Le guêpier d'Europe incarne la nature dans ce qu'elle a de plus éclatant.

C'est un tout petit oiseau, avec un bec en forme de cimeterre et un plumage multicolore : gorge jaune, thorax turquoise, calotte châtain... La première fois que j'ai vraiment pu observer les guêpiers, j'étais à bord d'un bateau, sur le Zambèze. Les oiseaux avaient creusé leurs nids dans les rives sablonneuses du fleuve. Ils virevoltaient dans tous les sens, iridescents dans la lumière du soleil, à la poursuite de libellules pour nourrir leurs petits. La plupart des guêpiers doivent surmonter bien des épreuves pour migrer, tous les ans, de l'Europe méridionale jusqu'à l'Afrique australe. Nombreux sont ceux qui n'y survivent pas. Le stress du voyage a raison de certains volatiles, les rapaces en tuent d'autres. Mais il y a aussi un autre prédateur : l'homme.
"Le dernier chant", l'article de ce mois-ci écrit par Jonathan Franzen et illustré par les photographies de David Guttenfelder, traite de l'inconscience et de la cruauté des humains vis-à-vis de ces magnifiques créatures. Chaque année, d'un bout à l'autre de la Méditerranée, des centaines de millions d'oiseaux migrateurs sont abattus par des chasseurs. Ils utilisent des fusils, des filets en Nylon ultrafin ou des pièges à glu. Chasser ces oiseaux n'a rien à voir avec le besoin de nourrir une quelconque population. C'est un massacre pur et simple. Les loriots, les fauvettes et les pies-grièches dont parle Jonathan Franzen sont comme les volatiles du roman de Harper Lee, Ne tirez pas sur l'oiseau moqueur : "Ils ne viennnent pas picorer dans les jardins des gens, ils ne font pas leurs nids dans les séchoirs à maïs, ils ne font que chanter pour nous de tout leur cour".