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Aurores Polaires Extraterrestres

Aurores sur Saturne et Uranus


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Aurores Joviennes

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Aurores Extraterrestres : la Danse de la Lumière

S.R. - SCIENCES ET AVENIR N°797 > Juillet > 2013

Les Aurores Polaires Extraterrestres

Là haut dans le ciel, de gigantesques rubans colorés dansent et brillent. Le spectacle ravit les chasseurs d'aurores polaires. Cyans, rouges ou verts, des filaments de couleurs changeantes colorent la voûte celeste comme autant de coups de pinceau sur la toile de fond des étoiles qui scintillent dans le noir. Une lune se lève sur l'horizon, tandis que 2 croissants de lune complètent le tableau de ce ciel nocturne...

Nous sommes hors du système solaire, sur une des quelque 854 exoplanètes recensées au 28 décembre 2012. La plupart d'entre elles ont été détectées par des variations de luminosité de leur étoile. Lorsque la planète passe entre la Terre et son étoile, la luminosité apparente de cette dernière diminue légèrement, car une petite fraction de sa surface est masquée temporairement. Cette méthode, dite du transit, fournit aux astronomes de précieuses informations sur la masse, le rayon et l'orbite de ces mondes encore mal connus. Au-delà du spectacle magnifique qu'elle offre, la lumière des aurores polaires extraterrestres pourrait-elle aussi nous aider à mieux comprendre ces planètes lointaines. À condition toutefois de pouvoir la recueillir sur Terre ! Et c'est bien là le problème : la lumière visible de ces aurores polaires est hélas trop peu intense pour pouvoir nous parvenir, En revanche, l'émission radio associée nous est accessible et pourrait bien nous révéler des informations inédites sur la durée du jour, l'intensité du champ magnétique, la présence éventuelle de satellites ou l'interaction entre la planète et son étoile.

Aurores et champ magnétique : Sur notre planète, les aurores boréales et australes résultent de l'interaction entre les électrons supersoniques du vent solaire et les molécules de gaz de la haute atmosphère. Excités et ionisés, les atomes gazeux émettent alors des photons de longueurs d'onde caractéristiques, jaunes et verts pour l'oxygène, bleus ou rouges pour l'azote. Mais avant d'entrer en collision avec le gaz de la haute atmosphère, les électrons émettent des ondes radio en se déplaçant le long des lignes du champ magnétique terrestre, vers les pôles (voir illustration ->). Dans le système solaire, des aurores polaires ont déjà été observées sur Jupiter, Saturne, Uranus et Neptune. De toutes ces géantes gazeuses, Jupiter est la plus massive, et celle qui possède le champ magnétique le plus fort. Les aurores polaires joviennes sont ainsi les plus intenses de tout le système solaire. Elles produisent principalement de la lumière ultraviolette, indétectable sur Terre à cause de l'absorption par l'atmosphère terrestre, mais visible depuis l'espace grâce aux télescopes spatiaux Hubble et Chandra. Elles sont également détectables indirectement, par leur émission radio associée, ce qui intéresse beaucoup les astronomes.
À l'instar de Jupiter, toutes les planètes dotées d'un champ magnétique pourraient être détectées par cette émission radio, qui présente l'avantage d'être généralement plus intense que celle de leur étoile. "Lorsqu'on observe une planète lointaine dans le visible ou l'infrarouge, la planète est beaucoup moins lumineuse que son étoile, et il est très difficile de la détecter", rappelle Philippe Zarka, de l'Observatoire de Paris. Plus chaude que la planète, l'étoile est aussi bien plus brillante. En revanche, "l'émission radio de la planète ne dépend que de l'intensité de son champ explique-t-il, et pas de sa température". Elle peut donc être plus intense pour la planète que pour l'étoile. Observée à quelques dizaines de mégahertz (MHz), Jupiter nous apparait ainsi aussi brillante que le Soleil. Mais si Jupiter orbitait autour d'une autre étoile plus lointaine que le Soleil, même l'une des plus proches de nous, cette émission serait trop faible pour être détectée sur Terre. Les astronomes parient donc sur le fait que "certaines planètes produisent des émissions radio beaucoup plus intenses que celle de Jupiter", comme l'explique Philippe Zarka.

La quête des ondes radio : Si le signal de la planète est suffisamment intense pour être détecté, il fournira aux scientifiques de nombreux renseignements. Lors des aurores, les ondes radio sont émises au niveau des pôles, dans un faisceau conique étroit (voir illustration) qui tourne avec la planète et balaie l'espace comme un phare. en mesurant le délai qui sépare la réception de 2 impulsions radio successives, on peut calculer la période de rotation de la planète sur elle-même. La fréquence des ondes permet, quant à elle, d'estimer l'intensité de son champ magnétique. Et parce que les ondes radio émises lors des aurores polaires sont polarisées, elles ne peuvent pas être confondues avec l'émission radio de l'étoile qui ne l'est pas. Forts de cet espoir, les astronomes ont entrepris dès 1977 d'explorer le voisinage des étoiles proches de la Terre pour détecter d'éventuels signaux radio émis lors d'aurores polaires planétaires. Mais les systèmes de détection disponibles sont restés longtemps trop peu performants pour parvenir à recueillir quelque chose. De nouveaux espoirs ont vu le jour avec l'avènement du programme interférométrique LOFAR (Low Frequency Array), lancé en 2010. Ce radio télescope analysera à terme les données radio de 50.000 antennes réparties à travers l'Europe et connectées par fibre optique pour réaliser une cartographie de l'univers aux basses fréquences. LOFAR sera notamment capable de détecter des fréquences de l'ordre de 10 MHz, là où les autres radiotélescopes, comme le GMRT (Giant Metrewave Radio Telescope), installé en Inde, ne captent que les signaux au-delà de 50 MHz. Or, les scientifiques estiment que c'est justement dans les fréquences inférieures à 50 MHz que sont émises l'essentiel des ondes radio lors des aurores polaires. Jupiter, par exemple, n'émet rien au-dessus de 40 MHz. Les astronomes attendent donc beaucoup de ce nouveau télescope : "Si nous n'avons rien détecté avec LOFAR d'ici quelques années, ce ne sera pas parce que nous sommes passés à côté des faisceaux d'ondes radio des exoplanètes, s'enthousiasme Philippe Zarka. Ce sera parce qu'il n'y a pas d'émission". En attendant de futures détections, les scientifiques ont développé des simulations numériques pour modéliser l'émission radio des exoplanètes, et en particulier celles des planètes géantes, cousines de Jupiter, les plus nombreuses parmi les exoplanètes connues. Selon les chercheurs, deux scénarios peuvent expliquer une émission massive d'ondes radio. Si la planète est proche de son étoile, elle est régulièrement balayée par le vent stellaire de cette dernière. L'interaction des particules chargées stellaires avec le champ magnétique de la planète produit des ondes radio, selon un mécanisme analogue à ce qui se passe sur Terre. L'émission radio peut également être liée à laprésence de lunes orbitant autour de la planète, comme dans le cas des aurores joviennes. C'est le satellite Io, et non pas le Soleil, qui alimente l'atmosphère de Jupiter en particules chargées. Doté d'une activité volcanique, Io expulse régulièrement des gaz ionisés qui se retrouvent piégés dans les lignes de champ magnétique de la planète. Le même processus pourrait être à l'ouvre chez les exoplanètes qui possèdent aussi des satellites actifs.

La radioastronomie pour les exoplanètes : Les ondes radio sont donc un formidable outil de détection et d'analyse des systèmes planétaires extrasolaires. Par ailleurs, la radioastronomie permet d'étudier les planètes qui ont le plus de chance d'abriter de la vie puisqu'elle ne concerne ce celles possédant un champ magnétique. En effet, les planètes dotées d'une magnétosphère sont protégées des effets délétères des rayonnements cosmiques. En agissant comme un bouclier, les lignes de champ qui entourent la planète la protégent du bombardement incessant de ces particules chargées énergétiques qui pourraient détruire les molécules du vivant, et notamment l'ADN. L'existence d'un champ magnétique apparait ainsi comme un critère d'habitabilité. Une considération qui a d'ailleurs amené les scientifiques à s'intéresser à Ganymède, un satellite de Jupiter qui abrite des aurores polaires, signant la présence d'un champ magnétique. La mission européenne JUICE (Jupiter Icy Moon Explorer) partira explorer ce monde rocheux en 2022.

A.P. et S.H. - LE MONDE DES SCIENCES N°7 > Février-Mars > 2013
 

   
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