Démarrage tardif, activité en berne... Le cycle solaire en cours s'annonce comme le plus faible depuis cent ans. Ce qui surprend les astrophysiciens, incapables pour l'heure de prédire la suite. Les taches qui constellent la surface du Soleil (1), indices de son activité magnétique... sont beaucoup moins nombreuses que prévu (2), témoignant d'un nouveau cycle solaire, initié en 2008, étonnamment faible. Ce devait être le point culminant de son activité. Le sommet de sa vivacité retrouvée. Le moment du nouveau cycle où le Soleil ferait feu de tout bois, exhibant un foisonnement de taches. Les astrophysiciens l'avaient affirmé en 2009 : "Le maximum solaire est attendu en mai 2013. "Las... En guise d'apothéose, le Soleil n'offre depuis des mois qu'un pâle spectacle. Le nombre de taches à sa surface, qui témoigne de son activité magnétique et suit un cycle de onze ans, ne décolle pas. Pis, après un accès de fièvre inattendu en décembre 2011 (près d'une centaine de taches), il s'est effondré. Ainsi, en février 2013, seules 38 taches constellaient notre astre... bien loin des 90 prévues initialement pour ce maximum solaire. LE DÉBUT D'UNE ACCALMIE ? Si le Soleil semble en panne, il n'est donc peut-être pas pour autant malade ! Ses prochains cycles devraient trancher entre deux scénarios opposés. "Certaines mesures et analyses suggèrent que le cycle suivant sera encore plus faible et que nous pourrions même entrer dans une période de 'grand minimum' tel que le minimum de Maunder, au XVIIème siècle, caractérisé par un Soleil totalement calme durant soixante ans, détaille Frédéric Clette. A l'inverse, d'autres interprétations, ainsi que l'historique des taches solaires, montrent que l'actuelle faiblesse du cycle n'exclut pas le retour à des cycles plus forts. La réponse descendra du ciel. A partir de 2019, environ...
Le faible rayonnement UV émis par le Soleil récemment observé semble effectivement corrélé aux hivers plus rudes constatés en Europe du Nord. Voici en tout cas ce qui ressort d'un nouveau modèle climatique. Lors d'une période d'activité solaire réduite, la moyenne des températures en Europe du Nord chute de 1 à 2°C l'hiver. En décembre 2010, nous n'hésitions pas à barrer la Une de S&V d'un intriguant "Le Soleil en panne". Un faisceau d'indices convergeait alors pour affirmer que la vigueur de notre étoile était étonnamment faible. Au point d'envisager que le Soleil n'entre bientôt dans une période de calme prolongé, semblable à celle observée lors du petit âge glaciaire. Avec quel impact sur les températures ? À l'époque, une analyse statistique sur les 350 dernières années apportait un début de réponse : lors des périodes d'activité solaire réduite, les hivers rigoureux ont été plus fréquents en Europe du Nord. Un lien que viennent étayer aujourd'hui Sarah Ineson, du Met Office Hadley Centre (Royaume-Uni), et son équipe grâce à un modèle climatique inédit. DES PRÉDICTIONS CLIMATIQUES PLUS PRÉCISES Celui-ci prend en effet en compte une observation très récente dont nous nous étions fait l'écho : la mise en évidence, lors du minimum du dernier cycle solaire, en 2007, d'une diminution bien plus importante qu'envisagée du rayonnement ultra-violet émis par le Soleil. Or, les UV contribuent au réchauffement de la haute atmosphère. L'équipe anglaise a donc cherché à simuler la réponse du climat à ce moindre bombardement d'UV. Résultat ? Le modèle prévoit des températures plus basses d'un à deux degrés l'hiver en Europe du Nord, mais plus élevées d'autant en Europe du Sud. En cause ? Le moindre réchauffement de la stratosphère lors du minimum solaire modifie la circulation atmosphérique, réduisant les vents d'ouest sur l'Europe du Nord et favorisant l'arrivée d'air polaire. De quoi expliquer, pour les auteurs, la rigueur particulière des hivers au cours des trois dernières années. "Etant donné la quasi-régularité du cycle solaire de onze ans, nos résultats pourraient aider à améliorer la prédiction climatique décennale", concluent les chercheurs, précisant toutefois que l'observation satellite du spectre solaire qui a révélé cette chute du rayonnement UV doit encore être confirmée. Lors de leur publication en 2010, ces mesures avaient en effet suscité une vague de scepticisme, nombre de scientifiques y voyant juste le fruit d'une erreur instrumentale. Il faudra donc attendre d'avoir dissipé ces doutes avant d'identifier clairement l'influence du Soleil sur le climat régional.
Son activité magnétique en berne depuis quelques années demeurait une énigme. Des physiciens viennent de montrer, par modélisation, l'origine de ce dérèglement : la circulation de la couche superficielle de l'astre s'est accélérée... Depuis le dernier pic, en 2001, le Soleil a connu plus de 700 jours sans aucune tache solaire (flèche), taches qui traduisent la force de son champ magnétique. En décembre 2010, nous consacrions notre Une à l'affaiblissement de l'activité solaire. Depuis des siècles, cette activité magnétique suit des cycles de 11 ans. À son plus bas niveau en 2008, elle aurait dû augmenter pour atteindre un pic vers 2013, puis redescendre. Or, elle est restée inexplicablement basse. Un affaiblissement qui s'est déjà produit, notamment au XVIIe puis au tout début du XIXe siècle, alors que la planète connaissait des périodes de froid intense, sans qu'aucun lien de cause à effet n'ait été démontré. UNE HYPOTHÈSE ANCIENNE Des chercheurs indiens et américains sont en tout cas parvenus à expliquer la faiblesse actuelle du Soleil, confirmant une hypothèse ancienne : elle serait la conséquence d'une accélération de la circulation du plasma solaire, ce gaz ionisé qui compose la couche superficielle de l'astre. L'équipe, menée par Dibyendu Nandy, a utilisé un modèle informatique en deux dimensions, et a fait varier la circulation méridienne (de l'équateur vers les pôles) du plasma. Bingo : lorsque celle-ci accélère, le modèle reproduit des ralentissements du cycle comparables à celui observé actuellement. Comme l'explique Allan Sacha Brun, du CEA, "les taches fonctionnent comme des petits pôles magnétiques, elles migrent vers les pôles de signe opposé, où elles disparaissent. Puis de nouvelles taches se préparent en profondeur". Quand la circulation méridienne s'accélère, les taches n'ont pas le temps de se préparer, et l'activité baisse. Mais cette circulation méridienne n'est peut-être pas seule en cause : "Des mouvements de plasma descendants, liés à la turbulence en profondeur, peuvent aussi jouer". Un aspect que seuls des modèles en 3D pourront simuler. La forte éruption du 15 février semblait en tout cas attester de la reprise de l'activité solaire.
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