Animaux aux Facultés Humaines

Qui a Peint quoi ?

V.C. - ÇA M'INTÉRESSE Questions N°26 > Mai-Juillet > 2019

Les Animaux tombe-t-ils aussi Souvent Malades que les Humains ?

K.B. - SCIENCE & VIE N°1220 > Mai > 2019

On retrouve chez l'Animal toutes les Facultés Humaines

En août dernier, une association de défense des animaux a déposé plainte contre la société Charal, n°1 français de la viande, "pour cruauté envers les animaux". Dans le même temps, des scientifiques militent pour que notre langue s'enrichisse du mot "sentience", qui définit la conscience, la sensibilité, et l'esprit des animaux. Entretien avec Yves Christen, biologiste, éthologue et essayiste.

• 1976. Après une thèse d'immunogénétique sous la direction du prix Nobel Jean Dausset, Yves Christen poursuit ses recherches à l'hôpital Saint-Louis et à l'Institut Pasteur, avant de se spécialiser en neurosciences.
• 1977. Il devient rédacteur en chef de La Recherche.
• 1979. Il publie l'Heure de la sociobioloqie (Albin Michel), devenant l'un des précurseurs de cette nouvelle discipline scientifique.
• 1986. Il publie l'Homme bioculturel (éd. du Rocher).
• 2000. Il publie le Peuple léopard (éd. Michalon). L'animal est-il une personne ? éd. Flammarion.

Vous êtes spécialiste en immunologie et en neurosciences. Pourquoi cette passion pour le comportement animal ?
L'évolution des connaissances scientifiques m'a influencé. Mais c'est grâce à ma vie personnelle, notamment mon intérêt pour les léopards, que j'ai commencé à m'intéresser aux animaux en tant qu'individus, puis à les considérer comme des personnes, des créatures dotées d'une personnalité unique.

Quelles découvertes ont modifié notre conception de l'intelligence animale ?
Grâce à l'imagerie médicale, on a découvert des neurones dits "miroirs", qui s'activent quand vous exécutez une action ou lorsque vous voyez quelqu'un exécuter cette même action. On pense que c'est la base de l'empathie. Beaucoup pensent que c'est une spécificité humaine, or on a trouvé ces neurones miroirs chez les singes. Les Japonais ont fait des études remarquables sur d'autres neurones dits de l'intelligence, qui sont activés lorsque, par exemple, vous classez des objets par catégorie. Or, une catégorie, c'est un concept. Eh bien, les scientifiques se sont aperçus que les macaques possédaient aussi ce type de neurones. On a également trouvé des neurones du calcul, de la morale, du sentiment maternel, etc. Je ne doute pas une seconde que nous soyons plus intelligents que les animaux, mais il apparaît de plus en plus que les attributs de la personne humaine sont aussi ceux de la personne animale.

L'intelligence animale est-elle comparable à la nôtre ?
Il y a au moins trois groupes d'animaux qui ont des fonctions cognitives très proches de celles de l'espèce humaine. Ce sont les grands singes, les dauphins et les oiseaux de la famille des corvidés. Ces derniers ont une mémoire épisodique, à savoir la capacité de voyager mentalement dans le temps, ce qu'on croyait impossible chez les animaux. Des expériences ont montré que les geais se souviennent où ils ont caché des provisions mais aussi quand. Ils peuvent aussi se mettre mentalement à la place d'un de leurs congénères. On a même mis en évidence la capacité des dauphins et des singes à exprimer la conscience de leur savoir, ce que l'on appelle la métacognition : savoir que l'on sait.

L'homme est-il un animal comme les autres ?
Oui, dans une certaine mesure. D'ailleurs, la sociobiologie explique que les comportements sociaux peuvent avoir des fondements biologiques et que nous y sommes assujettis comme les animaux.

Reste-t-il alors des facultés spécifiquement humaines ?
Je ne crois pas. Souvent, on décrète que l'animal est dépourvu de certaines capacités parce qu'on ne sait pas les observer. Prenons le langage. Toutes les expériences dans ce domaine sont des systèmes fermés : c'est l'animal qui est mis en demeure de comprendre ce qu'on lui dit. S'il ne réussit pas, c'est qu'il n'a pas les facultés nécessaires. Nul n'a essayé de faire l'inverse, c'est-à-dire de parler un langage animal. Les chiens s'expriment vocalement, et on commence à peine à étudier la communication par aboiements.

Les rapports que nous entretenons avec les animaux vont-ils changer ?
Je pense que le regard humain sur le monde animal a changé et ce, sans même que les gens en aient conscience. Nous vivons une transition ressemblant à ce qui s'est passé avec la fin de l'esclavage. Jusqu'à récemment, cet état de fait semblait normal à la plupart des gens. Aujourd'hui, cela semble inadmissible à quasiment tout le monde, du moins en Europe. Il y aura des remises en cause dans d'autres domaines. Des exercices comme la corrida ne seront peut-être plus socialement admis dans un certain nombre d'années. L'idée d'une personnalité animale intègre une problématique scientifique et philosophique. Elle fait appel à la notion d'altérité. Je plaide pour que le monde scientifique vive cette contradiction. Que l'on continue à expérimenter, mais que l'on ait conscience que cela pose un problème éthique.

P.M. - ÇA M'INTÉRESSE > Octobre > 2009
 

   
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