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Les Futures Supernovæ

Une Explosion se Prépare dans la Boussole

Bientôt une surpernova dans le voisinage du Soleil ? C'est possible !

Une équipe de l'université Villanova (États-Unis) estime que d'ici quelques millions d'années, la naine blanche du système binaire T Pyxidis (constellation de la Boussole) devrait atteindre la masse limite à partir de laquelle elle explosera.
En effet, elle engloutit chaque seconde 200.000 millions de tonnes de sa compagne, une étoile de type solaire. Parvenue à la masse limile, dite "de Chandrasekhar", elle s'effrondrera brusquement, menant à une colossale explosion thermonucléaire : une supernova de type Ia. Les chercheurs ont par ailleurs découvert que T Pyxidis est bien plus proche de nous que prévu : moins de 3.200 années-lumière. Lors de son explosion, elle libérera une grande quantité de rayons gamma qui devraient détruire la couche d'ozone qui protège la vie terrestre des rayons énergétiques en provenance de l'espace.

CIEL & ESPACE > Mars > 2010

Une Géante au Bord de l'Explosion

Attention, cet astre est peut-être sur le point d'exploser. Eta Carinae ou Êta de la Carène est l'une des étoiles les plus impressionnantes de la Voie lactée, 100 fois plus massive que notre Soleil et 4 millions de fois plus lumineuses.

Cette géante, qui possède un compagnon très proche d'elle, est instable. En 1843, elle avait déjà explosé, éjectant l'équivalent de deux à trois fois la masse solaire. Il en était résulté une vaste nébuleuse, baptisée l'Homoncule. Mais l'étoile centrale avait survécu et semblait s'être calmée... Jusqu'à ces derniers mois, comme l'ont constaté les astronomes en dépouillant les observations réalisées avec le télescope spatial Hubble. Depuis six mois, l'étoile - ou plutôt le couple d'étoiles - s'est mise à briller violemment jusqu'à atteindre la magnitude de 5,1. Ce regain d'activité annoncent-ils une prochaine explosion en supernova ?

S.R. - SCIENCES ET AVENIR > Janvier > 2010

Êta de la Carène a-t-elle Explosée ?

La plus grosse étoile de la Galaxie a illuminé l'espace de violentes éruptions. Arriver à comprendre ses brusques colères donnerait aux astrophysiciens les moyens de prédire sa fin prochaine. Car la désintégration d'Êta de la Carène en une gigantesque supernova s'annonce imminente.
L'éclat d'Êta de la Carène augmente progressivement (à d. ->). L'image la plus détaillée de l'étoile et de la nébuleuse Homunculus, qui l'entoure, prise avec le télescope Gemini Sud (à g. ->).

Fin 2009, les astronomes mettent subitement en alerte leurs plus puissants instruments. Parmi eux, les télescopes spatiaux Hubble et Spitzer. Dans la constellation australe de la Carène, une étoile a brusquement gagné en éclat. En seulement quelques semaines, sa luminosité a augmenté de moitié. Comparé à bien des étoiles variables, pas de quoi sonner le branle-bas de combat. Sauf que cette étoile, c'est Êta de la Carène, une exception dans notre galaxie. Cinq millions de fois plus lumineuse que le Soleil, elle est aussi probablement la plus massive de la Voie lactée. C'est surtout celle dont les astronomes attendent d'un instant à l'autre l'explosion spectaculaire en supernova.
Malgré son éloignement de 7.500 années-lumière, sa fin cataclysmique fera d'elle l'astre le plus brillant du ciel après le Soleil et la Lune. Son intense lumière sera visible même en plein jour, et ça, pendant des semaines. En raison de sa masse colossale et de son degré d'évolution, cela ne fait aucun doute, le feu d'artifice est imminent... au cours des 100.000 prochaines années. Un laps de temps qui peut sembler long mais qui, à l'échelle de l'évolution stellaire, ne représente qu'un instant. Si certaines étoiles, comme le Soleil, vivent plusieurs milliards d'années, les signes d'essoufflement d'Êta de la Carène sont observés alors qu'elle n'affiche que 3 millions d'années d'âge. Peut-être même le cataclysme a-t-il eu lieu, mais sa lumière, qui file à travers l'espace à 300.000 km/s, ne nous est pas encore parvenue.

UN DUO DE GÉANTES TRÈS SERRÉES
Pendant longtemps, Êta de la Carène a été considérée comme un astre unique, doté d'une masse incroyable voisine de 250 fois celle du Soleil
. Mais à la fin des années 1990, des mesures spectroscopiques ont permis d'établir qu'il s'agit en réalité d'un système binaire. Compte tenu de la masse énorme des deux composantes, les astrophysiciens s'attendaient également à ce que leurs vents de particules s'interpénêtrent et se traduisent par des émissions de rayons X lors des passages au périastre. Ce qui a été observé. Autre preuve du caractère binaire d'Êta Carinae ; la nébuleuse Homunculus, qui l'entoure, doit sa forme en sablier à l'accrétion de matière sur l'étoile secondaire, avec éjection de gaz le long de son axe polaire, lors du rapprochement de 1843. Les deux étoiles, trop serrées pour être discernées sur les photos prises par les ptus grands télescopes, accomplissent leur révolulion en 5,54 ans, soit 2.023 jours.

De fait, le moindre soubresaut de l'astre qui siège au cour d'une immense nébuleuse est épié. Celui de l'année dernière a suscité toutes les attentions... principalement parce qu'il était attendu ! Car Êta de la Carène est double. L'étoile principale est accompagnée d'un astre secondaire à l'orbite très elliptique (->) qui vient la frôler à seulement 250 millions de kilomètres tous les 5 ans et demi. C'est ce passage au plus près, prédit par les astronomes, qui a provoqué le sursaut de 2009. "Le même phénomène avait été observé en 2003", rappelle Eduardo Fernandez-Lajus (Institut d'astrophysique de La Plata, Argentine), qui suit depuis les variations de luminosité d'Êta de la Carène. Les rapprochements entre les deux astres ne sont pas toujours aussi calmes. L'un d'eux fut même tonitruant. En avril 1843 (<-), Êta de la Carène, qui scintillait alors d'une belle magnitude 2, s'est brusquement emballée, devenant presque l'étoile la plus brillante de la voûte nocturne. Seule Sirius la surpassait de peu. Au cours des quatre décennies suivantes, elle s'est progressivement faite plus discrète, devenant même invisible à l'oil nu. À nouveau, autour de 1890, l'astre a connu un beau sursaut d'éclat avant de faiblir. L'explication ? Début 2010, Noam Soker, de l'Institut de technologie d'Israël, à Haïfa, fin limier des énigmes stellaires, en propose une : chacune de ces éruptions aurait été déclenchée par un énorme transfert de masse entre les deux astres lors de leur rapprochement. Seulement, depuis 110 ans, et aprês vingt nouveaux passages au plus près (au périastre, disent les astronomes), aucune éruption majeure ne s'est produite. "En fait, deux conditions doivent être réunies pour déclencher une éruption majeure, explique Noam Soker. D'abord, l'étoile doit entrer dans une phase qui survient de manière sporadique. Ensuite, il faut que l'étoile secondaire soit très près. Elle arrache alors de la matière à l'astre principal et l'absorbe, ce qui libère d'énormes quantités d'énergie gravitationnelle". Avec un duo comme celui d'Êta Carinae, le phénomène ne peut que prendre une ampleur démesurée : l'astre principal ferait entre 150 et 200 fois la masse du Soleil, alors que le secondaire afficherait entre 70 et 90 masses solaires. Au cours de l'événement de 1843, quelque 6 masses solaires seraient passées de l'une à l'autre, et 2 à 7 fois plus aurait été dispersé dans l'espace.

LE CHOC DES VENTS STELLAIRES
Les deux étoiles du système d'Êta de la Carène sont des géantes. Elles émettent chacune un vent stellaire puissant
. Les deux flux de particules se rencontrent avec d'autant plus de violence que les astres sont proches, ce qui se traduit par l'émission de rayons X. Des observations depuis le sol et à l'aide du satellite X Chandra ont fourni des informations sur la géométrie et la dynamique de ces "frictions". Au Japon, Atsuo Okazaki, de l'université Hokkai-Gakuen, a réalisé une animation en 3D (->) montrant ces interactions. "Le vent de l'étoile secondaire creuse une cavité dans celui, plus dense mais moins rapide, de l'étoile primaire détaille-t-il. Cette simulation montre comment le vent de l'étoile secondaire crée une cavité dans celui de l'étoile principale. Ces interactions expliquent les variations de luminosité lors des rapprochements entre les deux astres.

NAISSANCE D'UNE NÉBULEUSE

Conséquence : depuis 1914, on observe autour du monstre stellaire une nébuleuse à 2 lobes, baptisée Homunculus, qui s'étend à la vitesse de 650 km/s. L'éruption de 1890 aurait, elle aussi, accentuée par un nouveau passage au périastre, mais d'une ampleur nettement moindre. Reste que personne ne connait l'origine des instabilités d'Êta de la Carène. "Cela pointe un problème plus profond de compréhension de la physique de cette étoile", déplore John Martin, de l'université de l'Illinois (États-Unis). Elle appartient en effet à une catégorie très rare : les variables bleues lumineuses (LBV en anglais). Nous n'en connaissons que cinquante dans tout l'Univers... et seulement quatre dans la Voie lactée. Extrêmement massives (entre 50 et 200 fois la masse du Soleil), elles ne vivent que brièvement et terminent leur existence par une phase d'instabilité aux sursauts imprévisibies. C'est l'une de ces sautes d'humeur qui a secoué Êta de la Carène en 1843.
Les informations récultées depuis auront au moins permis de faire la lumière sur un autre mystère : celui des supernovæ "imposteurs". Le 26 octobre 2002, les scientifiques pensaient avoir observé l'apparition d'une supernova dans la galaxie NGC2403, à 11 millions d'années-lumière. Mais quelques mois plus tard, l'étoile censée avoir explosé était toujours là ! Et, comme Êta de la Carène, il s'agissait d'une LBV... Selon Noam Soker et son collègue Amit Kashi, certaines de ces supernovæ "imposteurs" sont en réalilé des LBV en phase d'instabilité, dont une éruption est accentuée et prolongée par l'influence gravitationnelle d'un astre compagnon. Dans le cas d'Êta de la Carène, une chose est sûre : l'événement de 1843 ne se limitait pas à un phénomène de surface. La découverte par l'Américain Nathan Smith (université de Berkeley) en 2008 de filaments gazeux s'échappant à 6000 km/s confirme que l'explosion a commencé au plus profond de l'astre. Un élément de plus qui renvoie les astrophysiciens à leurs lacunes sur les LBV. Pour combler celles-ci, John Martin considère qu'il faut guetter les périodes pendant lesquelles les deux étoiles du système sont le plus éloignées, à environ 30 unités astronomiques l'une de l'autre. Les interactions gravitationnelles sont alors limitées et la luminosité enregistrée reflète mieux l'état de l'astre principal. Comment l'évaluer ? Grâce aux variations du vent de particules que la géante bleue émet en permanence. Comme pour le Soleil, cette matière arrachée à l'étoile par la pression de sa propre luminosité révèle ce qui se passe à sa surface... activité directement liée aux phénomènes ayant lieu en profondeur. Mais l'heure n'est pas encore aux prédictions. "Nous voyons des changements significatifs dans l'étoile quand l'astre secondaire est très loin, mais nous ne pouvons pas encore les expliquer", confie John Martin.
Malgré ces embarrassantes zones d'ombre, les astronomes savent maintenant à qui ils ont affaire. Êta de la Carène est un mastodonte en fin de vie et très capricieux... Sans aucun signe avant-coureur, elle peut à tout moment succomber à une instabilité d'une ampleur égale ou supérieure à celle observée en 1843. Avec le concours de sa compagne, pour peu que celle-ci soit placée au bon endroit et au bon moment, elle peut même faire croire qu'elle a explosé sans que ce soit forcément le cas. Mais elle peut tout aussi bien, sans prévenir le moins du monde, se désintégrer en supernova. En l'état actuel des connaissances, il reste bien peu de pistes pour prédire de tels événements. L'une d'elles consiste à rechercher un cycle dans la courbe de luminosité, établie depuis 1677, année de sa découverte par le Britannique Edmund Halley. Dans les grandes lignes, il apparait que le sursaut de 1843 a été précédé d'une montée en puissance régulière : la magnitude de l'étoile est passée de 4 à 1 en un demi-siècle. À partir de 1830, elle a ensuite connu quelques oscillations assez marquées jusqu'à la grande éruption, avant de chuter plutôt rapidement (en 40 ans) à un niveau très inférieur (magnitude 7,5).

UNE NOUVELLE COLÈRE EN PRÉPARATION

Si l'on excepte la petite éruption de 1890 (une brêve incursion à la magnitude 6), l'éclat d'Êta Carinæ est resté stable jusqu'en 1940, date à laquelle il a augmenté brusquement. Depuis, il croit lentement mais sûrement au rythme de 0,01 magnitude par an. Cette remontée augure-t-elle d'un nouvel épisode spectaculaire ? "Ce serait simpliste, prévient John Martin. Un calcul montre qu'il faut environ 200 ans pour qu'Êta de la Carène retrouve son équilibre après la grande éruption de 1843. L'étoile est en train de revenir à son état antérieur à cet évènement". Autrement dit, elle devrait regagner progressivement un éclat voisin de la magnitude 4 (actuellement, elle est autour de 5). Un second effet s'ajoute. Au fil des années, la nébuleuse Homunculus, actuellement de 1 année-lumière de diamètre, se dilue dans l'espace. Sa taille apparente grossit de 4" par siècle. "La poussière qui entoure Êta de la Carène se dissipe et la lumière venant de l'étoile nous parvient plus aisément", explique l'Argentin Eduardo Fernandez-Lajus. L'étoile brille donc davantage. L'autre piste pour tenter d'annoncer un prochain cataclysme consiste à déterminer si des éruptions similaires à celle de 1843 sont fréquentes. Pour cela, les astronomes se font historiens. "Nous avons cherché des témoignages d'évènements antérieurs sur plusieurs millénaires, notamment dans les écrits chinois, révèle John Martin. Nous n'avons pas trouvé le moindre indice qu'Êta de la Carène ait connu plus d'une grande éruption durant la période historique de l'humanité. Ces éruptions sont donc probablement très rares sur les échelles de temps humaines".
Si les hommes n'observent pas depuis assez longtemps, l'environnement de l'étoile conserve peut-être l'empreinte d'une autre éruption ? "Il y a une bulle transparente de matériau en expansion, loin en dehors de la nébuleuse Homunculus, et qui a probablement éjectée de l'étoile voici 10.000 ans, annonce John Martin. Cela suggère une connexion tentante avec le mythe du dieu sumérien Enki". Mais sans aucune vérificalion possible. Alors, Êta de la Carène a-t-elle explosé ? Possible, mais pas pendant que les astronomes, avec des moyens sans cesse plus sophistiqués, tentent de percer le secret de cette étoile hors du commun, vous pouvez toujours la surveiller. Après tout, les chances d'assister à un beau spectacle ne sont pas si faibles.

P.H. - CIEL & ESPACE > Mars > 2010
 

   
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