Index SCIENCES -> MÉDECINE -> CANCÉROLOGIE 
   
 
L'Électricité peut Détruire les Cellules Cancéreuses

Détruire des cellules tumorales par l'électricité tout en préservant les tissus environnants, c'est possible, et c'est ce qu'on appelle "l'électroporation irréversible".

Il s'agit d'appliquer de très courtes décharges électriques successivement à différents endroits de la tumeur grâce à des électrodes. La structure de la paroi des cellules se désorganise. Conséquence, des trous se forment par lesquels les cellules se vident de leur contenu, puis meurent.

Depuis les années 60, l'électroporation est utilisée régulièrement pour faire pénétrer de l'ADN dans des bactéries. Mais, dans ce cas, les bactéries survivent car les trous sont transitoires. L'équipe de Rafael Davalos (université Virginia Tech), associée à Lluis Mir (Institut Gustave-Roussy de Villejuif), a eu l'idée de détourner la technique en augmentant l'intensité du traitement électrique. Ainsi, les trous pratiqués dans la membrane ne se referment plus.

Les avantages ? Le traitement dure une minute et son efficacité peut être suivie en temps réel par tomographie. Les premiers essais sur des tumeurs de prostate auront lieu début 2008.

E.N. - SCIENCE & VIE > Septembre > 2007


L'Effet Priore

A-t-on retrouvé l'onde qui soigne le cancer ?

Dans les années 70, l'affaire fit grand bruit : Antoine Priore, un simple électronicien, expérimentait chez lui une onde mystérieuse qui guérissait le cancer ! Son secret vient d'être redécouvert par un médecin français. La légende n'a pas dit son dernier mot...

Qui se souvient de la machine de Priore ? Tel était le titre d'un encadré publié dans le numéro de septembre 2001 de S&V (n°1008), qui rappelait comment un dépanneur radio, d'origine italienne, domicilié à Floirac, prés de Bordeaux, était parvenu dans les années 50 à mettre au point une machine d'où sortait une onde capable de guérir le cancer chez l'animal et, semble-t-il, chez l'homme. L'encadré se terminait ainsi : "Cette merveilleuse histoire eut malheureusement une triste fin. Antoine Priore, qui avait caché le mode de fabrication de son onde dans une boîte noire, logée au sein de sa machine, afin d'en conserver l'exclusivité, décéda brutalement, emportant son secret dans la tombe. Nous n'en saurons pas plus."
C'était un peu vite dit. À peine Science & Vie sortait-il en kiosque qu'un étonnant coup de fil nous apprenait que, depuis la mort d'Antoine Priore, en 1983, les recherches n'avaient jamais cessé de se poursuivre. Par une étrange coïncidence, elles venaient même de connaître un fantastique rebondissement : l'onde Priore avait non seulement été retrouvée, mais elle avait permis de traiter avec succès des souris cancéreuses ! La bonne nouvelle émanait de l'Association française des médecins pour la recherche sur l'électrothérapie des cancers (Artec), un organisme privé dont le siège est à Cestas (Gironde), au cœur de la forêt landaise. Selon son directeur, le Dr Bernard Murzeau, médecin gériatre à Bordeaux, les expériences qu'il a menées montrent que l'effet du rayonnement Priore est bel et bien une réalité. S'il a raison, c'est une controverse qui dure depuis les années 60 qui trouverait alors son épilogue. Et une énigme aux confins de la légende qui cesserait enfin de trotter dans un coin de la tête des cancérologues (Guérir le cancer). Une légende ? Elle naîtrait à moins ! Un simple électronicien réussissant dans sa cuisine là où de grands chercheurs échouent ; une onde qui guérit le cancer, mais dont le secret n'est jamais dévoilé ; une machine invraisemblable qui rend l'âme après avoir donné d'étonnants résultats ; la presse qui s'empare de l'affaire avec des gros titres, tandis que d'éminents chercheurs travaillent de manière occulte à percer l'énigme... Trente ans après la mort d'Antoine Priore, on ne s'étonne pas que son fantôme aiguise encore les passions.

GUÉRIR LE CANCER

De la plus ancienne à la plus récente, les huit approches thérapeutiques du cancer.

- La chirurgie a pour but d'enlever la totalité de la tumeur et éventuellement, les ganglions lymphtiques et les métastases.
- La radiothérapie vise à éradiquer la tumeur via divers rayonnements : ionisants, radicactils.
- La chimiothérapie attaque la tumeur grâce à différents types de molécules cytotoxiques.
- L'hormonothérapie, utilisée dans les cancers du sein et de la prostate, vise à empêcher la prolifération des cellules cancéreuses par des anti-oestrogènes ou des anti-androgènes.
- L'immunothérapie intègre trois approches. L'une stimule, par injection de facteurs de croîssance, la synthèse des anticorps dirigés cantre la tumeur ; la seconde fixe sur les anticorps des poisons toxiques pour la tumeur quant à la troisième, dans laquelle peut s'insérer celle de Priore, elle entend démasquer les antigènes des cellules cancéreuses pour faciliter la réaction antigène-anticorps.
- La greffe de moelle osseuse vise à remplacer les cellules malades par d'autres saines, produites par la moelle greffée.
- L'anti-angiogenèse consiste à détruire les vaisseaux sanguins qui se forment dans les tumeurs et qui assurent le dévelopement et l'entretien de celles-ci.
- Le génie génétique a pour but de tuer les cellules cancéreuses en modifiant leur génome, soit par addition d'un gène étranger, soit par empèchement de l'expression de certains gènes.

UN EFFET INCONTESTABLE

Il faut dire que l'affaire Priore, le Dr Murzeau la connaît bien, lui qui fut l'élève du Pr Raymond Pautrizel, professeur réputé à la Faculté de médecine de Bordeaux qui, entre autres, ouvrit la voie à l'immunologie parasitaire, dont il dirigea la première unité à l'Inserm. Or, Pautrizel fut l'un des plus ardents défenseurs d'Antoine Priore et de ses mystérieuses machines après avoir constaté lui-même les stupéfiants résultats qu'elles donnaient dans le traitement de souris cancéreuses. Il ne fut pas le seul, puisque de très hautes autorités scientifiques cautionnèrent à l'époque les études du génial bricoleur de Floirac. En particulier le Pr André Lwoff, prix Nobel de médecine, le Pr Robert Courrier, secrétaire perpétuel de l'Académie des sciences, Marcel-René Rivière, de l'institut de recherches sur le cancer de Villejuif... Pour eux, les résultats étaient patents, même si le fonctionnement de la machine demeurait un mystère. D'ailleurs, plusieurs communications à l'Académie des sciences feront état de l'avancement des travaux dans le petit pavillon de la banlieue bordelaise. Et pourtant, les recherches d'Antoine Priore ne furent jamais reconnues officiellement. Cela à cause d'un vice de forme. Tout chercheur est, en effet, tenu d'indiquer la méthode qui lui a permis d'arriver à ses résultats ; or, Antoine Priore, qui craignait de se voir voler sa découverte a, jusqu'à sa mort, refusé de livrer son "truc", comme il l'appelait lui-même.

UN DÉFI POUR SCIENTIFIQUES

Il n'en fallait pas davantage pour que le récalcitrant inventeur passe aux yeux de beaucoup pour un charlatan, surtout à une époque où ne pas donner de faux espoirs aux malades du cancer était une priorité. Pour d'autres, il devint rapidement un martyr de l'institution, le génial David en butte aux Goliath de la cancérologie officielle. Une chose est sûre : sans son extravagante obstination à taire son secret, l'Italien de Floirac serait aujourd'hui une gloire nationale... ou l'onde Priore un frisson girondin oublié depuis longtemps.
Quoi qu'il en soit, il aura fallu attendre plus de cinquante ans, puisque Priore situe ses premiers résultats vers 1948, pour que le secret soit peut-être percé. Ce ne fut pas faute de mobiliser kyrielle de chercheurs après la mort de l'inventeur, en 1983. La première équipe sur la brèche fut, en 1985, celle du Piom (Pôle d'études des interactions ondes-matières), une structure créée à l'initiative de la région Aquitaine au sein de l'Ecole nationale supérieure de chimie et physique de l'université Bordeaux 1. Outre des universitaires et des médecins, elle regroupe des chercheurs du CNRS, du CEA, de l'Aérospatiale, etc., et s'occupe aujourd'hui, sous la houlette du Pr Bernard Veyret, directeur de recherche au CNRS, des éventuels dangers causés par les téléphones portables, les antennes relais, les lignes à haute tension. D'effet Priore, il n'est officiellement plus question. Que s'est-il donc passé ? En fait, l'équipe du Piom, forte d'une subvention de la région Aquitaine de vingt millions de francs, construisit dans ses sous-sols une machine qui se voulait évidemment "supérieure" à celle que Priore avait bricolée sur un coin de table de sa salle à manger, avec du matériel de récupération. Mais malgré leurs efforts, nulle onde guérisseuse n'apparut à l'horizon.
Et les tentatives d'être bientôt délaissées. Officiellement. Car en secret, certains chercheurs du Piom s'associèrent pour continuer leurs travaux sur le rayonnement Priore. En collaboration avec des scientifiques extérieurs, anciens universitaires pour la plupart, ils consacrent encore aujourd'hui leurs heures perdues à l'infernale énigme. "C'est notre hobby", avoue Jacques Joussot-Dubien, professeur émérite de chimie à la faculté des sciences de Bordeaux, qui fut de tous les combats de Priore. Occulte, cette structure, n'a pas de nom (peut-être un nom de code...).

LE SECRET DE LA SIMPLICITÉ ?

Pourquoi tant de mystères ? Quête de la vérité, ou chercheurs vexés qu'un simple bricoleur leur dame le pion ? Un peu des deux sans doute. "Nous sommes assis sur une bombe. Cette affaire Priore rend tous les gens fous. Comme les chercheurs jouent leur réputation, ils ne cessent de s'entre-déchirer. Dès que l'un d'eux croit avoir trouvé quelque chose, il tire aussitôt la couverture à lui", fulmine le Pr Pierre-Alain Bernard, professeur de physique à l'université Bordeaux 1. Reste que cette structure, souterraine ou pas, n'a toujours rien trouvé...
Pour Bernard Murzeau, les raisons de cet échec sont inhérentes à la démarche du Piom : "Comparés aux faibles moyens dont disposait Priore pour ses premiers appareils, ceux du Piom pouvaient donner une impression de facilité à cette équipe très compétente. Trop compétente ! En voulant faire mieux que Priore, elle s'est engagée sur des voies qui n'étaient pas celles de l'inventeur. "En clair, il s'agirait d'une erreur de méthodologie : quoi que Priore ait pu laisser croire aux observateurs venus lui rendre visite, la solution ne résiderait pas dans un savant dosage d'ondes susceptible d'être reproduit à partir des mesures effectuées du vivant de Priore. L'astucieux bricoleur s'ingéniait en effet à brouiller les cartes, toujours pour que personne ne perce son secret. À ses proches, le bonhomme confiait seulement : "C'est simple, c'est tellement simple que je ne comprends pas pourquoi personne n'a jamais trouvé quelque chose d'aussi simple. Ils ne trouveront jamais tellement c'est simple. Mais si je prononce quelques mots de trop, n'importe quel électronicien pourra faire comme moi, et tout mon travail sera perdu." Cette simplicité, Bernard Murzeau dit l'avoir retrouvée. Reprenant tout à zéro, sa démarche a consisté à se mettre dans la peau d'un dépanneur radio, et non pas dans celle d'un chercheur diplômé. En 1985, soit peu après la mort d'Antoine Priore, il entame ainsi une longue enquête. Deux ans durant, il interroge témoins, fournisseurs, techniciens et ouvriers qui, de près ou de loin, ont approché l'inventeur. Sans oublier les chercheurs du Piom, où il compte beaucoup d'amis. Mais sa meilleure source d'information fut Paul Ribeau, ancien responsable du développement chez Leroy-Somer, une société internationale spécialisée dans les moteurs électriques.

RÉMISSIONS SPECTACULAIRES

De fait, la célèbre entreprise d'Angoulème participa au financement de la dernière machine que Priore fit construire, en 1975, dans son pavillon de Floirac. Objectif : expérimenter dans de bonnes conditions le fameux rayonnement sur des cancers humains, une opération à laquelle les précédents appareils se prêtaient mal. Conçus pour les rats et les souris, ceux-ci souffraient en effet d'un manque de puissance et, faute d'un rayon d'action suffisant, le corps d'un homme ne pouvait être exposé que très partiellement au cocktail d'ondes et de champs magnétiques qui sortait de la machine. Des limitations qui n'empêchaient pas l'efficacité d'être au rendez-vous : des rémissions spectaculaires de cancers du poumon en phase terminale furent obtenues par le Pr Gilbert Courty, à l'époque chef du service de pneumologie à l'hôpital Xavier Arnozan de Bordeaux.
Ce sont ces résultats enthousiasmants qui vont décider de la construction d'un nouveau prototype. Restait à trouver les financements. Outre Leroy-Somer, commercialement intéressée par l'invention, Priore a une carte dans sa manche : son passé de résistant et son implantation en Gironde lui valent la bienveillance de Jacques Chaban-Delmas, le maire de Bordeaux qui, à l'époque, est encore Premier ministre. Peu importe que l'on ignore le principe de la machine, la promesse de résultats mirobolants emporte le morceau. L'Etat entre donc dans l'affaire, via les services de recherches des armées (DGRST), et le tour de table est bouclé avec, à la clé, un budget de... 3,5 millions de francs. Il faut dire que la machine telle que l'a dessinée Priore est un monstre. Haute de 15 mètres, elle nécessite d'éventrer le toit du pavillon de Floirac, tandis que le jardin attenant est sacrifié pour y installer un puissant générateur d'électricité. Seul un palmier sera épargné. Il est toujours là. Enfin, une immense enceinte métallique isole électriquement toutes les installations. "Ce fut notre danseuse", dit, dans un sourire, Paul Ribeau. Le 21 novembre 1972, la première pierre du très officiel Laboratoire de recherches scientifiques sur les effets biologiques du rayonnement Priore est posée en grandes pompes, en présence de Jacques Chaban-Delmas. Une plaque en marbre scellée sur l'un des murs du petit pavilllon commémore l'événement.

L'appareil est mis en route en février 1975. Pour rendre l'âme une semaine plus tard ! Impatient d'obtenir des résultats, Antoine Priore a trop poussé la machine et l'émetteur principal a sauté, entraînant un gigantesque flash dans la lampe à plasma. Les dégâts sont estimés à une dizaine de millions de francs et une année est jugée nécessaire pour remettre la machine en état. Fin de l'histoire ? Pas tout à fait. Car, en une semaine, la machine a démontré la formidable efficacité du rayonnement Priore. Sur la quarantaine d'expériences menées sur 280 souris infectées par le trypanosome, le parasite à l'origine de la maladie du sommeil, le taux de réussite affiche... 100 %. Pourquoi le trypanosome ? Parce que cette spécialité de Pautrizel était moins sujette à polémique que le cancer... D'ailleurs, les résultats feront l'objet d'une communication à l'Académie des sciences, présentée le 10 mars 1975 sous le titre : "Stimulation des défenses de la souris trypanosomée par l'action d'un rayonnement associant champ magnétique et ondes électromagnétiques". Les choses qui avaient si bien commencé n'iront pourtant pas plus loin. C'est que l'époque a changé. Chaban Delmas n'est plus à Matignon et, surtout, la crise pétrolière de 1974 change la donne. Leroy-Somer refuse ainsi de débourser un sou pour réparer la machine, à moins que Priore ne lui révèle son secret. Celui-ci refuse, fidèle à lui-même. Quant aux autres firmes sollicitées, toutes reculent, jugeant trop risqué de réparer une machine au fonctionnement aussi aléatoire. Si près du but, l'inventeur de Floirac voit son rêve s'éloigner. Il ne le rattrapera pas. Cinq ans plus tard, il est victime d'une crise d'hémiplégie, puis meurt subitement en 1983.
Depuis ? La machine repose toujours à Floirac, dans sa gigantesque gangue métallique. C'est dans ce monstre endormi, qui fait à la fois office d'appartement et de cage de Faraday, que vit aujourd'hui, recluse, la veuve de l'inventeur. Nous avons sonné à sa porte. Après cinq minutes d'attente, le volet du premier étage s'est entrebâillé. "Je ne reçois personne", lança-t-elle, les cheveux en bataille, avant de s'effacer. Par l'un de ses fils nous sûmes que la famille s'était complètement désintéressée de l'affaire : "Mon père s'est battu pendant trente ans..." Nous ne saurons pas la suite. D'une voix étouffée, il raccrocha. Une chose est sûre : l'inventeur n'a laissé ni testament ni codicille dévoilant le secret de sa découverte. Quand à la machine, elle est "irréparable, nous a indiqué Paul Ribeau. Les gens qui auraient pu la remettre en marche sont morts ou ont perdu le savoir-faire". Et le brevet n'est d'aucune utilité, car il donne seulement les grandes lignes de la machine.
"Si la découverte est authentique, elle réapparaîtra bien dans les années à venir", déclarait à l'époque le Pr Jean-Pierre Bader, une sommité politique et médicale, membre de nombreuses commissions scientifiques. Les récents travaux du Dr Murzeau pourraient bien lui donner aujourd'hui raison. Investissant sa fortune personnelle (un million de francs), celui-ci est en effet parvenu à réaliser une machine qui s'apparente à un modèle de Priore. Et en moins de deux ans, il obtient de premiers résultats : à force de subtils réglages, son appareil génère une onde qui accélère la germination de graines et stimule le développement du poussin. Un avatar de l'onde Priore ? Murzeau pressent en tout cas qu'il est sur la bonne voie. Avant d'en être convaincu, après une expérience menée sur 17 souris atteintes à la fois d'un réticulo-sarcome (tumeur des tissus mous) et d'une leucémie. Classiquement, les animaux ont été divisés en deux lots : l'un de neuf souris destinées à servir de témoin, l'autre de huit souris, soumises au rayonnement de la machine. Au bout de deux mois, les dix-sept souris sont sacrifiées. Résultat : dans le lot témoin, deux souris sur neuf sont encore en vie, soit 22 % ; dans le lot traité, il reste sept suivivantes sur huit, soit 82 %. Des pourcentages comparables à ceux que Priore obtenaient de son vivant...

CONFIRMATION D'UN GÉNIE ?

Pour l'heure, les résultats de l'expérience n'ont pas été publiés. Prudent, le Dr Murzeau veut qu'elles soient d'abord confirmées... Ce qui ne l'empêche pas d'être sûr de son fait. "Il ne fait aucun doute que je viens de redécouvrir l'effet Priore", jubile-t-il. Un optimisme que tempère William Ellison, directeur de recherche au CNRS et membre du Piom : "J'admire le Dr Murzeau, mais il faut savoir raison garder. D'autres expériences seront nécessaires pour juger de l'efficacité de l'onde qu'il a trouvée. Si c'était le cas, le vice de forme que l'on reprochait, à juste titre, à Priore, tomberait de lui-même. Preuve serait alors faite que le bricoleur de Floirac était un génie. Et pas seulement du bricolage : un génie tout court." Entre erreur scientifique et vérité scientifique, ce n'est qu'une question de date, affirmait Marcel-René Rivière. On saura bientôt si l'effet Priore vérifie cette assertion. Auquel cas, la légende de l'onde mystérieuse fera encore des vagues.

L'HYPOTHÉSE DES ULTRASONS

Le rôle de la gigantesque ampoule à plasma pourrait éclairer d'un nouveau jour le mystère des fameuses machines Priore. De quoi relancer le débat. Tous les experts que nous avons retrouvés et rencontrés sont formels : il sortait "quelque chose" de la machine de Priore, et ce "quelque chose" réduisait ou guérissait les tumeurs. Mais nul ne veut s'exprimer sur la nature de ce qui fut vite baptisé "onde Priore". Au mieux, on nous répond que des études approfondies sont en cours. Sur quelles bases ces recherches se fondent-elles, puisque Antoine Priore a emporté son secret avec lui ? En fait, l'essentiel des données techniques dont on dispose sur son rayonnement se trouve rassemblé dans un dossier de mesure des radiations émises par le prototype P2 de Priore. Deux ingénieurs du CNRS, André-Jean Berteaud et André-Marie Bottereau, eurent pour mission d'analyser le rayonnement Priore. Ils établirent un important rapport en juin 1971 (référence CNRS : 659-0438). À noter que les ingénieurs ne se sont toutefois intéressés qu'aux rayonnements électromagnétiques issus de la machine. Dans leur analyse extrémement complète et détaillée des fréquences détectées, on retrouve bien les champs magnétiques pulsés à très basses fréquences, les basses fréquences, les hautes fréquences et les hyper-fréquences. Pourtant, rien ou presque sur l'ampoule à plasma de l'appareil. Pour eux, elle se contentait d'émettre de la lumière.

UN SUPERBE FOUR À MICRO-ONDES

La monstrueuse M 600. Pesant 50 tonnes et haute de trois étages, la dernière machine que construisit Priore en 1975 mobilisait des émetteurs de plusieurs dizaines de kilowatts, une bobine délivrant un champ de 1000 gauss et une immense lampe à plasma... qui ne résista pas à une semaine d'utilisation. (->)

Ils réalisèrent néanmoins une analyse spectrographique de celle-ci pour trouver, ce qui n'a rien de surprenant, une répartition des raies correspondant au cumul des spectres du néon et du mercure. L'ampoule à plasma contenait effectivement du néon sous basse pression, ainsi qu'un bain de mercure qui assurait le contact de l'anode tournante de la machine. Des vapeurs de ce métal existaient donc au sein de l'ampoule. Dans leur esprit, le rayonnement Priore se résumait donc à une combinaison de radiofréquences et de champs magnétiques. Un cocktail certes subtil, mais parfaitement reproductible sans avoir recours à la coûteuse lampe à plasma. Pour vérifier leur théorie, les deux chercheurs proposèrent la réalisation d'un appareil simplifié, relativement peu onéreux puisque dépourvu d'ampoule à plasma, basé uniquement sur les radiofréquences et les champs magnétiques. Le projet fut accepté et l'appareil construit par le CNRS, dans le laboratoire parisien de Berteaud et Bottereau. Or, dès sa mise en service, la déception fut totale. Les chercheurs avaient réalisé un superbe four à micro-ondes. Les spécimens "traités" mouraient tous : la machine les cuisait... Le rayonnement Priore conserva donc tout son mystère.

LE PLASMA SERAIT-IL INDISPENSABLE ?

"En mesure physique, il faut savoir ce que l'on cherche à mesurer afin d'utiliser un détecteur adapté à cette mesure. Tout porte à penser que les ingénieurs du CNRS ont raté quelque chose parce qu'ils n'avaient pas envisagé sa présence et donc avaient omis d'employer un détecteur adapté", explique le Pr Bernard. Avec le recul des années, en réexaminant les dossiers et en analysant les indices que nous ont confiés le Dr Murzeau et le Pr Bernard, il n'est pas aberrant d'envisager que la composante essentielle du rayonnement Priore soit... des ultrasons.
Le plasma semble indispensable à l'obtention du rayonnement Priore. Or, que se passe-t-il lorsqu'on soumet un plasma à des champs électriques, magnétiques ou électromagnétiques ? Il entre en vibration avec une fréquence liée à celle des champs en jeu. Ce phénomène est bien connu des acousticiens. Des "tweeters" (haut-parleurs d'aiguës) à plasma existent depuis de longues années. Se pourrait-il que le plasma de l'ampoule de Priore ait lui aussi émis des ultrasons ? C'est probable. Cependant, en raison des ondes utiliséés, 17 MHz et 10, voire 20 GHZ, la fréquence des ultrasons ne pouvait être qu'extrêmement élevée. Qui plus est, les ultrasons doivent, avant d'atteindre les cellules traitées, traverser la paroi en verre de l'ampoule, l'air, la peau et, enfin, les tissus environnants. À de telles fréquences, chaque frontière engendre donc des pertes phénoménales, d'où la nécessité de créer à la source, ici dans le plasma, une énorme quantité d'ultrasons pour obtenir un effet décelable au niveau cellulaire. Ceci pourrait expliquer la frénésie de puissance de Priore.

DES TATOUAGES POUR SIGNES DISTINCTIFS

Mais comment ces ultrasons interviendraient-ils au niveau cellulaire ? Pour cela, il ne faut pas perdre de vue le champ magnétique intense que Priore associait à son ampoule. On sait, en effet, que lorsque l'on déplace un conducteur dans un champ magnétique, des tensions électriques apparaissent à ses bornes. C'est le principe de base de tous les alternateurs et autres dynamos. Il en est de même pour les cellules. Leurs vibrations, dues aux ultrasons, associées au champ magnétique créé par l'imposante bobine de la machine de Priore, provoqueraient une forte modification de leur potentiel électrique membranaire... ce qui serait le but recherché. Car il faut savoir que les cellules tumorales présentent sur leur membrane des antigènes (protéines), sorte de tatouage, qui les distingue des autres cellules. Ainsi sont-elles reconnues et détruites par le système immunitaire. Or, pour échapper à l'attaque du système immunitaire, les cellules cancéreuses disposent d'un stratagème, appelé phénomène de modulation, qui leur permet de dissimuler dans les replis de leur membrane leurs antigènes de surface", explique le Pr Wolf-Herman Fridman, immunologiste et cancérologue au Centre de recherches biomédicales des Cordeliers, à Paris. Et d'ajouter : "Un des traitements immunologiques consiste à faire réapparaître ces antigènes, avec de l'interféron, par exemple, pour que les cellules soient de nouveau une cible pour le système immunitaire."

LA MEMBRANE DÉPLISSÉE DÉVOILE LES ANTIGÈNES

Une hypothèse émise par le Dr Murzeau est que l'onde Priore aurait le même effet que l'interféron, mais sans ses effets secondaires et avec une plus grande efficacité. Elle déplisserait la membrane en modifiant ses charges électriques et découvrirait ainsi les antigènes des cellules cancéreuses, qui seraient alors détruites par le système immunitaire.
Enfin, ce mode de fonctionnement expliquerait également l'importance et la délicatesse des réglages de l'appareil.

COMME SE BRISE UNE COUPE DE CRISTAL...

Pour que les cellules entrent en vibration, il faut que la fréquence des ultrasons corresponde exactement à leur fréquence de résonance. Un phénoméne comparable à celui de la chanteuse qui brise une coupe en cristal en soutenant une note précise. Pour obtenir un résultat, il fallait donc que Priore recherche et fixe cette fréquenoe par tâtonnements en jouant sur ses réglages. De même, il serait parfaitement compréhensible que chaque fréquence ne s'adresse qu'à un seul type de cellule et, par voie de conséquence, qu'à une pathologie. De fait, les dimensions des cellules cancéreuses et celles des trypanosomes diffèrent et, donc, leur fréquenoe de résonance aussi. Ces hypothèses, car il ne s'agit encore que d'hypothèses, ne sont en tout cas pas aberrantes. Aucun de nos interlocuteurs ne les a démenties. "Il faut pourtant répertorier de manière très précise l'ensemble des réactions moléculaires et ioniques qui pourraient survenir au sein du plasma avant d'échafauder une théorie complète sur la composition et l'action exactes du rayonnement de Priore", précise le Pr Bernard. C'est aussi la seule solution pour que les expériences deviennent reproductibles et soient alors scientifiquement valides", ajoute-t-il.

Antoine Priore est né à Trieste (Italie) en 1912. Considéré par les scientifiques comme un autodidacte intégral, il possède en fait un petit bagage en électricité et en électronique, du niveau d'un bon CAP.
En 1950, il expérimente dans son pavillon de Floirac, près de Bordeaux, une première machine sur des denrées alimentaires, constatant leur exceptionnel état de conservation après traitement par un mélange d'ondes électromagnétiques. En 1960, ce sont des rats cancéreux qu'il soumet au rayonnement de son appareil. La croissance de la tumeur régresse, sans être toutefois complètement inhibée. Mais en 1965, le traitement sur des rats atteints de tumeur cancéreuse du système immunitaire et des tissus conjonctifs donnent des résultats spectaculaires. Ils valent à Priore le soutien du Pr Raymond Pautrizel, de la Faculté de médecine de Bordeaux, avec qui il collabore pour la réalisation, en 1975, de la super machine M-600... qui ne marchera qu'une semaine. Frappé cinq ans plus tard d'hémiplégie, Antoine Priore meurt en 1983, sans avoir révélé son secret. Pourquoi ? Quel était le secret de cette personnalité complexe ? Cherchait-il la gloire ou la fortune ? Pas la fortune en tout cas, puisqu'il n'a jamais eu un sou devant lui et qu'on ne peut l'accuser de quelconque détournement des crédits qu'il recevait de l'Etat : toute sa vie, il a accumulé les dettes pour subvenir aux besoins de sa famille (une épouse et trois enfants)... http://www.priore-cancer.com

SCIENCE & VIE > Décembre > 2001

 

   
 C.S. - Maréva Inc. © 2000 
 charlyjo@laposte.net