P L A N È T E  G A Ï A 
 
   
   
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Big Bang : Quel est l'Âge de nos Atomes ?

Les grains de matière qui nous constituent ont une histoire aussi vieille que celle de l'Univers. Mais il aura fallu attendre l'élaboration de la théorie du big bang pour le comprendre.

Nous aurons beau tout faire pour paraître plus jeune que notre âge, notre corps sera toujours infiniment plus vieux que nous ! Pour une raison imparable : derrière notre peau, nos organes, nos muscles, nos os et notre sang se cachent des... atomes. Des milliards de milliards de milliards d'atomes. Ceux au cour de l'hydrogène, de l'oxygène, du carbone et de l'azote, les fameux composants dits "organiques", à la base de la vie sur Terre, qui représentent, à eux seuls, plus de 99 % de nos atomes. Auxquels il faut ajouter quelques cuillerées de sels minéraux (calcium, phosphore, chlore, soufre, potassium, magnésium et sodium), plus des pincées de fer, de chrome, de cuivre et d'autres métaux. Or, tous ces petits grains de matière composés d'un noyau de protons et de neutrons, cerclé d'un nuage d'électrons, ceux-là même dont nous sommes faits, existaient déjà du temps de Jules César ou même de l'homme de Cro-Magnon. À chacune de nos respirations, nous avalons, d'ailleurs, probablement, quelques atomes du dernier souffle de l'empereur romain ou de nos ancêtres préhistoriques. En fait, nous assimilons, aujourd'hui, des atomes qui existaient... avant que la vie n'apparaisse sur Terre. Avant même que le système solaire ne se forme !

Pour comprendre, il faut savoir que la plupart des espèces d'atomes qui existent, du moins leurs noyaux, ont été formés il y a plusieurs milliards d'années au cour des étoiles. Notre carbone, notre oxygène ou notre fer ont été patiemment fondus au sein de ces fantastiques forges à matière. Les processus de cette genèse stellaire ont été compris au milieu des années 50 grâce aux Britanniques F. Hoyle, M. et G. Burbidge, et à l'Américain W. Fowler.

De formes très variées, les nébuleuses naissent de la mort des étoiles, lesquelles repandent ainsi dans l'espace tous les atomes qu'elles ont formés.

Comme ici avec la nébuleuse du Crabe, vestige d'une supernova qui a explosé en 1054 (1).

Ou encore les nébuleuses planétaires de l'Hélice (NGC 7293) (2), de l'Ouf (CRl 2688) (3) et de la Rétine (IC 4406) (4).

MORTES, LES ÉTOILES DONNENT ENCORE LA VIE

À partir des noyaux d'hydrogène, les plus légers qui existent (un proton les compose), les étoiles arrivent à former des atomes de plus en plus lourds en les faisant fusionner entre eux. Après des millions, voire des milliards d'années de ce travail de "nucléosynthèse stellaire", arrivées à court de combustible, les étoiles meurent plus ou moins violemment, en répandant autour d'elles ces noyaux, au point d'engendrer ces magnifiques nébuleuses observées par les télescopes. C'est à partir de cette matière éparpillée dans l'espace par des générations d'étoiles ayant explosé (des supernovae) que le Soleil et la Terre ont pu se former dans leur diversité. Nous devons la vie à la mort des étoiles ! Un jour, le Soleil mourra à son tour, répandant autour de lui les embryons d'une possible vie future. Et le cycle se poursuivra...
Mais, direz-vous, d'où vient cet hydrogène "primordial", cette matière première à partir de laquelle les étoiles ont pu former les autres noyaux et qui constitue encore la majorité (90 %) des atomes qui existent ? Pour trouver la réponse, les physiciens ont d'abord dû donner à l'Univers une histoire. Et d'imaginer que le cosmos n'avait pas toujours été tel qu'on le connaît aujourd'hui : très froid (environ - 270°C) et très vide (seulement 10-35 g de matière par mètre cube en moyenne). De fait, pour que tous ces noyaux d'hydrogène se soient formés en si grande quantité, il a fallu qu'à un moment donné, l'Univers entier ait été plus dense et plus chaud que le cour des étoiles. Et cet "univers primordial" a une limite dans le temps, au-delà de laquelle les conditions de température et de pression sont si extrêmes que nos lois physiques ne sont plus valables : c'est le "big bang" (terme sujet à caution). Un moment unique dans l'histoire du cosmos, qui remonte, on le sait avec précision grâce au satellite américain WMAP, à 13,7 milliards d'années.
Aujourd'hui, on a coutume de dire que le big bang est la naissance de l'Univers. Qu'y avait-il avant ? On ne peut le dire. Peut-on même parler d'un "avant" puisque, dans le cadre de la relativité générale d'Einstein, notre temps et notre espace ont "émergé" du big bang ? Une chose est sûre : le big bang est le moment à partir duquel les scientifiques peuvent décrire l'Univers avec les outils mathématiques et physiques dont ils disposent. Un Univers emporté dans une formidable expansion, décrite dès les années 20 par le Russe A. Friedmann et le Belge G. Lemaître, au cours de laquelle sa température et sa pression n'ont cessé de décroître, pendant que les objets qu'il abrite n'ont cessé, eux, de se complexifier.
Et voilà bien d'où viennent les atomes : à peine une seconde après le big bang, alors que la température avoisinait encore les 10 milliards de degrés, les premiers noyaux d'hydrogène (en fait, les protons) ont pu se fomler à partir de la bouillie de particules qui remplissait alors l'Univers. Les briques fondamentales de nos atomes datent donc de cet instant. Autrement dit, notre corps a l'âge du big bang !

LA PREUVE PAR UN QUOTA D'ATOMES TRÈS PRÉCIS

Dans les trois minutes qui ont suivi, d'autres noyaux légers ont commencé à se former (deutérium, hélium et un peu de lithium). Mais le processus s'est vite arrêté, la température ayant déjà trop baissé. C'est le physicien russo-américain G. Gamov qui expliqua le mécanisme de cette "nucléosynthèse primordiale" en 1948. Il en découle des quotas très précis des divers atomes présents dans l'Univers (90 % d'hydrogène, 9 % d'hélium et 1 % de tous les autres atomes), que l'on observe bien autour de nous, et qui constituent l'une des trois grandes confirmations de la théorie du big bang.
La formation des premiers atomes remonte, elle, à 380.000 ans après "l'instant zéro". L'Univers avait alors suffisamment refroidi (autour de 3000°C) pour que les électrons puissent s'associer aux noyaux et constituer des atomes. Or, il se trouve que nous pouvons encore voir la trace de cet événement dans le ciel. Car, au même moment, la lumière s'est désolidarisée de la matière et a pu se propager librement dans l'espace. Et de cette première lumière, il reste ce que les cosmologistes nomment le "rayonnement cosmologique fossile". Ce plus ancien vestige de l'enfance de l'Univers, encore repérable aujourd'hui dans les longueurs d'ondes radio, baigne tout le ciel ; sa découverte fortuite, par les ingénieurs américains A. Penzias et R. Wilson en 1965, constitua la seconde validation éclatante du bien-fondé de la théorie du big bang. Et en 2003, son étude par le satellite WMAP a permis de tirer une foule de renseignements sur l'Univers, comme son âge, sa géométrie, ou encore la date de formation des premières étoiles : 200 millions d'années après le big bang.
La suite de l'histoire est connue dans les grandes lignes : durant les 13 milliards d'années qui suivirent, étoiles et galaxies se sont structurées pendant que l'expansion se poursuivait. La découverte, en 1929, par l'Américain E. Hubble, de la fuite des galaxies due à l'expansion, constitue la troisième confirmation du scénario du big bang. Beaucoup de détails échappent encore aux scientifiques : comment se sont formées les premières étoiles et galaxies, et les systèmes planétaires ? Le big bang a répondu à bien des questions... pour en soulever quantité d'autres.

D'OÙ VIENT L'EXPRESSION "BIG BANG" ?
C'est le cosmologiste britannique Fred Hoyle (1915-2001) qui inventa ce terme en 1950 pour tourner en ridicule le scénario que, vingt-cinq ans plus tôt, le Russe Alexandre Friedmann et le Belge Georges Lemaître venaient de formuler sur la naissance de l'Univers. Ironie : il ne pouvait imaginer alors que sa trouvaille assurerait finalement la notoriété d'une théorie dont il était en réalité le principal détracteur...
QUEL BRUIT A FAIT LE BIG BANG ?
Aucun. Contrairement à l'image qu'on s'en fait trop souvent, le big bang n'est pas une "explosion" de matière dans un espace qui aurait préexisté. Il s'agit de la naissance de notre Univers et, avec lui, de l'apparition de l'espace et du temps. À ce moment, certes, l'Univers était extrêmement dense et chaud, et toute la matière et l'énergie qu'il contient étaient fortement concentrées, mais cela n'a rien à voir avec une explosion.
DANS QUOI L'UNIVERS EST-IL EN EXPANSION ?

Dans rien, puisque, par définition, l'Univers est tout ce qui existe.
ET A-T-IL UN CENTRE ?
Non. Il n'y a aucun lieu privilégié dans l'Univers. Le big bang s'est produit à un moment précis, il y a 13,7 milliards d'années, mais pas en un endroit précis : il a eu lieu partout en même temps. Et l'expansion de l'espace, qui a commencé au moment du big bang, est partout la même. Nous voyons toutes les galaxies s'éloigner de nous, mais un extraterrestre dans une galaxie voisine verrait aussi toutes les autres galaxies s'éloigner de lui.
L'UNIVERS A-T-IL DES LIMITES ?
D'un point de vue logique, il ne peut pas en avoir. Sinon, il y aurait "quelque chose" au-delà de ces limites, et cet "autre chose" serait encore l'Univers puisque celui-ci contient, par définition, tout ce qui existe. En revanche, il est difficile de savoir s'il est fini ou infini. Les mathématiques autorisent l'existence d'espaces "courbes", dits "non euclidiens", qui sont finis tout en n'ayant pas de limites. La surface de la Terre, qui est un espace courbe à deux dimensions, en est un bon exemple : si on marche toujours tout droit, on finit par revenir au même endroit (la surface de la Terre est finie), mais sans jamais rencontrer de bord (elle n'a pas de limites). Est-ce pareil pour l'Univers, même si, lorsqu'on passe à trois dimensions, notre cerveau n'est plus capable de se représenter un espace fini ? Ce que l'on sait, c'est que l'Univers "observable", c'est-à-dire la partie de l'Univers que l'on peut voir, est un espace à peu près euclidien, c'est-à-dire "plat". Mais au-delà ?
POURQUOI VOIR LOIN, C'EST VOIR DANS LE PASSE ?
Parce que la lumière ne se déplace pas instantanément. Si c'était le cas, on verrait toutes les étoiles et les galaxies exactement telles qu'elles sont au moment où on les observe. Mais comme la lumière met une seconde pour parcourir 300.000 km, l'image d'un objet situé à 300.000 km de la Terre nous parvient avec une seconde de décalage. Et plus l'objet est loin, plus cet écart est grand. La lumière du Soleil, émise à 150 millions de kilomètres de nous, met ainsi huit minutes pour atteindre la Terre ; nous voyons donc le soleil tel qu'il était huit minutes auparavant. Lorsqu'on dit qu'une étoile se trouve à "une année-lumière" (environ 10.000 milliards de kilomètres), cela signifie que sa lumière a mis une année pour nous parvenir. Voilà pourquoi observer des galaxies lointaines, distantes de plusieurs milliards d'années-lumière, revient à observer le passé de ces galaxies. Et donc le passé de l'Univers.
AURA-T-IL UNE FIN ?
Apparemment, non. Du moins pas une fin abrupte à la manière d'un "big crunch", sorte de big bang inverse, où l'espace se mettrait à se contracter, et l'Univers redeviendrait très dense et chaud. D'après de récentes observations, une mystérieuse énergie sombre accélère l'expansion : les galaxies devraient donc s'éloigner toujours plus rapidement les unes des autres, et l'Univers continuer de refroidir. Lorsque toutes les étoiles seront mortes, elles devraient tomber dans les trous noirs supermassifs au centre de leur galaxie. Eux-mêmes finiront par s'évaporer, recrachant des particules qui erreront sans fin dans un Univers pratiquement vide.
SUBISSONS-NOUS LES EFFETS DE L'EXPANSION ?
Non. L'expansion de l'Univers ne nous éloigne pas de nos voisins de palier, pas plus qu'elle n'éloigne la Terre du Soleil, ni même le Soleil des autres étoiles de notre galaxie. Car tous ces systèmes (les hommes sur la Terre, les planètes autour du Soleil, les étoiles autour du cour de leur galaxie) sont liés par la gravitation qui les maintient et contrecarre les effets de l'expansion. Seules les galaxies qui ne sont pas liées gravitationnellement entre elles (celles qui ne sont pas au centre d'un amas de galaxies, par exemple), subissent les effets de l'expansion et s'éloignent donc les unes des autres.

V.G. - SCIENCE & VIE > Août > 2003
 

   
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