À Chaque Espèce ces Lignes de Vie

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À Chaque Espèce ces Lignes de Vie

Cela paraissait aller de soi : avec sa courbe de fertilité en cloche et une mortalité qui grimpe avec l'âqe, la vie avait un sens... unique. Mais en croisant les données démographiques d'une cinquantaine d'animaux et de végétaux, des biologistes ont mis en évidence 5 destins bien différents du nôtre ! Un nouveau regard sur la nature...

Saviez-vous que le rhododendron a le même destin que le bernard-l'ermite ? Que la jeunesse d'une marmotte ressemble à celle d'un crocodile, et sa vieillesse à celle d'un palmier ? Et que notre sort rappelle celui du poisson guppy, au fond de son aquarium ? Voici quelques-unes des déroutantes leçons qu'une équipe internationale de chercheurs a dévoilées en rassemblant et en uniformisant pour la première fois les données démographiques de 46 espèces animales et végétales. Car du pou au lion, en passant par le chêne ou le millepertuis, l'histoire de la vie peut s'esquisser à partir de 2 courbes : l'une révélant l'évolutiun de la fertilité en fonction de l'âge, l'autre retraçant l'évolution de la mortalité. Pour chaque être vivant, ces courbes racontent le temps de la reproduction et celui de la vieillesse. Et, une fois traitées mathématiquement de manière à être comparables entre elles, elles ne dessinent rien de moins que tous les destins du monde. Or, contre toute attente, le panorama qui surgit est tout à fait inédit !

LE SCHÉMA UNIQUE DÉPASSÉ : Jusqu'ici, un même schéma était censé valoir pour la plupart des espèces : une cloche centrée sur la période de jeunesse pour l'évolution de la fertilité, et une courbe montant de plus en plus vite pour la mortalité. Autrement dit, après un pic pendant la jeunesse, la capacité à se reproduire va en s'amenuisant ; tandis que la probabilité de mourrir augmente avec l'âge. Sauf que ce destin ne vaut pas pour toutes les espèces ! À regarder ces nouvelles lignes, le tableau des destinées possibles s'élargit considérablement, ouvrant notre regard sur un vivant beaucoup plus varié qu'attendu. Chez certains, la fertilité grimpe en fin de vie ou reste inchangée ; chez d'autres, le risque de mourir diminue avec le temps ou reste résolument le même, quel que soit l'âge...
Si ce foisonnement de destins dans l'arbre de la vie était passé jusqu'ici inaperçu, c'est que le cas particulier de notre espèce a tellement concentré les recherches qu'il a occulté ces innombrables autres histoires. Certes, quelques exceptions étaient célébres, comme l'hydre, ce microscopique polype d'eau douse qui ne vieillit pas et possède l'incroyable capacilé de se régénérer entièrement lorsqu'il est amputé ; ou les tortues géantes des Seychelles, qui vivent plus d'une centaine d'années, en pondant des oufs jusqu'à la fin de leurs jours.

DES THÉORIES CADUQUES : Aujourd'hui pourtant, c'est l'homme qui fait figure de cas particulier : "Le dogme d'une mortalité qui augmente au cours de la vie et d'une fertilité diminue apparaît seulement comme une trajectoire possible", observe Owen Jones, du centre Max-Planck pour la biodémographie du vieillissement à Odense, au Danemark, principal auteur de l'étude. Ce qui rend, du coup, caduques les théories actuelles sur le vieillissement, conçues pour expliquer ce cas particulier : "Sans les jeter définitivement, il faudra admettre qu'elles ne sont valables que pour une gamme particulière d'espèces", résume-t-il.
Une autre idée reçue est elle aussi battue en brèche : "On considérait que les espèces qui ont une vie courte subissent une sénescence rapide ; or, cette étude démontre qu'il n'y a pas de corrélation entre durée de vie et vieillissement", s'étonne Thomas Tully, de l'Institut d'écologie et des sciences de l'environnement de Paris. Ainsi, la mouche du vinaigre, qui ne vit que quelques semaines, se place entre le chimpanzé et le mouton dans le classement des espèces qui vieillissent le plus rapidement. Les spécialistes de l'évolution et du vieillissement doivent encore élargir ces recherches à d'autres règnes (bactéries, champignons) et expliquer les conditions environnementales justifiant des différences observées entre espèces similaires. Car ils savent maintenant que la vie n'a pas qu'un seul sens !

RECORDS : L'homme contemporain est l'espèce qui vieillit le plus rapidement (sénescence), avec une mortalité 22 fois plus forte en fin de vie qu'en moyenne. A l'opposé du palétuvier, pour qui la mortalité est 2,5 fois plus faible. Le millepertuis, lui, atteint le record de vigueur, en étant 12 fois plus fertile à la fin de sa vie qu'en moyenne.

F.G. - SCIENCE & VIE N°1158 > Mars > 2014
 

   
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