La Pompéi des Plantes

Préservée intacte sous une pluie de cendres, une forêt immémoriale vient d'être mise au jour en Mongolie. Une découverte riche de surprises. Plongée dans les nervures du temps.

Ses découvreurs le qualifient de "Pompéi végétale". Les exceptionnelles conditions de fossilisation qui ont donné naissance au site de Wuda, dans le nord de la Mongolie, sont en effet exactement les mêmes que celles générées par le Vésuve en l'an 79 de notre ère. A savoir une interminable pluie de cendres brûlantes et denses éjectées par un volcan, qui dévasta tout sur son passage, ensevelissant la totalité du paysage sous un linceul de poussière. Si Pompéi bouleverse encore les visiteurs par ses vestiges humains, Wuda, lui, frappe par son extrême ancienneté : d'après sa position par rapport à des couches géologiques connues, il date de 300 millions d'années - 298 exactement. Soit le début du Permien, une période qui précède non seulement l'apparition des dinosaures, mais même celle des plantes à fleurs.

Pour que ce trésor nous parvienne intact, il aura fallu trois coups de chance successifs.
- Primo, la cendre volcanique compactée (dite tuf), qui constitue l'écrin de ces végétaux, fut rapidement recouverte par des couches géologiques la protégeant de l'érosion.
- Secundo, ces couches se sont transformées en charbon. Grâce à quoi, une intense activité minière se poursuit depuis près d'un siècle dans la région.
- Enfin, troisième coup de chance : la veine de charbon située juste au-dessus du tuf a pris feu, forçant l'exploitant de la mine à la faire décaper... et dévoilant soudain l'exceptionnel herbier fossile.

UN VÉRITABLE ALBUM PHOTO

Devant ce trésor qui vient d'être exhumé du fond des âges, les paléontologues ont d'abord entrepris de le subdiviser en petits carrés de 10 cm de côtés, qu'ils ont minutieusement analysés. Car le gisement mongol a ceci de rarissime que pratiquement chaque plante a été conservée à son emplacement, alors que les reconstitutions, ailleurs, sont le plus souvent issues de déductions et d'approximations incertaines. De plus, le site est exceptionnellement étendu, puisqu'il totalise plus de 1000 m², une surface considérée comme suflisante par les spécialistes pour véritablement définir un écosystème.
Plusieurs dizaines d'espèces de plantes, réparties en six familles, ont d'ores et déjà été différenciées. Au final, c'est une quasi-photographie du paysage d'il y a 300 millions d'années qu'offre ce site : de la poussière agglomérée surgit un paysage marécageux structuré en une couche herbacée au sol, une canopée de fougères arborescentes qui monte à une quinzaine de mètres, cette dernière étant percée de hauts arbres isolés pouvant dépasser 25 m. Un écosystème extraordinairement préservé, plus proche de celui des débuts de la vie terrestre que de notre époque, qui va constituer un précieux matériau d'étude - en particulier pour comprendre l'évolution de la biodiversité.



Y.S. - SCIENCE & VIE > Mai > 2012
 

   
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