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Atmosphère et Couronne Solaire

8 Millions de Kilomètres

C'est la hauteur de l'atmosphère du Soleii, selon la dernière mesure réalisée par le Solar Terrestrial Relation Observatory, qui a sondé les vibrations acoustiques de notre étoile.

Cette couronne de plasma qui se dévoile en partie au moment des éclipses s'avère donc 10 fois plus étendue que ne le pensaient les astronomes : elle déploie son plasma sur l'équivalent de 12 fois le rayon du Soleil !

M.F. - SCIENCE & VIE N°1164 > Septembre > 2014

L'Énigme de la Couronne Solaire Résolue

La question parait toute simple, mais n'en défie pas moins les astrophysiciens depuis plus de 100 ans : pourquoi l'atmosphère du Soleil est-elle plus chaude que sa surface ? Les clichés rapportés par les télescopes offrent enfin un scénario crédible. Au cour de l'énigme : 3 phénomènes astrophysiques totalement inconnus.

C'est en 2009 que la traque a commencé. Etudiant les dernières images du Soleil captées par le Swedish Solar Telescope (SST) de La Palma, installé aux îles Canaries, des astronomes norvégiens tiquent : une ombre gigantesque, un mystérieux disque de plus d'un millier de kilomètres de diamètre, apparaît à la surface du Soleil, au milieu du bouillonnement des gaz ionisés, avant de disparaître quelques minutes plus tard... jamais aucun télescope n'avait capté un tel motif. De quoi s'agit-il ? Armés d'un supercalculateur, les chercheurs tentent en vain d'identifier le phénomène à coups d'équations... jusqu'à ce qu'enfin, il y a quelques mois, sa silhouette se matérialise à nouveau en trois dimensions sous l'oil du télescope spatial de la Nasa, Solar Dynamic Observatory (SDO).
Voir cette créature à l'ouvre est impressionnant : en un instant, elle enroule de gigantesques lignes de champ magnétique à l'origine d'un tourbillon inextricable. À sa base, des flots de gaz ionisés irrésistiblement attirés par cette toile magnétique s'arrachent de la surface du Soleil et tournoient jusqu'à atteindre 10.000 km/h. En quelques dizaines de seconde, le monstre atteint le faîte de sa splendeur : une tornade de plusieurs milliers de kilomètres de hauteur dont la bouche vorace, de la taille d'un continent terrestre, engloutit des centaines de milliards de kilomètres cubes de gaz chauffés à plus d'un million de degrés. Puis, au bout de quelques minutes... plus rien. La créature s'évanouit brusquement. Ses vortex magnétiques se déroulent. Sa chaleur se disperse dans l'atmosphère solaire. Et de ce monstre éphémère, de cette tornade colossale, il ne reste qu'un halo de chaleur diffus.

D'IRRÉSISTIBLES VRILLES DE CHAMP MAGNÉTIQUE...

Les astronomes tiennent peut-être là la pièce majeure d'un puzzle astronomique qu'ils échouent à assembler depuis plus de cent ans. Un puzzle en forme de question toute bête : pourquoi la couronne solaire, cette atmosphère de gaz ionisés qui cerne le Soleil, est-elle aussi brûlante, au lieu d'être aussi froide que l'espace ou, au moins, d'une température semblable à celle du Soleil lui-même, soit quelques milliers de degrés ? Depuis 1869 en effet, les mesures sont formelles : la couronne solaire, ce halo éthéré qui se matérialise autour de notre étoile lors des éclipses, atteint plusieurs millions de degrés... alors même que la température à sa surface n'est "que" de 5.600°C. "Toute l'énergie du Soleil provient des réactions nucléaires qui se déroulent dans son centre, explique Eric Buchlin, de l'Institut d'astrophysique spatiale d'Orsay (IAS). Ce sont elles qui alimentent en chaleur les différentes couches internes"... Ainsi, on observe que la température de l'étoile baisse continûment à mesure que l'on s'éloigne de son cour et que la densité du plasma diminue : on passe progressivement d'une pâte visqueuse chauffée à 12 millions de degrés au centre du Soleil à un fluide léger à 5600°C, 700.000 km plus loin. Le plasma devient alors transparent et prend la forme d'un léger gaz d'hydrogène et d'hélium. Nous sommes à la surface de l'étoile... et au cour de l'énigme : la température devrait continuer de baisser jusqu'à atteindre les -200°C qui règnent dans le vide de l'espace. Or, c'est tout le contraire qui se produit : elle augmente brusquement, de plus d'un million de degrés en quelques centaines de kilomètres ! Comment la chaleur, qui ne peut provenir que du centre du Soleil, peut-elle devenir si intense dans son atmosphère ? Par quels mystérieux mécanismes l'énergie peut-elle être canalisée pour gagner la couronne ?
Depuis des décennies, le problème occupe à lui seul la majorité des spécialistes. "C'est même l'une des grandes questions de l'astrophysique, ajoute Guillaume Aulanier de l'Observatoire de Paris. Car derrière cette énigme se cache une multitude de questions : pourquoi dans certains endroits, le milieu interstellaire est-il très chaud ? Comment les champs magnétiques contrôlent-ils les explosions d'étoiles ? Et, plus fondamental, comment chauffe un plasma ?"
Depuis cent ans, les hypothèses se sont succédé. Les astronomes ont d'abord pensé à des ondes acoustiques qui guideraient le plasma de gaz, ionisés et lui permettraient de gagner la couronne et de la chauffer. Las, les ondes sonores sont incapables de franchir la zone de transition qui sépare la surface solaire de son atmosphère. "On s'est aperçu qu'à cause de la grande variation de température de cette zone, les ondes sonores y sont déviées comme si elles changeaient de milieu", détaille Eric Buchlin. Puis, dans les annees 1970, c'est imposée l'idée que le vecteur d'énergie devait être le puissant champ magnétique régnant à la surface du Soleil. "Le magnétisme et l'électricité sont liés : les particules chargées d'un plasma ont tendance à suivre irrésistiblement les lignes de champ magnétique, détaille Sébastien Galtier, qui modélise le chauffage de la couronne à l'IAS. Il était logique de penser que le champ magnétique solaire, que l'on savait très intense, dominait toute la dynamique de la matière... et donc qu'il pouvait commander le transfert d'énergie sous la forme de particules chargées".
Restait à valider l'hypothèse en découvrant les mécanismes magnétiques qui régissent le transfert d'énergie. Pour cela, il fallait des mesures... Or, justement, depuis une vingtaine d'années, le Soleil est la cible d'une multitude de télescopes. "Cela a commencé à la fin des années 1990 avec le télescope spatial SOHO, relate Guillaume Aulanier. Avec ses images, on est passé d'une vision linéaire à une vue en trois dimensions. Pour la première fois, nous pouvions détailler les mouvements des plasmas en profondeur". Ont suivi STEREO, SORGE, RHESSI, Koranas, Hinode, SDO... Une dizaine de sondes se sont envolées vers des orbites héliocentriques, tandis qu'au sol, une trentaine de télescopes pointaient leur détecteur sur l'étoile, à l'affût du moindre tourbillon de son plasma, des plus infimes vrilles de son champ magnétique. "C'est une période très excitante pour la physique solaire, s'enthousiasme Durgesh Tripathi, spécialiste du Soleil à l'université de Cambridge. Nous vivons un âge d'or de l'observation".
Il fallait s'y attendre, cette armada n'a pas tardé à produire un déluge de données, des téraoctets de mesures sur lesquelles se sont précipités les spécialistes dans l'espoir de résoudre la fameuse énigme. Et les pièces du puzzle se sont peu à peu amoncelées. En 2002, on capte le signal de cascades de boucles magnétiques près des éruptions solaires qui semblent propager de l'énergie de proche en proche. En 2007, on découvre l'existence d'oscillations magnétiques : des ondes dites d'Alfvén, capables de traverser la zone de transition et de guider les particules chargées vers l'atmosphère solaire. En 2011, une équipe américaine découvre qu'à la surface, le champ magnétique peut former des tubes qui déversent en permanence des gaz brûlants dans la couronne solaire... À peine chaque nouveau mécanisme découvert, les astrophysiciens s'empressent de faire tourner des modèles et de dresser des bilans d'énergies dans l'espoir que leur créature magnétique soit assez puissante pour transporter toute l'énergie nécessaire au chauffage de la couronne. "Certains de ces phénomènes y parviennent sur le papier, précise Sébastien Galtier. Mais même leurs découvreurs doutent qu'elles suffisent en pratique".

FAITS ET CHIFFRES : 2000 articles scientifiques toutes sources confondues, dont 805 articles référencés, ont été publiés 20 dernières années au sujet de l'énigme de la couronne solaire. Le sujet qui concerne la grande majorité des astrophysiciens spécialistes du Soleil occupe à plein temps quelque 2000 chercheurs dans le monde.

...NOURRISSENT DE FORMIDABLES CRÉATURES

Or, ces derniers mois, trois équipes différentes ont chacune déniché une nouvelle créature astrophysique qui semble enfin résoudre l'énigme. Le premier de ces monstres est impressionnant... par sa petitesse : il s'agit de filaments de matière de seulement 100 km de diamètre qui injectent en permanence des gaz chauds à la base de l'atmosphère solaire. "Quand nous les avons découverts, nous n'en sommes pas revenus. Ils sont à la limite de la résolution du télescope. Nous nous sommes repassé les images pendant des jours avant d'y croire", relate Haisheng Ji, astrophysicien au Purple Mountain Observatory (PMO), en Chine, où sont dirigées les recherches. La surprise passée, les chercheurs ont étudié les mécanismes du phénomène et, d'après eux, ces filaments naîtraient de petites boucles de champ magnétique qui se forment à la surface du Soleil à cause des inhomogénéités de son plasma.
La deuxième étude met en évidence un phénomène similaire, mais à plus grande échelle et dans des régions particulières, agitées d'éruptions. Scrutant la base de l'une de ces éruptions solaires, des chercheurs de l'université de Cambridge ont discerné, grâce à Hinode, des courants de plasma qui s'élèvent à 100 km/h dans la couronne. "Nous travaillons sur les données, avance prudemment Durgesh Tripathi, qui a participé à l'observalion. Mais si notre interprétation est exacte, c'est comme si on voyait la surface du Soleil en train de s'évaporer". Enfin, plus massif encore, le fameux monstre de l'équipe norvégienne, ces gigantesques tornades qui brassent le plasma solaire et transferent son énergie partout dans la couronne. "Nous avions d'abord vu des disques de plasma en rotation juste au-dessus de la surface, raconte Eamon Scullion, l'un des découvreurs, à l'université d'Oslo. Mais nous ne savions pas vraiment ce que nous regardions. Il a fallu attendre le résultat de simulations numériques et de nouvelles observations pour relier ces phénomènes de surface à des tourbillons en altitude". Les chercheurs ont ainsi détaillé 14 tornades et calculé l'énergie qu'elles transmettent à la couronne. "C'est ce qui est le plus extraordinaire, s'enflamme Sven Wedemeyer, directeur des recherches. Nos simulations nous disent qu'il y a en permanence 10.000 tornades à la sulface du Soleil, qui transportent à elles seules assez d'énergie pour expliquer complètement le chauffage de la couronne".
Une à une, les pièces du puzzle s'emboîtent donc, révélant la solution de l'énigme. Certes, la majorité des chercheurs doute qu'un seul phénomène, quand bien même il s'agirait de monstrueuses tornades, soit à lui seul responsable du chauffage de la couronne solaire, mais tous s'accordent sur un point : la totalité des mécanismes de transfert découverts ces dix dernières années leur offre plus d'énergie qu'il ne leur en faut pour expliquer l'incroyable chaleur qui règne dans l'atmosphère solaire. L'heure est au bilan. Et à un premier schéma explicatif général. En ce qui concerne la source d'énergie, tout commencerait dans les mouvements turbulents des plasmas, juste au-dessous de la surface. La source d'énergie localisée, son vecteur a également été identifié : il s'agirait du champ magnétique solaire. Il ouvre, au gré de ses circonvolutions, des canaux à toutes les échelles par lesquels se déverse le plasma. Enfin, les mécanismes magnétiques sont en train de trouver leur place : les enroulements de champ magnétique qui déclenchent les tornades pourraient être responsables de la formation de minuscules filaments à la base de l'atmosphère qui, eux-mêmes, donneraient naissance à des courants ascendants... "On ne sait pas encore quel processus domine : les premières études de synthèse visant à faire le tri entre ces différents mécanismes et à les assembler pour raconter l'histoire au complet commencent seulement à être menées, prévient Guillaume Aulanier. Mais oui ! Le fond de la physique est là : on a une bonne idée de comment les choses se passent".

OÙ PART ENSUITE L'ÉNERGIE ?

Reste une grande inconnue : comment l'énergie se dissipe-t-elle ensuite dans l'atmosphère Solaire ? "C'est la question qui reste", confirme Eric Buchlin. Pour l'heure, deux types de phénomènes ont été identifiés. Soit l'énergie est libérée lorsque les lignes de champ magnétique, à force d'être vrillées, se rompent brutalement, avant de s'allier de nouveau sous une forme plus stable : cette "reconnexion magnétique" a été observée en laboratoire dès 1997. Soit elle serait due à des phénomènes de turbulence à petite échelle : les collisions entre les ondes magnétiques pourraient agiter les particules du plasma qui les entoure, transmettant ainsi leur énergie, un peu comme le courant électrique qui traverse une ampoule halogène stimule les particules de gaz qu'elle contient. Et ces mécanismes pourraient cohabiter : "Les modèles semblent indiquer que dans les régions calmes du Soleil, la reconnexion magnétique domine ; et dans les légions actives, la turbulence à petite échelle prend le relais", précise Guillaume Aulanier.
Pour trancher cette question, de nouvelles observations sont nécessaires... Or, rien ne dit qu'elles seront un jour à portée de télescope. "Les échelles de ces phénomènes sont de l'ordre de quelques dizaines de mètres, quand la résolution maximale de nos télescopes est de l'ordre d'une centaine de kilomètres, remarque Eric Buchlin. Quelques projets sont bien dans les cartons pour gagner en résolution, mais ils seront encore loin de ce niveau de détail". Sans compter que les difficultés sont aussi théoriques car, à cette échelle, les gaz ionisés se comportent non plus de manière fluide mais comme un ensemble de particules chargées que l'on ne peut décrire sans s'attaquer à la physique non linéaire des plasmas, un sujet qui a épuisé des générations de théoriciens. Si l'énigme de sa couronne est résolue... le roi Soleil n'en garde pas moins une part de mystère.

LE SOLEIL CACHE UN AUTRE SECRET
Comment le Soleil parvient-il a accélérer a ce point la vitesse de son vent ?
Les mesures montrent que ce flot de particules, qui se détache en permanence de l'atmosphère solaire, se disperse dans l'espace à 4 millions de km/h... alors que, selon les modèles, il ne devrait pas dépasser quelques centaines de milliers de km/h ! Les astrophysiciens soupçonnent encore une fois le champ magnétique de jouer un rôle prépondérant, mais ils échouent a distinguer le mécanisme à l'ouvre. La sonde Solar Orbiter de l'ESA qui observera les pôles de l'étoile, ou le vent est le plus intense, à partir de 2018 pourrait apporter des éléments de réponse. "C'est le sujet qui va nous occuper dans les vingt prochaines années prédit Sébastien Galtier, de l'Institut d'astrophysique spatiale d'Orsay.

M.F. - SCIENCE & VIE > Novembre > 2012

La Couronne Solaire Livre ses Premiers Secrets

La différence de température entre la couronne du soleil (2 millions de degrés Celsius) et sa surface (5500°C) serait due à des éruptions de plasma.

Pourquoi la couronne solaire, ce halo de plasma qui entoure notre étoile, est-elle si chaude ? La température y atteint 2 millions de degrés contre 5500°C en moyenne à la surface du soleil... Bart de Pontieu et son équipe d'astrophysiciens tiennent enfin un début d'explication. En combinant les données et du satellite japonais Hinode et de l'observatoire spatial SDO de la NASA, ils ont découvert que de grandes quantités de chaleur quittent le soleil pour sa couronne via des jets de plasma brûlant : les spicules. On connaissait leur existence sans imaginer leur impact. "L'utilisation simultanée d'Hinode et de SDO a permis de mesurer la température des spicules avec beaucoup plus de détails", précise Guillaume Aulanier, à l'observatoire de Paris. Selon ces mesures, les spicules transporteraient du plasma à plus d'un million de degrés ! De quoi irriguer de chaleur une partie de la couronne solaire. "Il est probable que le champ magnétique, qui contient la grande majorité de l'énergie de la couronne solaire, joue aussi un rôle", ajoute Guillaume Aulanier. Mais pour explorer cette piste, il faudra attendre le lancement de la prochaine mission solaire en 2012.

M.F. - SCIENCE & VIE > Mars > 2011

La Couronne Solaire Livre enfin ses Secrets

Grâce à la sonde Hinode lancée en 2006 par les agences spatiales japonaise, européenne et américaine pour étudier le Soleil, le voile se lève sur la très mystérieuse couronne solaire, la couche extérieure de l'atmosphère de notre étoile.

Sa température y est étonnamment gigantesque : plusieurs millions de kelvin, soit des milliers de fois celle qui règne à la surface du Soleil. Pour expliquer cet étrange phénomène, le physicien suédois Hannes Alfven avait émis dans les années 1960 l'hypothèse d'ondes magnétohydrodynamiques (baptisées ondes d'Alfven) parcourant l'atmosphère solaire et l'échauffant. Les instruments de très haute résolution de la sonde Hinode ont enfin permis de confirmer l'existence de ces fameuses oscillations du champ magnétique. Ils ont en outre permis d'observer pas moins de 240 jets coronaux par jour en moyenne.

Ces éjections proviendraient de la rencontre de deux champs magnétiques de charge opposée. Combinés aux ondes d'Alfven, ils pourraient expliquer la formation et l'accélération des vents solaires, ces flux de plasmas qui s'échappent de l'atmosphère du Soleil à des centaines de kilomètres par seconde.

A.O. - SCIENCE & VIE > Février > 2008
 

   
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