Elle explique pourquoi nous ne ressemblons pas aux particules.
Si les bizarreries de la physique quantique s'appliquaient à notre echelle, le don d'ubicuité (la capacité d'être à plusieurs endroits en même temps) serait monnaie courante : comme certaines particules, nous pourrions nous trouver "ici" et "là" en même temps. Or, on se s'est jamais retrouvé à la fois en cours de maths ET dans un lit douillet.
La théorie de la décohérence tente précisément d'expliquer pourquoi les lois qui régissent le monde de l'infiniment petit ne se vérifient pas à notre échelle (dite macroscopique, par opposition à microscopique). Et c'est une expérience de pensée proposée par le physicien Erwin Schrodinger qui l'illustre à merveille. Notre homme imagine un chat enfermé dans une boîte opaque. Son destin dépend d'un atome ayant une chance sur deux de se desintegrer au bout d'un certain temps (il est radioactif). Si l'atome se désintègre, un detecteur brise une capsule de poison qui provoque la mort du pauvre animal ; sinon, le matou continue de vivre. Or, tant que la boîte est fermée, on n'a aucune idée de ce qui se passe à l'intérieur.
Autrement dit, comme on n'a effectué aucune mesure, les lois de la physique quantique indiquent que l'atome est dans un "état superposé" à la fois désintégré ET non désintégré. Conséquence : le chat devrait donc être à la fois mort ET vivant...Absurde ? Schrodinger le pensait, et c'est pour montrer la folie de la nouvelle physique qu'il a forgé cette historiette. Sauf qu'il avait tort. Comme les chats morts-vivants ne courent pas les toits, il doit bien exister un phénomène qui prive notre monde observable des bizarreries de l'infiniment petit. En fait, au-delà de quelques atomes, un objet n'est jamais totalement isolé de son environnement. Notre chat, par exemple, est au contact de la boîte, frappé par les molecules d'air qu'elle contient, soumis à la gravité, etc. Sans doute, toutes les particules dont il est composé finissent donc par adopter de concert un unique état compatible avec l'ensemble : la décohérence serait précisément ce "passage" (->).
Dans le monde microscopique, les particules connaissent des états superposés. Un peu comme si, en elles, cohabitaient deux formes à la fois - ici (->), nous avons imaginé des figures "superposées", à la fois sphère et pyramide. La décohérence désigne le passage de cet état superposé à un autre, ou les particules ont fait un "choix" : SOIT sphère, SOIT pyramide. Dans Un système à plusieurs particules, le superposition ne peut se maintenir longtemps.
Notre santé mentale est sauve : Minet se révélera toujours mort OU vivant, jamais dans une superposition des deux états ! Plus qu'une simple théorie, la décohérence a été confirmée par de nombreuses expériences en laboratoire - rassurez-vous, les matous ont été remplacés par des atomes ou des "grains" de lumière, les photons. Les recherches actuelles visent à fabriquer et a manipuler des mini-chats de Schrodinger à l'aide de ces mêmes particules. Objectif : apprendre à contrôler leur passage naturel vers un etat classique pour, notamment, assurer le fonctionnement d'un ordinateur quantique.
O.F. - SCIENCE & VIE JUNIOR Hors Série > Décembre > 2010 |
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