Protéger l'Eau, c'est Défendre la Vie

Après un premier épisode consacré à la biodiversité ce deuxième épisode de Vu du Ciel aborde la question de l'eau douce, des inégalités de répartition de cette ressource vitale aux initiatives humaines visant une meilleure gestion de l'or bleu. L'eau douce est la plus précieuse richesse de notre planète, mais aussi la plus convoitée et la plus menacée.
Elle est à l'origine de toute vie sur Terre et a le pouvoir de former les paysages les plus spectaculaires : gorges, canyons, glaciers, chutes, deltas, fleuves...

"On ignore la valeur de l'eau... Tant qu'on n'en manque pas ! Je veux alerter sur les menaces qui pèsent sur l'eau douce, partout dans le monde. Nous gaspillons chez nous sans même y penser parce qu'elle ne manque jamais", nous dit Yann Arthus-Bertrand. Yann Arthus-Bertrand a donc choisi Israël et la Jordanie pour présenter les grands enjeux de l'eau douce à travers le monde. Ces deux pays, mais aussi les territoires palestiniens, sont peut-être au centre d'une prochaine "guerre de l'eau", à moins que ce ne soit l'eau douce, si rare, qui les pousse à se réconcilier...

Pour cette deuxième émission, Yann Arthus-Bertrand nous propose des images spectaculaires tournées en haute définition à travers le monde : Israël, Jordanie, Palestine, Mali, Algérie, Etats-Unis et région de la Loire en France... une occasion unique de présenter ce grand enjeu du XXIe siècle qu'est la défense de l'eau douce ! En poursuivant son "état des lieux de la planète", Yann Arthus-Bertrand nous fait découvrir des spécialistes passionnants comme Ricardo Petrella, Julie Trottier, Elaine Soloway, Christine Jean et beaucoup d'autres...

LE CYCLE DE L'EAU

C'est l'eau qui fait de notre planète une planète bleue. Mais 3% seulement de cette eau est de l'eau douce. Fragile, précieuse, elle charrie les éléments indispensables à la vie au cours d'un cycle vieux de 4 milliards d'années.

Pour l'eau douce, tout commence dans les océans qui concentrent 97 % des eaux du globe. Sous l'action des rayons du soleil, une mince pellicule d'eau s'évapore, laissant le sel à la mer. Elle commence alors son long voyage dans les airs sous forme de vapeur d'eau puis se condense en nuages. Lorsque les microgouttes qui composent les nuages ont un diamètre suffisant, elles se transforment en pluie ou en neige.
Une partie de cette eau est emprisonnée dans les glaciers. Ils représentent aujourd'hui les deux tiers de l'eau douce qui existe sur la planète. Une réserve à laquelle nous n'avons pas accès. L'eau liquide, elle, trace son chemin vers les océans. Sa force érosive, sur des millions d'années, lui permet de façonner une multitude de reliefs, de se frayer un passage même dans les roches les plus dures. Une partie de l'eau qui coule sur la terre plonge sous la surface. Si on exclut les glaciers, il y a cent fois plus d'eau douce sous le sol que sur la terre ! Cette eau en perpétuel mouvement est le pivot de tout ce qui vit. Les plantes en contiennent 90 %, notre propre corps 70 %. Nourricière, protectrice, l'eau est au centre de tout.

Le grand cycle de l'eau qui paraît si bien rodé comporte malheureusement un point faible. L'eau ne retombe pas systématiquement au même moment ni aux mêmes endroits. Dans de trop nombreuses régions du globe, l'eau manque. Ailleurs, les cycles climatiques alternent des saisons des pluies diluviennes avec des saisons sèches où il ne pleut pas. Les robinets du ciel s'ouvrent et se referment brutalement. C'est ce qu'on appelle la mousson. Sur un quart de l'année, tombent les trois quarts des pluies, un moment de renaissance pour les hommes et pour la nature.

Une partie de l'eau douce présente sur terre n'est pas utilisable. Retournée trop vite aux océans, stockée sous la forme de glace ou dans des nappes trop profondes, elle ne participe plus au cycle de l'eau. Comme l'or noir, l'or bleu n'est pas inépuisable. À nous donc de trouver les bonnes solutions pour empêcher l'eau de nous filer entre les doigts.

LA VIE SANS EAU

La vie sans eau semble impossible. Pourtant des milliers d'espèces peuplent les étendues désertiques. Ces terres arides, très différentes, portent toutes le même nom : DESERT. Dans ces régions, les pluies sont un phénomène rare et l'air est très sec. La température monte jusqu'à 50 degrés. Comment vivre avec si peu d'eau ? Avant tout, il faut en récolter le plus possible. Pour les plantes, l'unique chance de capturer l'humidité est de profiter de la rosée, à l'aube. Une aubaine dont profitent la plupart des êtres vivants. Technique plus efficace, certains animaux récoltent directement l'eau portée par la brume. Elle se condense progressivement le long de leur corps et glisse jusqu'à leur gueule. Pendant le reste de la journée, quand le soleil est au zénith, l'objectif n'est plus de trouver de l'eau mais d'en perdre un minimum. La couleur prend alors toute son importance. Les tons clairs réfléchissent le rayonnement solaire et font baisser la température de la peau.
La stratégie est identique pour certains arbres. Mais ils possèdent un autre atout, en cas de sécheresse extrême. En sacrifiant une branche, ils diminuent leurs besoins en eau et assurent leur survie. La plupart des plantes ont limité le nombre et la taille de leurs feuilles pour économiser le précieux liquide. De plus, elles ont développé des capacités de stockage phénoménales. Des cactus peuvent contenir en réserve des centaines de litres d'eau.

Accumuler l'humidité est vital, encore faut-il limiter au minimum le gaspillage. Les plus chanceux disposent d'une adaptation surprenante. Avec un corps aplati, il est possible de ne s'exposer qu'à moitié aux rayons du soleil. À l'abri, l'autre moitié se refroidit rapidement. Lorsque la température au sol est de 70°C, il faut minimiser le contact avec le sable brûlant. Lever alternativement les pattes permet de les refroidir instantanément. Heureusement, le sable est un très mauvais conducteur de chaleur. Lorsqu'on n'est pas doué pour les contorsions, la méthode la plus simple est de créer un abri. Pour cela, un simple enfouissement protège du soleil. Pour que la vie reprenne, il suffit alors d'attendre que le soleil disparaisse. Certaines plantes profitent de ce répit et n'ouvrent leurs fleurs qu'à la tombée de la nuit. Après une journée passée à l'abri, la vie remonte à la surface. Pour les prédateurs, c'est une chance de s'alimenter et de récupérer l'eau contenue dans leurs proies. La vie dans les déserts est précaire. Aujourd'hui elle ne tient plus qu'à un fil. Que la sécheresse s'accentue et elle disparaîtra !

France - La passionaria de la Loire

C'est le plus long fleuve de France, une voie d'eau naturelle longue de mille kilomètres. Son bassin occupe un cinquième du territoire ! La renommée de la vallée de la Loire dans le monde tient d'abord à ses châteaux : Chambord, Chenonceau, Chaumont, des joyaux architecturaux de la Renaissance.

Depuis sa source au Mont Gerbier des Joncs jusqu'à son embouchure dans l'Atlantique, la Loire a aussi conservé de nombreuses richesses écologiques : des échassiers comme les grandes aigrettes, les hérons, mais aussi des castors, des loutres et des saumons qui remontent le fleuve pour se reproduire. Pourtant, depuis 1950, 80% des fleuves d'Europe ont été équipés de barrages. En perturbant le régime des fleuves, ces barrages empêchent les nappes phréatiques de se recharger. Ils appauvrissent les milieux naturels. De nombreuses espèces animales disparaissent.

Si la Loire est restée l'un des fleuves les moins dégradés d'Europe, c'est grâce au combat d'une femme, Christine Jean, 20 ans de croisade pour que le fleuve reste sauvage. Cette Nantaise a passé toute son enfance au bord de la Loire. Ce qui explique en partie sa volonté farouche de défendre le fleuve contre tous les aménagements qui pourraient le dénaturer. C'est en Auvergne, dans les gorges de Serre de la Fare que Christine Jean a débuté son combat. Un projet de barrage s'apprêtait à faire totalement disparaître l'une des dernières vallées sauvages de la Loire, sanctuaire d'un écosystème encore intact. Aujourd'hui 17 ans après, Christine Jean est fière de son action menée contre l'ouvrage qui devait s'élever ici. C'est grâce à elle que ce fleuve sauvage n'a pas été définitivement dompté. À partir de 1989, pendant cinq ans, le chantier du futur barrage est occupé par les écologistes. Les manifestations se multiplient. Christine Jean se charge de coordonner le collectif d'associations anti-barrage. Ceux qui défendent les projets de barrages accusent les écologistes de mener un combat d'arrière-garde. Il ne s'agit pas de refuser tout aménagement. Mais entraver la circulation de l'eau dans le lit d'un fleuve, c'est perturber l'équilibre de toute sa vallée, de la source jusqu'à l'estuaire. En 1994, 5 ans après le début de la mobilisation, le gouvernement français recule, le projet de barrage de Serre de la Fare est annulé, les autres suivront. Cette victoire retentissante aboutit même à la destruction d'ouvrages déjà activités. Christine Jean gagne aussi peu à peu le soutien des pêcheurs qui veulent sauver le grand saumon sauvage. Aujourd'hui il commence à faire son grand retour dans la Loire. C'est le même objectif que poursuit un homme : Martin Arnoux, disciple de Christine Jean. Son combat : Le retour du grand saumon de l'Atlantique sur le principal affluent de la Loire : l'Allier. Cela passe aussi par le démantèlement d'un barrage : Le barrage de Poutes. La concession accordée à Edf se termine en 2007. L'entreprise a demandé de la prolonger de 40 ans. C'est maintenant qu'il faut agir. Aujourd'hui, il existe un parc d'éoliennes dans la région. 10 suffiraient à remplacer la production électrique du barrage... Cette bataille est la suite logique du combat entamé il y a 20 ans. Un combat qui en 1992 valu à Christine une reconnaissance internationale : le prix Goldman, véritable prix Nobel de l'environnement. Mais Christine a déjà oublié les paillettes et a repris son combat. La Loire n'est pas seulement sa réussite, mais celle de tous ceux qui se sont battus pour le respect de l'environnement et de la Nature. À l'époque, ils n'étaient pas si nombreux ! Aujourd'hui, Christine espère infléchir des décisions concernant l'extension du port de Saint-Nazaire dans l'estuaire de la Loire. Cette extension menace en effet les marais et les vasières, qui sont des territoires nourriciers essentiels pour les poissons et les oiseaux ; Il ne faut ni les détruire ni les polluer. L'objectif est de limiter l'agrandissement du port sans reproduire les erreurs du passé. Pour que la Loire reste un fleuve vivant et libre.

États-Unis - La démesure de Las Vegas

Nous sommes dans le désert de Mojave, au sud du Nevada, l'état le plus sec des États Unis. Ici, il pleut en moyenne 200 millimètres d'eau par an. Trois fois moins qu'à Paris. En permanence, le soleil fait régner une chaleur accablante. C'est dans ce décor que se trouve l'une des cités les plus impressionnantes au monde : Las Vegas.

Malgré la sécheresse permanente, l'eau est partout. Les casinos continuent de rivaliser d'extravagances aquatiques, il faut dire que tout leur est permis : ils rapportent 6 milliards de dollars par an... Résultat : la consommation en eau de Las Vegas est 2 fois supérieure à la moyenne des États-Unis, soit plus de 1000 litres par jour et par personne. C'est 4 fois plus qu'en France. Rien ne semble étancher la soif de Sin City.
Pat Mulroy est la femme la plus puissante du Nevada. Elle est chargée d'approvisionner en eau Las Vegas et sa région, coûte que coûte. "Quand je me lève le matin, je sais qu'il y aura de l'eau pour tout le monde ce jour-là, ce qui me préoccupe, c'est ce qui va se passer dans 5, 30, 40 ou même 50 ans. C'est notre plus grande angoisse : quand vous habitez la ville la plus aride des États-Unis, vous ne pouvez pas vous réveiller un matin et qu'il n'y ait plus d'eau". Le problème, c'est que Las Vegas manquera bientôt d'eau. La ville connaît la croissance la plus rapide des États-Unis. Une population de plus d' 1,5 million d'habitants, qui devrait doubler en 10 ans. Une explosion démographique alimentée par les 40 millions de visiteurs, qui font de Las Vegas la première destination touristique des États-Unis. Pour Pat Mulroy, rien ne doit freiner cette extraordinaire expansion, et surtout pas le problème de l'eau. "Mon rôle est d'apporter de l'eau quelle que soit l'utilisation qui en est faite. Je ne dois en aucun cas intervenir sur le développement de la ville, ou me prononcer sur la manière dont elle se développe". Personne ne se souciant du gâchis de l'eau, les 3/4 de la consommation de Las Vegas sont dus aux jardins, aux parcs ou encore aux 50 golfs de la ville. Ce qui ne fait qu'aggraver le plus gros handicap de Las Vegas : sa dépendance à 88% de l'eau du Colorado. La principale source d'approvisionnement en eau de la ville est le lac Mead, un lac artificiel, le plus grand réservoir des États-Unis. En tout, 7 états de l'Ouest américain pompent leur eau dans le lac Mead, selon un partage décidé il y a plusieurs années, bien avant la sécheresse prolongée, qui frappe toute la région. Aujourd'hui, le lac Mead a atteint ses limites : en 10 ans, il a diminué de moitié. La seule solution trouvée par Las Vegas est d'aller chercher l'eau là où elle est, à 500 km de la ville, à l'est du Nevada. Les autorités prévoient de construire un aqueduc géant pour capter l'eau d'une magnifique vallée. Mais pour Dave Tilford, leader de l'opposition à l'aqueduc, c'est toute la bio diversité de la région qui pourrait être remise en cause. "Cette eau est utilisée par les animaux sauvages pour se désaltérer, mais aussi par le bétail qui vient paître dans la région. Toute cette plaine verdoyante sert également de pâturage à toute la faune sauvage"... C'est cette eau-là qui est en danger. Une eau qui sort tout droit d'une nappe phréatique dont nul ne connaît la capacité, ni combien de temps elle pourra durer... Cet aqueduc sera si énorme qu'un homme pourra s'y tenir debout à l'intérieur et marcher jusqu'à Las Vegas... Pourtant dans le Nevada les réserves en eau ont aussi souffert de la sécheresse. Dean Baker dirige avec ses trois fils, le ranch familial depuis plus de 40 ans et il n'a pas assez d'eau pour ses activités. "Ca fait des années qu'il n'y a pas eu d'eau dans les abreuvoirs. On avait l'habitude de faire boire les vaches ici, mais non ne le fait plus. Cela fait des années que l'eau n'a pas coulé de cette source. On peut regarder à l'intérieur, l'eau n'arrête pas de baisser. Selon moi, l'eau est à 4 ou 5 mètres de profondeur". Légalement, Las Vegas a tous les droits, quitte à priver cette vallée de toute son eau, et ainsi détruire tout un pan des traditions américaines. Consommer raisonnablement pourrait suffire. Mais l'heure n'est pas à la sagesse : il faut trouver de l'eau et vite pour ne pas faire fuir les investisseurs et les touristes... Un jour la réalité finira bien par rattraper Las Vegas...

Brésil - Le château d'eau du Brésil

Ici l'eau jaillit de la terre. Une eau, qui le long de son parcours, alimente les régions les plus peuplées du Brésil. Près de 60 millions d'habitants, l'équivalent de la population française, en dépendent. Pour les Brésiliens ces sources d'eau sont un trésor qu'il faut protéger. Ils les appellent "le château d'eau du Brésil".

Depuis 20 ans, Danielle Mitterrand à la tête de sa fondation, défend les droits des peuples opprimés. Un engagement qu'elle estime inutile aujourd'hui, si l'homme n'a pas avant tout accès à l'eau. À 82 ans, elle s'investit sans hésiter dans ce nouveau combat. Ici elle est intervenue dans l'urgence. 2 multinationales voulaient mettre cette eau en bouteille. Or plus au sud, un projet identique a presque asséché une autre nappe phréatique. Danielle Mitterrand a alerté l'Unesco. Ils l'ont écouté et classé cette région "réserve de Biosphère", ce qui empêche toute commercialisation.
Cette eau ne sera pas mise en bouteilles mais un autre danger la menace. Un danger lié à la richesse même de la terre. Ici elle regorge de minéraux qui enrichissent l'eau. Un phénomène renforcé par l'incroyable biodiversité de la région. Ce qui donne une eau d'une qualité rare quand elle ressort de la montagne, filtrée par la roche. Mais cette terre riche en minéraux, l'est aussi en minerais. Depuis toujours, c'est la principale région minière du Brésil. Voici l'une des plus grandes mines de fer du monde. Une des plus polluantes aussi. Le principal danger pour toute l'eau de cette région. Une plaie ouverte mais aussi la principale activité économique de la région depuis 70 ans. La ville d'Itabira a grandi avec la mine. Pourtant elle détruit son environnement. Quand le minerai de fer est extrait, les déchets sont rejetés sous forme de boues dans des bassins. Ces boues libèrent peu à peu des métaux lourds qui s'infiltrent dans les nappes phréatiques et les polluent. Résultat : en aval de la mine, les villes doivent purifier l'eau pour la rendre à nouveau potable.
À 100 kms au nord de la mine de fer, près des sources d'eaux si précieuses, se trouvent ces fours où on fabrique du charbon de bois. Celui-ci est utilisé comme carburant pour transformer le fer en acier dans les hauts fourneaux de la sidérurgie. Pour alimenter ces fours, on a importé un arbre d'un autre continent, un arbre qui pousse très vite. 150.000 hectares de forêt native ont été arrachés et remplacé par des plantations d'eucalyptus. Tout ce qu'on voit, c'est une forêt entière d'eucalyptus, une forêt entière sans biodiversité, une forêt qui aspire toute l'eau du sol et appauvrit toute la région. La seule chose qui reste, c'est une forêt sans vie faite exclusivement pour le profit d'une entreprise. Sous les forêts d'eucalyptus, le sol devient imperméable. Résultat : l'eau ruisselle en surface et ne va pas recharger les nappes phréatiques. Au bout de 20 ans d'exploitation, c'est la désertification de la zone. Les industriels s'en moquent. Ils se sont installés ici parce que les pluies y sont abondantes. Les arbres poussent vite. L'opération est très rentable pour les propriétaires de ces gigantesques plantations. L'eucalyptus provoque aussi un engorgement des cours d'eau. Ses racines peu profondes ne retiennent pas le sol qui finit dans les torrents. Le courant transporte cette terre rouge et la dépose de plus en plus loin. Petit à petit elle comble les rivières. Mêmes conséquences pour l'autre activité minière du pays, l'extraction de pierres précieuses. Cette terre, riche en fer, l'est aussi en or et en diamants. Alors chacun cherche son filon, comme ici dans cette mine de Topaze. En creusant la montagne, les mineurs provoquent la mort des cours d'eau. Les sols dévalent les pentes et se retrouvent dans les rivières. "Avant il y avait du fond. Ca faisait 2 ou 3 mètres de profondeur. Maintenant ca touche. Regardez ce qu'a fait l'érosion, le sable a comblé l'endroit ou vivaient les poissons, ils sont tous morts". Les poissons n'ont plus assez d'eau pour se reproduire. José Antonio n'arrive plus à faire vivre sa famille avec la pêche. "Tu peux rester ici toute la journée et tu vas rien prendre. C'est l'extraction d'or et de diamant qui a tué le poisson. Ca a tué tout le poisson. Aujourd'hui je ne le fais plus car ca détruit les berges des fleuves et des rivières, les sources d'eau. Ce dont on a besoin pour vivre. Si on détruit l'eau, on se détruit nous-mêmes. Donc il faut nous aider, pour agir pour que ca n'arrive plus jamais". Pour protéger le château d'eau du Brésil, le classement en réserve de biosphère par l'Unesco est un 1er pas. Mais cela ne permet pas d'interdire les activités minières les plus polluantes. Alors, pour préserver les eaux les plus précieuses, comme cette cascade et les sources qui l'alimentent, il faut créer des zones de protections plus strictes, des parcs nationaux. Par son intervention, Danielle Mitterrand donne plus de poids aux écologistes locaux pour mobiliser la population de la réserve. Tous ont le même objectif : obtenir des industriels, dont l'activité est indispensable à la vie de la région, qu'ils prennent des mesures pour préserver cette eau d'une pureté exceptionnelle.

Mali - Les Dogons : cultivateurs du désert

Un soleil écrasant exerce son inflexible dictature, à 800 kms de Bamako, au cour du Mali, à la frontière brûlante du Sahel... Un immense plateau de grès, où l'on ne repère aucun filet d'eau, s'arrête sur la falaise de Bandiagara, longue de 200 kms... C'est le pays Dogon. Entre la plaine et le plateau, l'eau, si rare, est une perpétuelle angoisse. Les femmes acceptent, depuis des générations, d'affronter chaque jour un territoire hostile, des failles vertigineuses, mais comment pourraient-elles se passer d'eau ?

Niché sur la falaise, le village de Douroux réunit 350 âmes... La sécheresse de la terre, le sable et le vent, les pluies insignifiantes, font des Dogons des agriculteurs héroïques... L'oignon est curieusement la spécialité des Dogons. Une culture traditionnelle qui réclame beaucoup d'eau. Entretenir ces jardins relève de l'exploit. Et d'une discipline militaire ordonnée de mains de maître par Amadou, le "chef de l'eau". Il rationne. Et il a l'oil... Une mare à l'agonie... tout ce qui reste des dernières pluies pour arroser les jardins. L'anxiété se lit sur le visage d'Amadou... "Je suis inquiet, c'est que vraiment il ne pleut pas beaucoup, et que c'est la seule eau. Vraiment quand on prend beaucoup on risquerait à trois mois de ne plus avoir de l'eau". Chaque villageois vit ici de l'agriculture et récolte l'oignon, en famille, dans ses carrés de terre... Malgré des conditions impossibles, on produit tout de même plusieurs milliers de tonnes d'oignons par an. Avec un rationnement exemplaire de l'eau, la plus importante source de revenus du pays se maintient... Malgré les suppliques des anciens, les nuages ne sont pas généreux au-dessus du pays Dogons : 60 jours de pluie par an ! Un taux de pluviométrie parmi les plus bas du monde. Savoir gérer l'eau, ne pas gaspiller, relève de la survie. Chaque parcelle d'un-mètre-carré est conçue pour mieux retenir l'humidité... En sortant d'une terre aride, les oignons consacrent des mois d'efforts et de privation car l'apparente fraîcheur des jardins ne peut faire oublier l'enfer lunaire, écrasé de chaleur, qui entoure les parcelles travaillées par les Dogons. Les Dogons sont devenus, au prix d'efforts surhumains, les premiers producteurs d'oignons rouges d'Afrique. Des éboulis de la falaise, les femmes extraient le banco, une terre mélangée à de la paille et de l'engrais, pour mieux cultiver.
Jour de marché à Douroux... Caddie vient une fois par semaine vendre les oignons qu'elle cultive avec son mari... Les femmes sont chargées de négocier. Palabres, marchandages, elles animent le marché. On vend, on achète, et on troque... Les grossistes emportent à chaque fois plusieurs tonnes d'oignons... de lourds ballots partent pour Bamako, la capitale où ils sont expédiés vers tout le continent africain. Amadou n'est pas seulement le gardien redouté de l'eau des Dogons... Quand il ne rationne pas, il travaille à de nouvelles stratégies pour mieux gérer l'eau. Les agriculteurs l'ont élu pour cela, il y a 5 ans. Aussi surveille-t-il avec fierté l'avancement d'un barrage qui peut tout changer... On a construit plus de 200 barrages comme celui-ci dans tout le Mali afin d'aider le travail compliqué des agriculteurs et c'est un français, l'ethnologue Marcel Griaule, dont le souvenir est encore vivant ici, qui fait construire le premier barrage. Il entreprend en 1930 la traversée aventureuse de toute l'Afrique de l'Ouest pour s'arrêter en pays Dogon. Il y étudie les rites et les traditions de ce peuple courageux qui tente de maîtriser la nature. Précurseur du développement durable, il sait que son barrage aidera les Dogons à poursuivre l'indispensable culture de l'oignon... Rien n'a fondamentalement changé, depuis Marcel Griaule, sur la falaise de Bandiagara... Les mêmes rites, le même travail de la terre, les mêmes oignons... et la crainte de plus en plus palpable de manquer, un jour, de l'eau sacrée sans laquelle aucun avenir n'est possible. La sécheresse est toujours plus oppressante. Et le désert, chaque année, plus envahissant... Découvrir une nouvelle source fait de vous un homme nouveau, puissant et envié... La rumeur s'est répandue au village... Moussa, un agriculteur, vient de trouver de l'eau, au milieu des cailloux... Amadou, incrédule mais curieux, se propulse sur les lieux... Moussa a bien fait d'écouter le sorcier qui lui a conseillé de creuser ici... Il a pioché, pioché encore, jusqu'à mettre à jour un filon dans la nappe phréatique, à 5 mètres de la surface du sol... "On a creusé trois mois avant de trouver de l'eau, trois mois ! On ne savait pas si on trouverait mais finalement on est tombé dessus, je suis vraiment fier". Le courage de Moussa a payé. Le puits lui appartient. Il pourra arroser ses cultures et subvenir désormais aux besoins de sa famille... Il mesure aussi sa chance car si les tentatives sont nombreuses, l'eau vient rarement récompenser les efforts des cultivateurs... Pour Amadou, comme pour tous les Dogons, seuls les génies, ces êtres impalpables, imprévisibles, et foncièrement bienveillants, peuvent faire revenir l'eau. Au village, il y a partout des signes de la vénération portée à NOMMO, dieu de l'eau et maître de la vie. À chaque recoin de porte, chaque trou dans la pierre, un masque, une statuette porte les espoirs d'un peuple qui travaille autant qu'il prie pour voir, bientôt, ruisseler un peu d'eau.

Jordanie - Vu du Ciel : Arthus Bertrand

Amman : pas d'eau tous les jours

Voici Amman, en Jordanie, une ville où l'eau est rare. Un habitant d'Amman consomme quinze fois moins d'eau qu'un Américain, et cette quantité diminue chaque année, avec l'augmentation de la population.

Amman, Pékin, Le Caire, Mexico. Savez-vous qu'on manque d'eau dans la moitié des plus grandes villes du monde ? Le plus désolant, c'est que 30 à 50 % de l'eau distribuée est perdue à cause des fuites dans les canalisations. Cette ville d'Amman, la capitale de la Jordanie a été créée de toutes pièces dans les années vingt. C'était un village de 4 000 habitants, c'est aujourd'hui une très grande ville de plus de 2 millions d'habitants. 50 % du pays vit ici sans compter tous les réfugiés de la guerre en Irak, mais ils ont tous une obsession : l'eau. Elle est rationnée. Chaque famille possède sa citerne et à Amman l'eau n'est pas distribuée tous les jours.

À Amman, par la force des choses, l'eau est devenue une marchandise trop chère. Tous les jours, 1200 camions-citernes circulent dans la ville pour livrer de l'eau aux habitants. L'eau du robinet à Amman ne coule qu'une fois par semaine. En proportion un Jordanien doit consacrer dix fois plus d'argent pours l'eau qu'un Français. Ici, l'eau est distribuée une seule journée par semaine : elle alimente les cuves dans la nuit, de 22h00 jusqu'au lendemain à la même heure. Quand on a de l'eau une fois tous les 8 jours et qu'elle doit servir à toute une famille, avec des enfants, ce n'est vraiment pas facile. La première chose à faire c'est assurer le lavage du linge, en faisant couler l'eau doucement. La lessive de la semaine doit se faire en un jour, le ménage aussi, en fait toutes les taches ménagères doivent se faire en une seule journée. Et les autres jours, on ne fait que des petites taches qui nécessitent peu d'eau pour tenir jusqu'à la prochaine livraison. En été, on a besoin de nettoyer plus et le problème s'aggrave car l'eau est évidemment encore plus rare. Imaginez la situation, il faut prévoir l'eau pour le bain des enfants, ça devient vraiment catastrophique l'été. Ceux qui ont des citernes propres peuvent la boire, mais d'autres n'ont pas cette possibilité car leur citerne est rouillée ou souillée. L'eau y est insalubre et l'on ne peut vraiment pas la boire. Ceux-là sont obligés d'acheter de l'eau potable en bouteille.

Petra : les Nabatéens

Nous sommes en Jordanie et voici Petra. C'est une cité unique au monde érigée en plein désert malgré la rareté de l'eau. Petra était un caravansérail, le plus grand centre commercial de la région. Elle a abrité jusqu'à trente mille caravaniers et commerçants des routes de l'encens, c'était au premier siècle après Jésus-Christ, on les appelait les Nabatéens.

Pétra était une étape importante du commerce de l'encens, que les Nabatéens transportaient d'Arabie jusque vers la Méditerranée. La ville fut abandonnée, il y a 2000 ans, quand les chameaux furent remplacés par les bateaux, qui contournaient le désert. À Pétra, il ne pleut en moyenne que 9 jours par an. Pour recueillir l'eau, les Nabatéens avaient construit des kilomètres de rigoles et des grandes citernes, creusées dans la pierre. Et plus que tout, les Nabatéens avaient le sens de l'économie de l'eau. Riccardo Petrella est un économiste italien qui milite pour que l'eau ne soit pas une marchandise. Il pense que des nabatéens, on peut apprendre beaucoup de leçons. La première c'est qu'un peuple peut vivre avec peu d'eau s'il en fait l'usage collectivement, un usage parcimonieux, et un usage également solidaire. Le scandale de l'eau aujourd'hui, c'est que, bien que nous ayons la possibilité de permettre à tout le monde d'avoir accès à l'eau, il y a encore 4.500 enfants qui meurent chaque jour, à cause des maladies dues à l'absence d'eau potable et à l'absence de services sanitaires. C'est le scandale le plus significatif de notre société actuelle.

Défendre le droit à l'eau, c'est défendre le droit à la vie ! C'est pour cette raison que Ricardo Petrella milite au plan international afin que le droit à l'eau soit inscrit dans la charte des droits de l'homme. à peu près cent cinquante à deux cents millions de personnes sur la surface de la terre ont effectivement un problème d'absence d'eau... Mais on constate que même dans les déserts les plus profonds, le riche a toujours accès à l'eau. Finalement on arrive à dire que la solution du problème, c'est le pouvoir d'achat. L'eau est devenue une marchandise. La vie doit être gratuite, et l'eau c'est la vie... L'eau doit être l'expression de la gratuité de la vie.

Les carrousels du désert

70 % de l'eau douce utilisée dans le monde sert à irriguer des terres agricoles. Mais parfois, cette eau, on la gaspille. En France nous nous comportons comme des riches, des milliardaires en eau. Rien que pour se nourrir, un Français consomme sans s'en rendre compte 4000 litres d'eau par jour ! Pour un simple steak, si on tient compte du mais irrigué qui a nourri le bouf jusqu'à mon assiette, il aura fallu 2000 litres d'eau.

Un autre exemple, un T-shirt en coton ! Du champ de coton jusqu'à l'usine de tissage sa fabrication aura coûtée 7000 litres d'eau. Simplement pour notre courant électrique il faut 400 litres d'eau par jour et par Français. Dans tout ce qu'on utilise quotidiennement, il y a des quantités énormes d'eau. C'est ce qu'on appelle l'eau virtuelle. Et pourtant c'est une consommation qui est bien réelle. Dans le désert du Wadi Rum en Jordanie on découvre des cercles de verdure ! On les appelle des carrousels agricoles. Il n'y a pas de rivière et pas de lac. Alors d'où vient l'eau qui permet de cultiver ces immenses surfaces ? L'eau qui rend possible ces cultures se trouve sous les pieds. C'est une nappe phréatique ; malheureusement cette nappe n'a pas le temps de se reconstituer car elle est faite d'eau fossile, c'est-à-dire très ancienne. L'homme est en train de dépenser en quelques dizaines d'années ce qui a mis des millions d'années à se former. L'eau qu'on gâche ici manquera forcément aux générations futures.

Israel - Vu du Ciel : Arthus Bertrand

Jérusalem

Jérusalem devrait être un exemple de cohabitation pour la planète et c'est tout le contraire qui s'y passe. Dans cette partie du monde où les tensions sont si grandes, on peut espérer que le manque d'eau va réunir un jour l'inconciliable : ce ne serait pas la première fois que les hommes se retrouvent sur l'essentiel...

Ici, le "mur de la honte", pour les uns, perçu comme un mur de sécurité pour les autres, déchire cette ville, trois fois millénaire. Ce qui est incroyable vu du ciel, c'est que dans le prolongement de ce mur, il y a le mur des Lamentations, qui si sacré pour tous les Juifs du monde et à deux pas l'esplanade des mosquées, si importante pour tous les Musulmans et devant l'église du Saint-Sépulcre, le rendez-vous de tout les Chrétiens.
Vu d'en haut tout se mélange et il devient évident qu'il existe un bien commun dont on n'a pas encore compris l'importance, que l'on soit chrétien, juif, musulman ou que l'on ne croit en rien du tout. Ce bien inestimable, c'est l'eau ! Et c'est l'eau qui va sans doute forcer les hommes, ici au Moyen-Orient, à faire la paix pour assurer leur survie. C'est tout l'espoir qu'on peut former ici à Jérusalem pour l'eau et pour nous tous.

La mer morte

La Mer morte est la mer la plus salée du monde ! Mais son niveau baisse d'un mètre par an... En cinquante ans, cette mer a perdu 30 % de sa superficie et les experts estiment sa disparition en 2050.

La Mer morte disparaît parce qu'on a rompu un équilibre qui était millénaire. De tout temps l'eau de la mer morte s'est évaporée en raison de la très grande chaleur qui règne dans cette région en été. Cette quantité perdue par évaporation était rendue à la mer morte par le fleuve Jourdain qui est son seul affluent. Depuis une cinquantaine d'années, Israël et la Jordanie ont détourné le Jourdain principalement pour développer l'irrigation à grande échelle, le fleuve n'est donc plus capable d'acheminer la quantité d'eau nécessaire pour remplacer l'eau perdue par évaporation. D'autre part, en aval, le phénomène d'évaporation est accéléré par deux compagnies industrielles qui exploitent la Mer morte comme une mine. L'eau est acheminée par un canal vers des bassins d'évaporation, pour accélérer le processus et récupérer le sel.
En effet, les sels dissous dans la Mer morte contiennent de grandes quantités de potassium, de brome et de magnésium. Ces matières premières, très recherchées par l'industrie chimique, sont exploitées à grande échelle par Israël et la Jordanie. Hélas, tous ces bouleversements menacent des formes de vies uniques au monde, qui se sont adaptées à ces conditions extrêmes. Depuis le développement de l'irrigation et de l'agriculture à échelle industrielle dans la vallée de la mer Morte, le Jourdain draine les eaux agricoles usées. Or, ce sont les seules eaux qui sont acheminées encore vers la mer Morte, et elles sont évidemment très chargées en insecticides, pesticides, engrais. Pourtant, il n'y a pas d'évacuation possible : la Mer morte est le terminus de ces eaux polluées. Un grand projet est actuellement en gestation. Il s'agit d'un canal qui réunirait les eaux de la mer rouge avec celle de la Mer morte. Mais ces deux mers n'ont pas du tout la même concentration en sel. L'écosystème en serait donc bouleversé de manière irrémédiable et pour toujours. Ce projet ne sauverait pas la Mer morte. Il n'en donnerait que l'apparence, dans le sens où on remplirait un trou d'eau, comme vous remplissez votre piscine, sans tenir compte des conséquences sur l'écosystème. La solution serait d'accepter de vivre avec notre planète, d'accepter que la ressource n'est pas infinie et qu'on ne pourra pas simplement faire grandir éternellement les quantités d'eau que l'on veut allouer à l'agriculture, à l'industrie ou la consommation domestique. Accepter les limites de notre planète.

La forêt de Yatir et la palmeraie de Ketura

Le désert, ce n'est pas toujours une fatalité. Dans le Néguev, au sud d'Israël, il cède peu à peu la place à une grande forêt... Des oliviers, des cyprès, des pins, des pistachiers. Cette forêt au milieu du Néguev, c'était le rêve d'un homme : David Ben Gourion, un des pères fondateurs d'Israël.

Quatre millions d'arbres stoppent ici le désert. Des villages naissent et l'homme gagne du terrain. Cette forêt est totalement artificielle, elle est née de la main des hommes. Le premier arbre à été planté en 1963 : aujourd'hui, la forêt de Yatir couvre trois milles hectares. C'est la plus grande forêt du pays, elle n'a pas quarante ans. Grâce à cette lutte contre la désertification, la population du désert du Néguev va augmenter de près de 50% en dix ans, avec l'arrivée des nouveaux immigrants d'Europe de l'Est. Mais ailleurs dans le monde, à cause de la sécheresse et d'une mauvaise exploitation des sols, près de 600 millions d'hectares, c'est-à-dire 11 fois la taille de la France, sont en voie de désertification. En Israël justement les agronomes ont inventé ou plutôt perfectionné l'agriculture du désert. À Ketura en Israël, Elaine Soloway mène des recherches étonnantes dans un "Kibboutz" expérimental. Aujourd'hui la seule façon de faire revivre une zone souffrant de désertification est de planter des arbres pour permettre aux autres plantes, animaux, insectes et oiseaux de vivre sur ces terres. Les arbres sont la base de tout écosystème, c'est l'élément le plus important. Les arbres sont un remède à de nombreux problèmes environnementaux. Ce ne sont pas seulement les poumons de la terre, ils sont aussi l'air conditionné du monde : ils rafraîchissent le sol, ils permettent à la pluie de revenir puisque lorsque l'air frais augmente, les nuages s'arrêtent et il pleut. Les arbres stabilisent aussi le sol qui s'érode, ils stoppent les tempêtes de sable, ils peuvent donc être plantés comme barrière protectrice autour des villages et des villes. Ils permettent de stocker le carbone, et compensent donc les effets du réchauffement climatique. Si seulement 1/3 de la planète était recouverte de forêts, beaucoup de nos problèmes seraient moindres et peut-être même disparaîtraient. Certains endroits resteront à jamais des déserts. évidemment on ne va pas transformer le Sahara en forêt ! Et est-ce bien nécessaire ? Car les déserts appartiennent au monde au même titre que tous les autres écosystèmes.

Elaine Soloway fait venir des plantes du monde entier pour tester leur résistance à la sécheresse et leur tolérance au sel. Car ici l'eau que l'on pompe dans la nappe phréatique est saumâtre c'est-à-dire qu'elle est légèrement salée. Parmi les huit cents millions de personnes souffrant de la faim dans le monde, la majorité vit dans des régions arides. C'est en améliorant l'agriculture du désert, qu'Elaine Soloway participe à la lutte contre la faim. Notre planète a beaucoup souffert de nos méthodes agricoles. Il est important pour nos enfants et nos arrières petits-enfants que nous trouvions de meilleures méthodes qui utiliseraient moins d'eau, moins d'énergie, qui s'adapteraient mieux à notre environnement. C'est l'une des raisons pour lesquelles Elaine est décidée à trouver ici, dans ce petit pays pauvre en terres cultivables et en eau, des méthodes pour une agriculture durable qui n'abîmera plus la terre et qui nous permettra d'avoir tout ce dont nous avons besoin.

Palestine - Vu du Ciel : Arthus Bertrand

Gaza : les enfants en danger

Gaza, est une petite bande de terre étroite au sud-ouest d'Israël. Avec plus de 3200 habitants au kilomètre carré, sa population est une des plus denses au monde. Pompée dans la nappe phréatique polluée, 90 % de l'eau distribuée au robinet est impropre à la consommation. Une catastrophe responsable de centaines de morts chaque année.

Pour Yunes Mogheir, spécialiste de l'eau, les maladies sont véhiculées par l'eau du robinet. On trouve le choléra, la typhoïde... C'est le résultat de l'augmentation du taux de nitrates dans l'eau distribuée à la population. Compte tenu de l'augmentation de la population, Gaza ne parvient plus à retraiter ses eaux usées. À 2 kilomètres du centre ville, sont déversés les égouts des quartiers Nord de la ville. Seul 1/3 des eaux usées déversées dans cette station d'épuration est retraité. Après traitement, l'eau va directement dans un lac situé à proximité de la station. Malgré ce traitement l'eau reste de très mauvaise qualité. Elle va ensuite s'infiltrer dans la nappe phréatique. Ainsi les eaux souterraines sont polluées par la présence de nombreux produits chimiques comme les nitrates. Cette pollution a des conséquences directes sur la santé. Pour les habitants des quartiers pauvres, "L'eau du robinet, même si on la donnait aux animaux, les animaux refuseraient de la boire. On achète les filtres, on s'approvisionne aux sources d'eau potable, alors que l'eau du robinet, on peut à peine l'utiliser pour se laver les mains et faire la lessive". Conséquence : les enfants souffrent de calculs rénaux. Ces calculs rénaux sont dus à la déshydrations et à la teneur en sel de l'eau distribuée à Gaza. C'est toute une génération de jeunes palestiniens qui est menacée. Plusieurs plans d'assainissement ont été imaginés par l'autorité palestinienne. À chaque fois, leur mise en ouvre bute sur le conflit avec Israël. La solution passe pourtant par la construction de nouvelles infrastructures. Il y a un projet qui devrait être financé par l'une des plus grandes ONG américaines. Il consiste à installer des tuyaux pour approvisionner Gaza. L'eau viendrait d'une usine de dessalement construite ici, dans la bande de Gaza. Cette usine de désalinisation dont rêvent les palestiniens existe ; mais en Israël, à Ashkelon, à quelques kilomètres au nord de la bande de Gaza. Elle est capable de fournir 100 millions de M3 d'eau potable par an. L'eau que consomme un Israélien sur sept vient de cette usine. Même si cette technologie est très gourmande en énergie - chaque année 75 millions de litres de pétrole sont consommés ici - elle reste la seule solution envisagée pour sauver Gaza. Un peu de l'eau d'Ashkelon, environ 5 millions de m3, part chaque année vers Gaza à titre humanitaire. C'est très insuffisant car les besoins réels sont dix fois plus élevés. Même avec la reprise de l'aide internationale, il faudrait plus d'un milliard d'euros pour résoudre le problème de l'eau potable dans cette petite partie du monde...

Wadi Fukin

Sur la planète 1 personne sur 5 n'a pas accès à une eau saine. En France les 2/3 des rivières et des nappes phréatiques sont polluées. Mais nous on a la chance d'avoir les moyens de la rendre potable.

Wadi Fukin en Cisjordanie a été créé il y a trois cents ans par deux familles qui se sont entendues pour partager l'eau et les terres. Trois cents ans après, il y a 1 200 habitants et ils continuent à s'entendre pour se partager l'eau. Ce système a très bien fonctionné pendant trois siècles. Aujourd'hui, ce village palestinien est menacé par le développement d'une colonie israélienne qui l'encercle. Les immeubles, les routes goudronnées empêchent l'infiltration des eaux et l'alimentation des sources. Mais il y a pire : ces nouveaux arrivants déversent dans cette vallée cultivée une grande partie de leurs eaux usées.
Cette colonie recouvre la petite surface de réapprovisionnement des sources par des routes, des parkings et des bâtiments qui empêchent les eaux de pluie d'atteindre les sources. Lio Assaf, hydrologue Israélien, se sent en devoir d'aider les palestiniens dans leur combat. "Nous sommes avant tout des êtres humains et nous avons donc le devoir de nous préoccuper des autres. D'autant qu'il n'est pas juste que certains n'aient aucun pouvoir sur leur avenir alors que nous vivons tous sur les mêmes terres. Je suis convaincu que ce n'est qu'en allant l'un vers l'autre que nous pourrons peser sur nos dirigeants, changer notre destin." Un simple conflit de voisinage ? On pourrait le penser. Imaginez que ce problème se répète à une autre échelle, qu'il oppose non des villages mais des pays... Et vous trouvez réunis les ingrédients d'une possible guerre de l'eau. Et pourtant, si on le veut, on peut éviter le pire. Abou Mazen, chef de la communauté et respectable fermier du village de Wadi Fukin, est un ami de Lior Assaf. Il explique qu'il manque de l'eau, à cause d'un problème clair : les colons qui les entourent ont fait exploser les montagnes pour y bâtir leurs habitations. Et c'est pour cela que 2 des 3 sources se sont taries...
"Pour ce qui est de faire du commerce avec les colons, nous ne leur avons jamais rien vendu, nous n'avons d'ailleurs jamais eu aucun contact avec eux, c'est bien simple nous ne les voyons jamais." Et pourtant la solution parait simple : si les colons Israéliens achetaient les fruits et légumes de leur voisins palestiniens, il en serait fini de la pollution. Comme souvent, ici aussi, on ne partage pas assez. Partager l'eau c'est apprendre à vivre ensemble.

Les Chiffre de l'Eau

1 milliard d'hommes et de femmes n'ont pas accès à l'eau potable. Chaque être humain a besoin de 30 à 50 litres pour boire, cuire ses aliments ou se laver. Or près d'un cinquième de l'humanité n'a pas accès à l'eau potable. Source : ONU

Seulement 0,3% de l'eau douce est disponible pour l'homme. Il s'agit de l'eau douce présente en surface, celle qu'on trouve dans les lacs, les réservoirs (lacs artificiels) et les rivières, et qui est renouvelable. À peut y ajouter, dans une certaine mesure, une partie des eaux souterraines. Mais la part renouvelable des nappes phréatiques se retrouve souvent dans l'eau des sources. Source : PNUE (Programme des Nations-Unies pour l'Environnement).

50 villes de plus de 6 millions d'habitants manquent d'eau. 6 millions de personnes meurent chaque année du fait de la mauvaise qualité de l'eau. Ce chiffre englobe l'ensemble des maladies liées à l'eau ou à la pollution de l'eau. Il inclut donc aussi la mortalité liée à la malaria, à la dengue ou à la fièvre jaune, l'insecte vecteur de ces maladies ayant besoin d'eau pour se reproduire. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estime que deux à trois millions de morts, souvent des enfants, sont imputables annuellement aux seules maladies diarrhéiques. Source : OMS

Les Français achètent 6 milliards de bouteilles d'eau par an. Le niveau de la mer morte baisse d'1 mètre par an. 41 % des terres de la planète sont des déserts ou des quasi-déserts. Le chiffre est de 20 % pour les seuls déserts, là où les pluies sont inférieures à 250 millimètres par an. Les régions semi-arides reçoivent entre 250 et 500 millimètres d'eau par an. On pense évidemment au Sahara, le plus vaste du monde mais les déserts sont présents sur presque tous les continents. On trouve même des régions semi-arides en Europe (en Espagne et en Ukraine). 2006 a été déclarée par les Nations-Unies "année internationale des déserts et de la désertification". Source : UNESCO

600 millions d'hectares sont en voie de désertification. 800 millions de personnes souffrent de la faim. 70% de l'eau douce utilisée sert à l'agriculture. Dans de nombreux pays en développement, ce chiffre atteint 85 à 95 pour cent. Au Pakistan, 80 pour cent de la nourriture est produite sur des terres irriguées, en Chine 70 pour cent, en Inde et en Indonésie plus de 50 pour cent. Source : FAO

Indirectement, 1 Français consomme chaque jour 4000 litres d'eau pour se nourrir. 1 personne sur 5 n'a pas accès à une eau saine. En France les 2/3 des rivières et nappes phréatiques sont polluées.

Arthus Bertrand - VU du CIEL > Janvier > 2008
 

   
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