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Le Son du Stradivarius

Insecticide et Pâte de Fruit à l'Origine du Son

Un morceau de bois, c'est ainsi que commencent tous les violons, y compris ceux d'Antonio Stradivari. Professeur de biochimie à l'université A&M du Texas, Joseph Nagyvary a consacré plus de 30 ans à étudier l'utilisation de ce matériau par le célèbre luthier italien.

Avec, à l'origine, une interrogation : pourquoi la plupart des objets en bois issus d'Italie du Nord sont-ils rongés par les parasites... sauf ceux sortis des ateliers de Crémone ? Nagyvary s'est plongé dans les archives historiques et a ainsi découvert que, contrairement aux autres, les luthiers de la ville utilisaient des insecticides et de la poudre de cristal, à base de quartz notamment. Celle-ci sature le matériau, le rendant trop dur à entamer pour les vers. Il apprend aussi que ces luthiers, dont Stradivari, se servaient de pâte de fruit et de résidus d'écorce d'arbres fruitiers pour préserver le bois de la moisissure car l'Italie du Nord est une région humide, sans compter que l'épicéa arrivait par flottage dans la lagune de Venise. Ces matières forment en effet un glacis rigide en séchant, empêchant l'humidité de pénétrer dans les fibres.
À l'aide de la résonance magnétique nucléaire et de la stéréoscopie infrarouge appliquée à des éclats de bois, le professeur Nagyvary a confirmé sa théorie en 2006 : les molécules de bois des stradivarius et des guarneri qu'il a pu tester ont bien subi une altération due à un traitement chimique. Trois ans plus tard, il a également révélé l'emploi de produits à base de chrome, de sels de fer, de fluorure et confirmé l'usage, entre autre, de borax déjà attesté par des sources historiques. Pour le biochimiste, qui a cessé ses recherches après les avoir lui-même financées, le secret du son des "strads" est là : puissant grâce au bois raffermi et solidifié, brillant mais non criard grâce à sa pellicule antimoisissure qui "casse" le son et l'adoucit. Ce dont le luthier, mort en 1737, n'avait peut-être pas conscience lui-même.

D.L. - SCIENCE ET AVENIR N°780 > Février > 2012

Du Vernis dont on fait un Stradivarius

Une équipe pluridisciplinaire et internationale - mêlant des chimistes, des physiciens et un luthier - vient de lever un coin du voile sur le secret de l'étonnante sonorité des célèbres instruments de l'Italien Antonio Stradivari dit Stradivarius (1644-1737), fabriqués il y a trois siècles.

Examen du vernis d'un Stradivarius au musée de la Musique, à Paris (->).

Elle a déterminé la composition du vernis protégeant les violons. Il comporte deux couches, chacune à base d'huile. La seconde contient en outre de la résine de pin, pour rigidifier le mélange, et, plus surprenant, des pigments. Sur les 5 instruments testés (quatre violons et une tête de viole d'amour de la collection du musée de la Musique à Paris), trois types de pigments rouges ont été identifiés : de l'oxyde de fer, du sulfate de mercure et de la poudre tirée de la cochenille. Bien que transparent, le vernis ajoute donc une coloration esthétique au bois.

Certains de ces résultats contredisent des hypothèses anciennes sur la composition de la préparation. Les chercheurs n'ont ainsi pas trouvé de roche comme la pouzzolane, censée rigidifier le bois. Ni de substances protéiques comme de l'albumine ou de la gélatine collante. À défaut de comprendre si le vernis joue un rôle dans la sonorité de l'instrument, cette découverte permettra aux conservateurs de mieux protéger les instruments anciens.

D.L. - SCIENCES ET AVENIR > Février > 2010

 

   
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