémoire automatique, voilà le type de mémoire que possèdent les autistes de haut niveau", Dr Treffert.
Rudiger Gamm calcule de la même façon que le commun des mortels fait du vélo, sans même y penser. Avec la tomographie, on peut observer le cerveau de Rudiger pendant qu'il calcule, et le comparer à un cerveau moyen. Il est saisissant de constater que pour les opérations simples, il active les zones de calcul mental de manière moins intensive qu'un sujet moyen. Les neurologues ont constaté le même phénomène chez tous les experts dans les matières qui exigent des connaissances pointues. Plus le cerveau maîtrise un sujet, moins il mobilise de neurones, Rudiger n'utilise ces zones qu'à un stade où un humain X aurait déjà décrocher depuis longtemps. Normalement, ces aires n'ont rein à voir avec le calcul, mais il y a stocké un peu plus de 250.000 résultats intermédiaires, qu'il peut utiliser à tout moment pour ses opérations. "Cette région n'est active que chez Rudiger. Quand il se livre à des calculs de puissance compliqués, l'activité se déplace plus bas. Vers la région du cerveau associée à ce genre d'opérations. Il est intéressant de constater que cette zone est particulièrement importante pour l'identification faciale. Et les hommes sont des experts innée en matière d'identification faciale. Cela signifie que lorsque quelqu'un développe une aptitude spécifique pour quelque domaine que ce soit, il mobilise des zones dans cette région pour y stocker son savoir spécifique", Dr Thorsten Fehr, université de Magdebourg et Brême.
"Le cerveau a une tendance naturelle a exécuter un maximum d'actions de manière inconsciente. C'est dû au fait que physiologiquement les choses que nous faisons inconsciemment sollicitent peu d'échange d'énergie. Elles vont vite ne pose pas de problèmes et ne nécessitent pas de processus neuroplastiques. Les choses que nous faisons facilement nous coûte peu d'énergie. La conscience intervient pour des actions nouvelles, importantes ou complexes. Ce genre d'actions nécessitent la mise en ouvre de circuits particuliers liés à la conscience qui se trouvent dans notre cortex, et là ça devient très compliqué et ça coûte beaucoup d'énergie", Pr Gerhard Roth.

Le nombre de nos actions conscientes est étonnamment faible. Les experts estiment que 90 % de nos actes ou de nos réactions sont commandés par les zones inconscientes de la mémoire. Pour nous adapter aux événements sans cesse modifiés de la circulation automobile, nous avons intégré le débrayage, le freinage, le virage, et nous exécutons toutes ces actions automatiquement. Les neurologues pensent que les autistes de haut niveau utilisent ces zones de mémoire automatique pour y stocker du savoir spécifique. Il est vraisemblable que chez les autistes, les circuits de neurones entre le cortex et le système limbique, juste en dessous, sont défectueux. Or normalement, notre perception sélective et la mémorisation de nos connaissances spécifiques, dépendent de circuits neuronaux complexes. En revanche, nos gestes routiniers, et sans doute les prouesses des surdoués, sont commandés par des circuits plus simple, par des modules du cerveau situés plus bas dans le cortex. Les neurologues appellent cela la mémoire inconsciente. Elle permet à notre système limbique de déchiffrer des expressions du visage, et notre cervelet de commander nos gestes quotidiens. "Nous sommes dirigés par notre inconscient, c'est intéressant non ? Nous faisons des tas de choses de manière inconsciente, les décisions que nous prenons nous sont presque dictées. Je me demande souvent qui est responsable. Qui pilote l'avion ? Quel contrôle avons nous de nous même ?", Pr Allan Snyder.

Quels sont les avantages dont dispose un génie du calcul dans un jeu soit disant de hasard ? Nous demandons donc à Rudiger de jouer au Black Jack avec un croupier professionnel. Rudiger joue au Black Jack pour la première fois. Au bout de 45 mn, nous constatons qu'il a mémorisé toutes les cartes distribuées, plus la partie avance, plus il tire avantage de ses facultés. En 45 mn, il gagnera 900 euros, et avec un peu plus d'expérience et des mises plus ciblées, il aurait pu en gagner 4000. Malheureusement pour lui, Rudiger ne prend aucun plaisir aux cartes, et donc il n'a aucune envie de faire des efforts quand il joue. "Pour des performances de haut niveaux, il ne suffit pas de s'entraîner 30 mn par jour. Beaucoup le pense, mais ça ne fonctionne pas comme ça. Pour être ultra performant, il faut être pratiquement fou", Rudiger. "Quand j'avais 1 an, 1 an et demi, il m'arrivait de prononcer certains mots simples à l'envers, avant de savoir parler à l'endroit. A 6 ou 7 ans, j'ai lu mes premières BD à l'envers. Pourquoi ? Je ne sais plus, ça m'amusait, et c'était quelque chose que les autres ne faisaient pas, ça m'a toujours amusé de faire des choses que les autres ne savaient pas faire", Rudiger.


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