Cette question, que tout amateur de cosmologie s'est posé, montre combien nous sommes esclaves de nos habitudes. L'expérience quotidienne nous pousse en effet à raisonner en termes de force : une pomme tombe de son arbre à cause de la force gravitationnelle générée par la Terre sur sa propre masse. Dans cette logique, à cause de sa masse nulle, le photon devrait être la particule fantôme de la gravité et échapper ainsi à toute attraction, même d'un trou noir. Or, un raisonnement un peu plus approfondi montre que cette argumentation peut être remise en question. Comme des scientifiques l'ont souligné dès l'époque de Newton, l'accélération de la pesanteur est indépendante de la masse : dans une enceinte sous vide,une plume et une enclume chutent à la même vitesse. Dès lors, puisque la masse n'est pas un paramètre pertinent, pourquoi le photon ne subirait-il pas, lui aussi, l'effet de la gravité ? La question divisait les contemporains de Newton. L'ESPACE-TEMPS SE DÉFORME La véritable théorie de la gravité - la relativité générale ("véritable" jusqu'à ce que nous en ayons une meilleure) - jette aux oubliettes la notion de force et la remplace par la notion de courbure d'espace-temps. Selon celle-ci, un corps massique agit sur un autre corps en déformant l'espace-temps autour de lui (on utilise le terme "espace-temps" plutôt que celui "d'espace" car en relativité générale, le temps joue un rôle aussi important que les trois dimensions de l'espace). Pour reprendre une image classique, l'espace-temps serait comme une toile de trampoline sur laquelle rouleraient des balles : en s'enfonçant dans la toile, les balles créent une concavité locale qui infléchit la trajectoire des autres balles. De la même manière, une étoile ou un nuage de gaz interstellaire modifient la trame de l'espace-temps environnante, altérant le mouvement des corps qui s'y déplacent.
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