La Lecture Change, nos Cerveaux Aussi

La Lecture Modifie le Fonctionnement du Cerveaux

La lecture ne possède pas dans le cerveau ses propres circuits : lorsque nous lisons, nous sollicitons des régions cérébrales dédiées à d'autres fonctions. Ce qui les modifie.

C'est ce qu'ont découvert les équipes de Stanislas Dehaene (Inserm, CEA, Paris-Sud) et de Laurent Cohen (AP-HP, Inserm, Paris). Les chercheurs ont recruté au Portugal et au Brésil des volontaires analphabètes et alphabétisés, dans l'enfance ou à l'âge adulte. Ils leur ont demandé d'écouter des phrases parlées, d'examiner des phrases écrites, des mots et des visages, puis ont comparé, avec l'IRM, leur activité cérébrale. Résultat : l'alphabétisation réorganise à la fois les aires visuelles du cerveau, et celles utilisées pour le langage parlé. Ce sont par exemple les zones dédiées à la perception des visages qui doivent faire de la place à la lecture ! Une nouvelle démonstration de la plasticité cérébrale, la capacité du cerveau à acquérir de nouvelles compétences et à en modifier des anciennes, qui s'opère tout au long de la vie.

V.B. - SCIENCE & VIE > Février > 2011

La Lecture Modifie bien notre Cerveaux

La lecture sur écran modifie-t-elle notre cerveau ? Telle est la question que se posait Science & Vie en septembre dernier.

Mais pour y répondre pleinement, il faudrait déjà mieux connaître les mécanismes cérébraux mis en jeu par la lecture sur papier. Dans ce domaine, une équipe de chercheurs anglais, espagnols et colombiens vient de faire une avancée majeure. Grâce aux IRM d'anciens guérilleros ayant intégré un programme d'alphabétisation, ils ont montré que l'apprentissage de la lecture chez les adultes induit une densification de la substance grise dans cinq régions distinctes des lobes occipital, temporal et pariétal. "Comparés aux sujets encore analphabètes, ceux qui viennent d'apprendre à lire présentent également une densification de leur substance blanche à l'interface entre les hémisphères droit et gauche", complète Cathy Price, l'un des auteurs de cette étude. Des modifications qu'il est impossible de voir chez l'enfant apprenant à lire puisque celui-ci est soumis à d'autres apprentissages et à des modifications morphologiques."

C.H. - SCIENCE & VIE > Décembre > 2009

Il faut Raconter des Histoires aux Enfants

On le sait, les parents et l'entourage jouent un rôle majeur dans le développement cognitif de l'enfant.

On peut désormais le confirmer grâce à la spectroscopie proche infrarouge (Near Infrared Spectroscopy ou NIRS) qui a montré que la lecture d'un livre d'images se traduit par une activation plus intense des lobes frontaux que celle obtenue grâce à une cassette vidéo regardée passivement par l'enfant. Cette technique d'imagerie médicale rapide, non invasive et inoffensive, a été menée chez des enfants des deux sexes âgés de 18 à 30 mois. (Acta Paediatrica, février 2010)

SCIENCES ET AVENIR > Avril > 2010

La Lecture Change, nos Cerveaux aussi

Depuis plus de 500 ans, nous avons développé des capacités cognitives adaptées à l'écrit sur papier. Or, le texte prolifère aujourd'hui sur toutes sortes de supports électroniques : e-books, smartphones, ordinateurs... entraînant une révolution de notre rapport à la lecture. Et une modification de notre cortex...

Si tout le contenu d'Internet devait être transcrit sur papier dans les pages des livres, la pile formée serait aussi haute que 10 fois la distance de la Terre à Pluton ! Toutes les bibliothèques de la planète ne suffiraient pas à accueillir pareille production. Même la collection de la plus grande bibliothèque du monde, la Librairie du Congrès à Washington, fait pâle figure. Ses quelque 140 millions d'ouvrages consultables sont à peu près dix millions de fois moins volumineux que la pile équivalente d'Internet ! Certes, tout le contenu du Web n'est pas fait de texte intelligible - loin s'en faut. Il n'empêche : l'écrit se déverse en un flot continu sur le réseau mondial. Outre les livres numérisés ("Faits & Chiffres"), plus de 150 milliards d'e-mails et plus d'un million de billets publiés sur des blogs l'alimentent chaque jour.

FAITS & CHIFFRES
Pour 6,7 milliards d'individus, on compte aujourd'hui 2 milliards d'ordinateurs, 2,5 milliards de téléphones portables (dont 13,5 % de smartphones, qui permettent de regarder des vidéos ou de naviguer sur internet), 3,5 milliards de télévisions. Une quinzaine de modèle de "liseuse" à encre électronique (e-books, tablettes de lecture électroniques) existent sur le marché, et les annonces de nouveaux modèles se sont multipliées ces derniers mois. La société E ink, leader de l'encre électronique, revendique 1 million d'unités vendues. Autant d'écran offerts à nos yeux... et aux textes, sous forme numérique. Le service Google Books a numérisé depuis 2005 entre 7 et 10 millions de livres, La société Amazon propose 230.000 titres électroniques, Sony (via son Ebook Store) 600.000. La Bibliothèque nationale de France offre 256.000 livres au format électronique. Côté papier, en 2008, on pouvait trouver 594.600 titres dans les librairies française, et 138 millions de livres étaient prêtés dans les bibliothèques municipales. Selon l'étude Médiascope Europe 2007, la population des 16-24 ans passe 14,7 heures par semaine sur internet, 13,4 heures devant un écran de télévision.

Des textes les plus courts - les 140 caractères d'un message du réseau Twitter s'affichant sur un mobile - aux plus longs - les 800 pages des Misérables de Victor Hugo à découvrir sur un livre électronique -, les écrans, petits ou grands, dessinent la plus grande bibliothèque jamais conçue. Et c'est un fait : que ce soit sur un ordinateur, un téléphone ou un e-book, nous n'avons jamais autant lu.
Mais en détrônant le papier, naguère seul maître au royaume de l'écrit, les écrans changent aussi profondément la manière de lire. Car la lecture d'un document électronique est bien différente de celle d'un document papier. Chacun le sent : surfer sur les pages d'un journal en ligne, mêlant articles courts, vidéos, extraits audio et brefs commentaires, n'a pas grand-chose à voir avec l'immersion prolongée dans un polar captivant. L'un vous laisse étourdi, envahi en un clin d'oil des mille rumeurs du monde ; l'autre vous plonge des heures durant au cour d'une histoire singulière.
Une révolution se cache derrière ces deux expériences radicalement différentes. Laquelle ? Pour s'en faire une idée, rien de tel que se transporter au XIVè siècle, lorsque des moines irlandais ont introduit des blancs (des signes d'espacement) dans l'écriture. Jusqu'alors régnait la scripta continua, une écriture consistant en une succession de lettres placées les unes à la suite des autres sans que rien ne permette de détacher les mots. Une pratique qui demandait un effort redoutable pour accéder au texte et obligeait à lire à voix haute. "La compréhension des textes passait obligatoirement par la prononciation des mots. Seul l'emploi de majuscules et de couleurs entrecoupant le récit jouait le rôle de points de repères, rappelle Thierry Baccino, professeur de psychologie cognitive et ergonomique à l'université de Nice-Sophia-Antipolis et directeur scientifique au Laboratoire des usages en technologies d'information numériques (Lutin), à Paris. L'arrivée de l'espacement entre les mots et de signes de ponctuation, qui a rendu la lecture silencieuse, apparaît à bien des égards comme une révolution dans le système d'écriture, et par conséquent de lecture. La révolution que l'on connaît aujourd'hui avec les affichages sur écran est comparable." Car les signes à lire sont non seulement plus nombreux que jamais, mais aussi - et surtout - la manière dont ils s'organisent à l'écran, mêlés aux images, aux sons, demande au cerveau humain des capacités que la lecture sur papier n'exigeait pas. Notre encéphale a su "recycler" les capacités de reconnaissance des formes dont l'évolution l'avait doté, pour décoder des alphabets, inventés il y a 5 000 ans, aujourd'hui soigneusement imprimés sur des pages blanches. Un recyclage délicat : il faut plusieurs années pour devenir un lecteur "expert", capable de lire vite, comprendre et retenir ce qu'il lit. Que vaut cette capacité face aux écrans ? Le cerveau humain y est-il préparé ?
Sur ce dernier point, Thierry Baccino joue la prudence et observe que les techniques d'imagerie cérébrale existantes "ont très peu investi le champ de l'ergonomie cognitive, discipline qui s'occupe notamment de la lecture électronique. Néanmoins, tout laisse à penser qu'il n'existe pas de processus cérébraux spécifiques à la lecture sur écran comparée à la lecture sur papier. Bref, l'une et l'autre ont toutes les chances de mobiliser les mêmes zones cérébrales, puisqu'il s'agit de la même activité.

SURCROÎT D'ACTIVITÉ NEURONALE

Un avis que vient nuancer une étude récemment publiée. L'équipe du psychiatre américain Gary Small, du Semel Institute for Neuroscience and Human Behavior de l'Université de Californie, a enregistré, grâce à l'IRM fonctionnelle, l'activité cérébrale de 24 volontaires de 55 à 76 ans conviés à lire un livre et à faire des recherches sur Internet, la moitié du panel ayant déjà surfé, l'autre non.
Résultat : pendant la lecture, tous les sujets ont affiché la même activité neuronale au niveau des régions du langage, de la lecture, de la mémoire et de la vision. En passant sur la Toile, en revanche, le premier groupe, accoutumé au surf, a développé un important surcroît d'activité dans les centres du cerveau contrôlant les prises de décision et les raisonnements complexes (zones du cortex frontal, temporal et cingulaire). En clair, le lecteur - fouillant dans les résultats d'un moteur de recherche, par exemple - n'est pas seulement guidé par les lignes composant le texte. Il doit faire des choix, rebondir d'une information à une autre, construire son chemin de lecture.
Cette expérience est pour le moment isolée. En attendant que d'autres études en imagerie cérébrale viennent compléter ces premiers résultats, ce sont les observations comportementales qui éclairent les particularités de la lecture à l'écran. Laquelle, primo, est plus lente. Car l'oil humain, quand il lit, ne peut distinguer que quatre à six lettres à la fois (grosso modo un mot court), à cause de sa vision "fovéale", du nom de la partie de la rétine - la fovea - située près du nerf optique. Au cours de cette "fixation oculaire" d'une durée moyenne de 250 millisecondes, la perception de bâtons, de courbes, etc. amène le système cognitif à reconnaître des chaînes de caractères. Celles-ci sont alors mises en relation avec des mots encodés dans la mémoire au sein d'une sorte de dictionnaire mental, une étape sensorielle baptisée "accès au lexique". Le mot sitôt reconnu, son sens est activé automatiquement. Le sujet intègre cette signification dans le cadre de la phrase et, plus largement, dans celui du document qu'il parcourt (infographie ->). La boucle est bouclée, le temps de "fixation" s'allongeant évidemment chaque fois que le regard rencontre un vocable inconnu.

UN FLASH NOIR ENTRE LES PAGES

À cette vision fovéale, s'ajoute une vision "parafovéale" qui ouvre, le temps d'une fixation, une "fenêtre attentionnelle" sur les lettres voisines des lettres cibles. L'oil ne parvient pas à identifier précisément les lettres qui baignent dans le flou de cette région ni, a fortiori, à décoder le sens du mot qu'ils forment. Mais cette zone l'aide à anticiper la fixation du mot suivant, à estimer sa longueur, sa forme globale... En d'autres termes, à programmer le prochain mouvement des yeux. Or, sur les écrans actuels, cette zone d'anticipation rétrécit, perturbée par le scintillement de la surface, les contrastes insuffisants entre la couleur du fond et celle des caractères, l'utilisation de polices de caractères avec empattement... À la clé, un surcroît de fixations et un ralentissement de la lecture d'environ 25 %.
Autre différence de poids : un texte imprimé sur papier est par définition stable, fixe. À l'inverse, un document électronique, dynamique, peut se déplacer à volonté sur l'écran. Or, une phase essentielle de la lecture consiste à mémoriser les coordonnées spatiales (la position) des mots importants dans un texte, "de manière à pouvoir les retrouver sans efforts pour vérifier une information, par exemple, dit Thierry Baccino. Le scrolling [défilement vertical ou horizontal du texte] que permet le fenêtrage sur écran détruit complètement cette stabilité et détériore cette mémoire spatiale."
Lire, c'est aussi tourner des pages. Les chercheurs du Lutin ont montré que le changement de pages sur la plupart des e-books actuels parasite la mémorisation du paragraphe en cours de lecture. Un inconfort lié à la lenteur de changement d'affichage et au "flash noir" qui accompagne la transition entre deux pages. "Ce flash, long de 1 à 3 secondes efface en partie la mémoire de l'image de la page qu'on vient de lire, un phénomène connu sous le nom de 'change blindness' ('cécité au changement'), dit Charles Tijus, directeur du laboratoire Cognitions humaine et artificielle, et directeur du Lutin. L'attention décroche et on peine à se souvenir ce que l'on était en train de lire."
Et les liens hypertextes ? Si l'écran électronique peut se flatter d'apporter un plus sur le plan cognitif, c'est bien grâce à ces liens qui permettent de naviguer librement d'une page à l'autre au cours de la lecture, via un simple clic sur certains mots ou certaines images. L'hypertexte désenclave l'espace fixe de la page imprimée, pousse au vagabondage et autorise un accès non linéaire aux textes. Les experts, après avoir porté l'hypertexte aux nues et vu en lui la panacée en matière d'apprentissage, ont dû en rabattre. "La page consacrée au cycle de l'eau sur Wikipedia, par exemple, ne comporte pas moins d'une quarantaine de liens dans le corps de l'article, dit Eric Jamet, professeur de psychologie cognitive et d'ergonomie à l'université de Rennes-II et directeur du Laboratoire de psychologie expérimentale. L'usage de ces liens à une telle échelle complique singulièrement la tâche du lecteur, qui peut se retrouver très vite en situation de 'désorientation cognitive'."
Grisé par la possibilité d'activer une profusion de liens pour récupérer de l'information, le sujet finit souvent par éprouver des difficultés à "se repérer dans l'architecture globale du document et à comprendre les relations unissant ses différentes parties", ajoutent Julie Lemarié et Franck Amadieu, du laboratoire Cognition, langues, langage, ergonomie, à l'université de Toulouse Le Mirail. D'où l'embarras de ce professeur de français qui demande à ses élèves de mettre Internet à contribution pour rédiger un dossier sur le théâtre latin et se retrouve avec la moitié des copies portant sur le théâtre comme bâtiment et l'autre moitié sur la dramaturgie. Plus il ouvre des fenêtres, plus l'individu, quand il n'oublie pas purement et simplement l'objectif de sa lecture (ce que les cognitivistes appellent "le maintien du but en mémoire"), éprouve "la sensation d'être perdu, de tourner en rond et de ne plus pouvoir suivre le fil du récit", renchérit Thierry Baccino, selon lequel le stress déclenché par des hypertextes offrant un très grand nombre de pages à visiter fait perdre jusqu'à 30 % de la force de travail.
Une expérience récente menée par une doctorante d'Eric Jamet, Dorothée Fillet, sur un module de cours en ligne, montre que la lecture d'hypertextes est facilitée si le sujet se voit contraint de lire d'abord le document de manière linéaire, conformément à l'enchaînement conceptuel voulu par l'auteur, avant d'être autorisé à fureter comme bon lui semble. Cette stratégie s'avère beaucoup plus payante sur leplan cognitif puisqu'elle favorise la construction mentale d'une représentation du texte en un tout cohérent, ainsi que sa mémorisation. Sans oublier qu'en consultant "en linéaire" on ne se préoccupe pas de la navigation. La "charge cognitive" liée à cette navigation est donc plus faible.
Qui dit support électronique, de surcroît, dit multimédia. La plupart des documents trouvés sur les réseaux présentent l'information sous des formats variés (texte, graphique, son, image). Ainsi peut-on substituer une explication entendue à une explication lue, voire les présenter simultanément. Les résultats des études sur la multimodalité n'en sont pas moins contrastés. Certains travaux montrent, par exemple, que "des informations verbales sont en général mieux mémorisées lorsqu'elles ont été lues plutôt qu'entendues, assure Eric Jamet. Cela vient du fait que la lecture permet de moduler son rythme de prise d'informations en fonction des difficultés rencontrées, contrairement à l'oral."
Les lecteurs habitués à la Toile mobilisent, lors de la lecture sur écran (en bas), les zones du cerveau de la prise de décision et des raisonnements complexes, ignorées lors de la lecture sur papier (en haut ->).

UNE SURCHARGE MNÉSIQUE

D'autres expériences indiquent qu'entendre un texte simple simultanément à sa lecture induit un niveau de compréhension supérieur. Reste que "ces 'effets de redondance' du texte et de l'explication orale peuvent se révéler négatifs, poursuit le même chercheur. Par exemple, un document présentant une illustration accompagnée d'une explication orale est moins bien mémorisé si cette explication est présentée à l'écrit simultanément." Un résultat qui illustre un des défauts classiques des documents électroniques : l'abus de multimodalité nuit à la compréhension et se solde fréquemment par une "surcharge mnésique". À croiser trop de sources d'informations différentes pour tout savoir tout de suite, "la mémoire de travail, où sont emmagasinées les dernières informations provenant de l'environnement sensoriel du lecteur et qui présente une capacité limitée, s'engorge", estime Thierry Baccino.
Tels sont les enseignements majeurs engrangés à ce jour par les sciences cognitives à propos de la lecture électronique. Quant au futur... À supposer que des dispositifs de lecture nomade souples et de très bonne lisibilité voient le jour, que la structure des hypertextes s'améliore grâce aux progrès de l'ergonomie cognitive, pourrons-nous encore, d'ici quelques décennies, retourner sans peine à la bonne vieille lecture sur papier ? Les textes destinés à l'écran étant plus courts, avec des paragraphes également plus concis et une mise en page plus aérée, "la perte d'habituation au livre papier rendra probablement difficile la lecture statique, longue, attentive, pronostique Charles Tijus. Les premières impressions de la personne qui aura perdu l'habitude de lire sur papier seront désagréables. Mais cette 'phase d'accostage' passée, si le roman imprimé accroche le lecteur, la plasticité naturelle du système cognitif palliera ces inconvénients." Exactement comme, aujourd'hui, visionner un film en noir et blanc muet, quand on est accro aux blockbusters bavards et truffés d'effets spéciaux, peut être rébarbatif et suppose une phase d'adaptation.
À terme, poursuit le même expert, la difficulté d'accès au livre papier risque surtout de provenir de son environnement. "La lecture assistée, interactive et interopérable entre contenus et supports (chercher la signification d'un mot dans le dictionnaire électronique, copier-coller un paragraphe, partager ses impressions, donner son avis sur le livre, trouver de la documentation associée...) va probablement donner des habitudes que n'offre pas le livre classique. Sans compter l'environnement coloré dont nous aurons de plus en plus de mal à nous passer."

UNE LIBÉRATION DE L'ÉCRITURE

Le lecteur de demain, au cerveau entraîné à naviguer dans un espace sans véritables limites, sera donc butineur, impatient, partageur de ses découvertes et commentaires, avide de formats courts... Mais devrait être capable, à l'occasion, d'apprécier le poids, l'odeur, la texture, le confort visuel et la longueur d'un livre ordinaire. Le roi papier est détrôné, mais il ne s'exilera pas.
Assistera-t-on, ultime révolution, à la mort de l'écriture, à la disparition de l'acte d'écrire ? Voilà quelques années, d'aucuns prophétisaient non seulement la cannibalisation de la "graphosphère" par la "vidéosphère", mais aussi l'avènement d'une société de la "lecture sans écriture". Des interfaces vocales ultrasophistiquées allaient nous permettre de dicter aux machines toutes sortes de messages, un peu comme les écrivains, dans l'Antiquité, faisaient écrire leurs textes par des esclaves. La prophétie a fait long feu. Et si l'informatique a réduit l'écriture manuscrite à la portion congrue, elle a au contraire libéré les sources d'écriture : SMS, courrier électronique, chats, blogs, etc. C'est la "technologie de l'écriture" qui a profondément changé... et la lecture avec elle.

P.T-V. - SCIENCE & VIE > Septembre > 2009
 

   
 C.S. - Maréva Inc. © 2000 
 charlyjo@laposte.net