Fabriquer de l'Eau Potable

Il Fabriquer de l'Eau Potable avec du Vent

Sa quête du Graal : étancher la soif des Terriens qui souffrent du manque d'eau. Ce bricoleur talentueux pourrait bien y parvenir grâce à son éolienne révolutionnaire.

Dans un village isolé, au fin fond de l'Afrique, les larges pales de l'éolienne qui brassent l'air doucement. Trente mètres plus bas, plusieurs mères de famille qui attendent leur tour pour remplir leur bidon. Là, un robinet qui distribue de l'eau potable issue d'un système de condensation unique au monde... Cette scène, Marc Parent en rêve depuis plus de 15 ans. L'année prochaine, elle deviendra réalité : la première commande de son éolienne révolutionnaire vient d'être passée au Niger. Madagascar et l'Indonésie pourraient suivre. "Contrairement à un puits, ma machine ne se tarit jamais se réjouit l'inventeur, âgé de 45 ans. Mon équipe et moi avons désormais une responsabilité vis-à-vis de toutes les populations qui n'ont pas facilement accés à une source buvable".
L'idée a jailli en 1995, à Saint-Barthélemy où le Français travaillait dans la réparation de frigos. Dans cette île des Antilles, les alizés sont réguliers, les coupures d'électricité fréquentes et l'eau potable rare. Comme nombre de ses voisins, Marc Parent récupérait l'eau qui coulait de son climatiseur pour compléter la réserve de pluie servant aux lessives. Et pour boire, il devait, comme tous les îliens, acheter des bouteilles. Pour pallier ces contraintes, ce grand bricoleur laissa libre cours à son talent. Il imagina un système frigorifique couplé à une éolienne. Le principe ? Condenser grâce à du froid la vapeur contenue dans l'air à l'aide de l'énergie produite par l'éolienne, puis filtrer le liquide obtenu. Marc Parent déposa un brevet à son retour en métropole, en 1999.
À Sainte-Tulle, son bourg natal des Alpes-de-Haute-Provence, on lui a d'abord prêté un garage, puis un atelier municipal, un terrain vierge pour qu'il y construise des bureaux d'études. En 2010, l'entreprise, baptisée Eole Water, a reçu 1,2 million d'euros d'un fonds d'investissement spécialisé dans le soutien aux PME innovantes. Depuis, une trentaine de sous-traitants, tel ArcelorMittal, usinent pour elle des pièces sur mesure. Le modèle WMS1000, le cinquième prototype, est plus que prometteur : il produit 1000 litres d'eau potable par jour. "De quoi subvenir aux besoins quotidiens de plusieurs centaines de personnes", explique l'inventeur. Cette éolienne subit actuellement des tests en conditions arides à Abu Dhabi, aux Emirats arabes unis.
Principal obstacle, le prix : entre 400.000 et 600.000 euros l'engin. Trop cher pour des ONG. Et Marc Parent peine encore à trouver des investisseurs capables de financer une production industrielle. Mais il ne désarme pas. "Notre machine est compétitive avec d'autres technologies, comme le dessalement d'eau de mer, rentable sur les côtes, mais qui cesse de l'être dès qu'on avance dans les terres", affirme-t-il. Un développement à grande échelle du WMS1000 permettrait de diviser le prix de revient par 5, pour tomber à un centime d'euro le litre d'eau. Chez Eole Water, les espoirs humanitaires doivent composer avec la dure réalité économique. Est-il rentable de sauver les gens ? Marc Parent veut prouver que oui.

C.C. - GEO N°405 > Novembre > 2012
 

   
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