P L A N È T E  G A Ï A 
 
   
   
 ASTRONOMIE -> SYSTÈME SOLAIRE -> PLANÉTOLOGIE 
   
 
Les Anneaux de S A T U R N E

Les Anneaux de Saturne seraient Nés d'une Lune

A.D. - SCIENCE & VIE N°1263 > Décembre > 2022

Voici comment les Anneaux de Saturne sont Sculptés

A.D. - SCIENCE & VIE N°1224 > Septembre > 2019

Les Anneaux de Saturne finiront par Disparaître

B.R. - SCIENCE & VIE N°1218 > Mars > 2019

Le Retour du Mystère


M.F. - SCIENCE & VIE N°1195 > Avril > 2017

Aux Origines des Anneaux de Saturne

POUR LA SCIENCE N°471 > Janvier > 2017

Les Anneaux de Saturne


SCIENCES ET AVENIR N°814 > Décembre > 2014

Saturne à Contre-jour et en Famille

JUILLET 2013. Pour la première fois, la sonde spatiale Cassini lancée en 1997 et arrivée autour de Saturne en 2004, a réussi à immortaliser sur un même cliché ses sujets d'étude favoris : Saturne, accompagné de ses anneaux et de sept de ses lunes (Encelade, Prométhée, Épiméthée, Thétys, Janus, Mimas et Pandora, mais aussi Mars, Vénus et la Terre !

Une prouesse rendue possible grâce à un alignement du Soleil, de la planète et de la sonde. Protégée par l'ombre de Saturne, Cassini a en effet pu diriger son regard en direction de la Terre sans endommager ses sensibles capteurs. Le contre-jour permet également de bien distinguer l'anneau externe (visible sous la forme d'un halo bleuté), ténu car constitué de très fines particules. Le panorama est constitué de 141 images grand angle, embrassant une distance de plus de 650 000 kilomètres de large ! Une jolie prouesse qui vient couronner presque dix ans d'incroyables succès.

SCIENCE & VIE Hors Série > Juin > 2014

Ses Anneaux font les Pluies de Saturne

C'est l'une de ces rares découvertes qui éclairent bien au-delà de votre domaine d'étude", s'enthousiasme Tom Sallard.

Cet astronome de l'université de Leicester et son équipe viennent de s'apercevoir que les anneaux de Saturne se désagrègent : molécule après molécule, les rubans de poussières et de roches qui s'enroulent auteur de la géante sont en train de descendre de leur piédestal !
"Cela a été une très grande surprise, relate James O'Donoghue, qui a mené les recherches. J'étudiais le rayonnement de l'atmosphère de Saturne pour voir ses aurores, lorsque j'ai découvert une série de pics lumineux qui délimitaient des zones sombres, très pauvres en particules chargées". Croyant à une erreur, l'astronome a finalement l'idée de les représenter sur une carte et découvre... les anneaux de Saturne ! "La série de zones sombres reproduit parfaitement le motif des anneaux", martèle le chercheur. Et alors, le phénomène s'est imposé comme une évidence : le champ magnétique de la géante arrache en permanence des molécules d'eau aux anneaux, puis les guide jusqu'à la haute atmosphère. Là, elles échangent leurs charges avec les ions du milieu, formant ces bandes obscures qui suivent comme des ombres la forme des anneaux. Il pleut sur Saturne... et l'eau vient des anneaux.

M.F. - SCIENCE & VIE > Juin > 2013

Le Mystère enfin Résolu

400 ans qu'ils émerveillaient les astronomes... sans livrer le secret de leur origine. Mais le défi vient enfin d'être relevé. Car l'analyse des données collectées par la sonde Cassini est formelle : les anneaux de Saturne sont nés de la chute d'un satellite géant sur la toute jeune planète. Mieux, ils ont donné naissance à ses nombreux satellites. Et loin d'être une singularité astronomique, il en existe ailleurs dans l'Univers !

Selon les mythologies grecque et romaine, Saturne est un Titan taciturne qui dévorait ses enfants pour éviter qu'ils ne le détrônent. Ce n'est pas la mythologie qui a inspiré Robin Canup, spécialiste de planétologie à l'Institut de recherche de Boulder (Colorado, États-Unis), mais une flopée de calculs réalisés à partir des données hyperprécises envoyées par la sonde Cassini, satellisée depuis sept ans autour de la planète. L'astronome américaine est pourtant parvenue à la même conclusion que les Anciens : Saturne, à l'aube du monde, a bien dévoré ses enfants ! Et les anneaux qui l'entourent sont les restes de ce monstrueux carnage.
Après cinq sièclès de débats, la formation de ces anneaux était le dernier grand mystère de cette planète singulière, la sixième en termes de distance au Soleil, la deuxième derrière Jupiter par la taille, mais sûrement la première en termes d'énigmes. Chacun a en tête cet incroyable cerceau qui tourne autour d'une boule jaune lévitant dans la nuit cosmique. lmage d'une simplicité et d'une beauté imparables, symbole de tous les mondes lointains, icône de notre représentation du ciel, cette vision en appelle d'autant à notre imaginaire le plus enfantin qu'elle est ancrée dans notre patrimoine culturel. Nombre d'astronomes avouent d'ailleurs que c'est elle qui décida de leur vocation : ils n'avaient jamais rien vu de tel.

LES PREMIÈRES INTUITIONS DE GALILÉE : Il y a quatre cents ans, le premier astronome à tourner une lunette vers Saturne ne s'attendait pas non plus à un tel prodige. Au cours de l'été 1610, après avoir contemplé la Lune, Vénus et Jupiter, Galilée a dans l'idée que toutes les planètes, comme la Terre, offrent l'image d'une sphère flottant dans l'espace. Il sait que Saturne est la plus lointaine du système solaire (Uranus et Neptune ne seront découvertes qu'un et deux siècles plus tard). Du fait de son cours stable, lent et majestueux, les Grecs ont baptisé Cronos cette planète parfaitement visible à l'oil nu, du nom du roi des Titans et père de Zeus, dont Saturne est l'équivalent latin. Lorsque le savant italien braque sur elle sa lunette, celle-ci est trop petite et imprécise pour lui permettre de discerner les anneaux. Mais elle est assez puissante pour lui réserver une surprise de taille. Car dans l'oculaire, Galilée observe une "planète trijumelle", c'est-à-dire, note-t-il à l'époque, dotée de "deux serviteurs qui aident le vieux Saturne à faire son chemin et restent toujours à ses côtés". Il sait qu'il ne s'agit pas de satellites : il les verrait tourner autour de la planète, comme ceux qu'il vient de découvrir autour de Jupiter. Non, ce qu'il croit voir, ce sont deux bizarres extensions qui dépassent de part et d'autre de la planète. Une énigme qui, deux ans plus tard, prend un tour encore plus déroutant : lors d'une nouvelle campagne d'observation, l'astronome constate que les deux appendices de la planète ont disparu ! Pas de chance : tous les quinze ans, les anneaux de Saturne se présentent par la tranche, devenant pendant quelques mois si fins qu'une simple lunette astronomique ne peut plus les voir. Dépité, Galilée déclare que "Saturne a dévoré ses enfants", s'étonnant de la résonance avec le mythe antique.
Il faut attendre près d'un demi-siècle pour que les anneaux sortent de l'ombre, en 1655, grâce à l'astronome hollandais, parisien d'adoption, Christian Huygens : avec l'une de ces "longues lunettes à faire peur aux gens", que raillait à l'époque Molière, il est le premier à annoncer que Saturne "est entourée d'un anneau léger, n'adhérant à l'astre en aucun point". Huygens profite mème de la qualité de sa lunette pour lui découvrir un satellite, deux fois plus gros que la Lune : Titan, le premier d'une longue liste. Mais les anneaux... quelle révélation ! Simple amateur ou astronome royal, chacun veut voir ce prodige et "sentir de ses yeux" la distance invraisemblable qui le sépare de l'astre le plus lointain connu dans l'Univers - 355 millions de lieues - à une époque où traverser la France est une expédition et où la Terre est encore largement incognita... Les plus grands esprits sont convoqués pour expliquer cette singularité cosmique. Voici Saturne redevenue un mythe d'actualité.
Quelle est la nature de son anneau ? Très vite, les savants parviennent à s'extraire de son apparence lisse, uniforme, solide... Car cette structure ne peut pas tourner conune un disque 33 tours sur une platine : les forces de marées gravitationnelles la disloqueraient aussitôt. Grâce à l'amélioration des optiques des lunettes, Jean-Dominique Cassini, directeur de l'Observatoire de Paris, découvre en 1675 qu'il n'y a pas un seul anneau, mais au minimum deux, séparés par des divisions noires à travers lesquelles, parfois, on peut voir briller une étoile. Ces anneaux sont-ils solides, liquides, gazeux ? Si Pierre-Simon Laplace, à la fin du XVIIè siècle, suggère des armeaux minces et solides, James Clerk Maxwell, le fondateur de la théorie de l'électromagnétisme, démontre, au milieu du XIXè siècle, que ce n'est pas possible car ces anneaux se briseraient. Depuis les analyses spectroscopiques de la fin du XIXe siècle jusqu'aux sondes spatiales américaines, Voyager 1 et 2, au début des armées 1980, le mystère va peu à peu s'éclaitcir. Jusqu'à ce que les observations établissent que les anneaux sont constitués de blocs de glace plus ou moins gros.

LA PREMIÈRE THÉORIE VRAIMENT COHÉRENTE : À partir de 2004, la sonde Cassini va définitivement lever le voile en révélant tous les détails de ce qu'Aurélien Crida, de l'Observatoire de la Côte d'Azur et de l'université de Nice Sophia-Antipolis, décrit conune "l'objet le plus fin que l'on connaisse dans l'Univers : les anneaux mesurent chacun entre 10 met 100 m d'épaisseur pour près de 300.000 km de diamètre. Ils sont très denses, constitués de blocs de glace mesurant de 10 cm à quelques mètres et distants de quelques mètres les uns des autres seulement, qui s'agrègent et se désagrègent perpétuellement au fil de leur rotation autour de la planète".
Restait à percer l'origine et le destin de ces anneaux. Longtemps, les astronomes ont pensé que cette structure était unique, très récente, accidentelle, et d'une durée de vie limitée. À la fin du XIXè siècle, l'astronome Camille Flammarion, l'oil rivé à sa lunette, croyait conune la plupart de ses confrères voir les anneaux évoluer d'année en année, imaginant mème qu'il allait bientôt assister à leur destruction et leur chute sur la planète géante... Il y a encore trois ans, l'hypothèse circulait d'une comète de passage qui se serait éparpillée en frôlant Saturne, une "catastrophe" qui aurait eu lieu voici moins de cent millions d'armées ! C'était avant que les dernières analyses des données envoyées par Cassini n'apportent leur moisson de révélations. D'abord, Robin Canup et son équipe ont établi que les anneaux sont aussi anciens que la planète elle-même. Surtout, ils ont démontré qu'ils seraient nés lors de la chute sur la toute jeune Saturne d'un satellite géant, qui aurait répandu tout autour d'elle d'énormes quantités de glace (->). Un scénario qui, selon Aurélien Crida, "offre pour la première fois un point de départ convaincant pour une théorie cohérente de l'origine des anneaux et des satellites de Saturne".

Et ce n'est pas tout. Car une équipe d'astrophysiciens français a, pour sa part, démontré l'été dernier comment une grande partie de l'actuel cortège de satellites de Saturne aurait été enfantée... par les anneaux eux-mêmes (encadré ci-dessous).

ILS ONT AUSSI ENFANTÉ DES SATELLITES
Le satellite Pan (au centre de l'image 2) mesure 30 km de diamètre. Il a balayé une large zone dans les anneaux, la division de Encke. Prométhée (3), qui mesure 100 km de diamètre, s'approche des anneaux toutes les 14 heures, les soulève, les voile et y creuse des chenaux dans la glace en mouvement (1 et 3). Daphnis ouvre, lui, son chemin à l'intérieur même des anneaux, soulevant la glace en de gigantesques vagues de 1000 m de hauteur (4).

En se stabilisant autour de Saturne en 2004, en photographiant ses centaines d'anneaux et en découvrant les dizaines de minuscules satellites qui y creusent leur sillon, la sonde Cassini a montré combien l'environnement de cette planète est riche et complexe... Surtout, ces données ont permis aux astronomes français Sébastien Charnoz, Julien Salmon et Aurélien Crida, intrigués par leur composition et par leur position, de percer le mystère de la naissance de Pan, Atlas, Pandore, Prométhée, Epiméthée, ces petits satellites situés au bord des anneaux. "Les interactions gravitationnelles entre ses petits satellites et les anneaux tendent à les éloigner de la planète, explique Aurélien Crida. Vu leur position actuelle, nous pensons que ce sont des objets très jeunes, formés à partir de la glace des anneaux, à leur extrémité, et s'en éloignant lentement". Une intuition confirmée par une simulation numérique. Ces satellites, de quelques dizaines à quelques centaines de kilomètres, seraient des "bouts d'anneaux" condensés en agrégats il y a quelques millions ou dizaines de millions d'années. Ce processus étant toujours en cours, les anneaux de Saturne sont donc le dernier endroit de notre système où des corps célestes sont encore en train de naître !

Autant de révélations qui, outre le fait qu'elles élucident enfin un mystère vieux de plus de quatre cents ans, incitent à voir dans les anneaux une structure non pas instable, mais au contraire universelle... et donc potentiellement observable sur d'autres planètes, voire des exoplanètes (encadré ci dessous). Comme une belle ironie de l'Histoire, voici donc Saturne qui enfante de nouveaux mythes, maintenant que l'homme a dévoré le sien.

LEUR STRUCTURE EST EN FAIT UNIVERSELLE
Longtemps, les astronomes ont pensé que les anneaux de Saturne étaient une structure unique, récente et éphémère. Les toutes dernières analyses réalisées par l'astronome américaine Robin Canup prouvent exactement le contraire !

Mème si les anneaux de Saturne s'étalent lentement, en perdant progressivement de la masse au profit des satellites qu'ils engendrent, cette structure s'avère extraordinairement stable et presque aussi ancienne que la planète. On sait par ailleurs depuis les années 1980 que s'ètre structure n'est pas unique : les sondes spatiales ont révélé que les autres planètes géantes, Jupiter, Uranus et Neptune, possèdent aussi leurs propres anneaux. Invisibles au télescope, presque transparents, beaucoup plus petits et moins denses que ceux de Saturne, il prouve néanmoins que l'anneau est une structure beaucoup moins rare qu'on ne le pensait. Une structure probablement présente dans de nombreux exosystèmes.

EN SAVOIR PLUS
Le site de la mission Cassini révèle presque tous les jours de nouveaux portraits de Saturne et de ses satellites.
http://ciclops.org

S.B. - SCIENCE & VIE > Avril > 2011

Anneaux de Saturne : le Mystère s'éclaircit

Sont-ils nés avec la planète ou résultent-ils de la fragmentation d'un corps céleste ? Les dernières images hautes définitions de la sonde Cassini lèvent enfin le voile sur une énigme de cinq siècles.

Des milliards de milliards de blocs de glace d'eau quasiment purs, formant une fine ceinture d'une vingtaine de mètres d'épaisseur pour plusieurs dizaines de milliers de km de largeur : les anneaux de Saturne sont sans conteste l'une des merveilles du système solaire. Depuis leur découverte au XVIIè siècle par Galilée, la planète gardait jalousement leur provenance.
Voilà qu'une nouvelle moisson d'indices révélés par les images de Cassini nous indiquent que les anneaux seraient nés sur le tard, de la fracturation d'un objet céleste massif, d'au moins 400 km de diamètre ! "En se brisant, il aurait répandu des morceaux de l'ordre du centimètre jusqu'à la dizaine de kilomètres tout autour de la planète. Puis les collisions en cascade entre les morceaux auraient fait perdre de l'énergie à ce système, lui faisant finalement adopter la configuration en anneaux", explique Larry Esposito, de l'université Cornell, aux États-Unis. Avec son collègue Josh Colwell, le chercheur avait émis cette hypothèse d'une "fragmentation catastrophique" en 1987, après le passage des sondes Voyager près de la planète. Mais il manquait un élément clé pour valider leur raisonnement : la répartition exacte, selon leur faille, des corps qui composent les anneaux.

Limite de Roche : c'est la distance, autour d'une planète, en dessous de laquelle un astre qui passe à proximité va se disloquer, sous l'effet des forces de marées qu'elle lui inflige. Pour les mèmes raisons, aucun satellite naturel ne pourra s'agréger à partir de poussières dans cette zone. Pour Saturne, cette limite équivaut a environ deux fois son rayon : elle se superpose donc à l'anneau A.
Les anneaux de Saturne se sont-ils formés avec leur planète, ou bien après ? Les deux cas ont été envisagés. L'aspect brillant des anneaux de Saturne semble indiquer une extrème jeunesse...
NÉS AVEC SATURNE
1. La planète géante est en formation.
2. Saturne nait entourée de milliers de fragments.
3. Les fragments situés à l'intérieur de la limite de Roche ne parviennent pas à s'agglomérer pour former un satellite.
4. Ces fragments forment aujourd'hui les anneaux.
NÉS APRÈS SATURNE
1. Un satellite s'approche trop de sa planète.
2. Tiraillé par les effets gravitationnels de la planète géante, le satellite est déformé.
3. Le satellite est pulvérisé.
4. Des millions de fragments se retrouvent sur orbite.
5. Ces fragments forment aujourd'hui les anneaux.

LA PISTE DE LA FRAGMENTATION : Lors de la fragmentation d'un objet, les débris sont répartis suivant une loi qui détermine le nombre précis de morceaux dans chaque catégorie de taille, explique Matthew Tiscareno, de la même université. On doit donc obtenir quelques gros morceaux, davantage de moyens, et d'innombrables petits. Ainsi, on peut établir une courbe de distribution théorique. Si les observations concordent avec cette courbe, on a toutes les chances que l'hypothèse de la fragmentation soit la solution à l'énigme des anneaux". Seulement voilà : seul le nombre des petits morceaux (autour de 1 cm), estimé par radar, correspondait à la théorie. Les satellites saturniens Pan et Atlas, d'une trentaine de kilomètres, étaient, eux, trop volumineux pour représenter les plus gros objets de la courbe. Quant aux moyens (environ 100 m), rien ne permettait jusqu'ici de les observer.
Mais la donne n'est désormais plus la même ! En effet, Carolyn Porco, du Space Science Institute à Boulder (Colorado) et Sébastien Charnoz du Commissariat à l'énergie atomique (CEA), viennent de montrer qu'à l'époque de la formation des anneaux, Pan et Atlas étaient deux fois plus petits qu'aujourd'hui. Ces satellites ont une forme sans équivalent dans le système solaire. Une montagne de 10 km s'élève le long de leur équateur, ce qui leur donne une forme de soucoupe volante ! "Comme les équateurs de Pan et Atlas se situent dans le même plan que celui des anneaux, on s'est tout de suite douté de l'influeuce de ces derniers sur l'apparence singulière des deux satellites", explique Sébastien Charnoz. La confirmation leur fut apportée par simulation nurnérique : les bourrelets sont dus à la poussière contenue dans les anneaux qui s'est agrégée sur l'équateur. L'accrétion a dû s'effectuer très rapidement, alors que les anneaux étaient encore denses... c'est-à-dire au moment de leur formation. Et si on considère la taille initiale de Pan et Atlas (15 km), ils collent à présent à la théorie !
Au mème moment, Matthew Tiscareno et Miodrag Sremcevic, de l'université du Colorado, découvraient des sillons de 15 km de long en forme d'hélice dans l'anneau A. Or, il s'agirait de traces, laissées par des objets d'une centaines de mètres. À partir des 12 sillons repérés, ils ont extrapolé la présence de milliers de morceaux de ce gabarit. On retrouve ainsi les satellites moyens manquant dans la courbe. Autant dire que la piste de la fragmentation est désormais solide.
Deux points essentiels restent cependant à éclaircir dans cette reconstitution : tout d'abord, l'identité du coupable à l'origine du sinistre. En effet, le corps initial est forcément étranger à Saturne, car à l'altitude de l'anneau A, à environ 130.000 km, on est dans la limite de Roche. Ce qui exclut l'hypothèse d'un ancien satellite de la planète. Ensuite la date de la destrction. "Nous avons de sérieuses raisons de penser que les anneaux sont jeunes, environ 100 millions d'années", explique Joe Burns (Cornell). Ces sérieuses raisons sont aux nombres de trois : leur brillance, qui montre qu'ils n'ont pas été assombris par les silicates du bombardement météoritiques permanent ; la présence de gros morceaux (ils seraient érodés si les anneaux étaient plus vieux) ; leur compacité, qui n'aurait pas résisté aux perturbations gravitationnelles engendrées par les satellites, qui les poussent à s'étaler au cours du temps. Oui, mais une rencontre entre Saturne et un objet de 400 km il y a cent millions d'années est improbable, car le système solaire était déjà calme... "Les anneaux seraient-ils plus anciens qu'on ne le croyait ?, s'interroge Sébastien Charnoz. Il faut réévaluer tous les processus établis. À commencer par ceux-là mème que l'on a interprétés comme des signes de jeunesse."

DES ANNÉES À VENIR DÉCISIVES : Par bonheur, les scientifiques ont déjà quelques pistes. En mai dernier, Larry Esposilo et Josh Colwell ont démontré, grâce à de nouvelles simulations, que les anneaux seraient deux fois plus denses que ce que l'on pensait. Or, une quantité supplémentaire de matière engendre une dilution plus importante des silicates. La grande brillance des anneaux n'est donc pas incompatible avec un âge avancé. Larry Esposito s'est également aperçu que les particules érodées par le bombardement météoritique se recyclent continuellement, alternant les phases d'accrétion et de destruction. Elles pourraient donc avoir conservé leurs tailles moyennes pendant bien plus que 100 millions d'années. Enfin, ce phénomène d'accrétion permettrait de réinterpréter le faible étalement des anneaux. "Des modélisations nous ont permis de découvrir l'existence d'une accrétion microscopique qui baisse la viscosité du milieu, indique Sébastien Charnoz. Or, celle-ci, lorsqu'elle diminue, réduit considérablement la vitesse d'étalement des anneaux." Ils pourraient donc ètre aussi vieux que Saturne ! Se pourrait-il alors qu'ils soient issus de la planète elle-même ? Impossible, assure Sébastien Charnoz. Car à sa naissance, celle-ci était plongée dans une nébuleuse de gaz, qui a fini par s'échapper, nettoyant tout sur son passage. Les anneaux auraient été évacués par cet effet de chasse d'eau."
La piste privilégiée reste donc bien la fragmentation catastrophique d'un astre. Les scientifiques pensent à une comète qui, passant sous la limite de Roche, aurait été déchirée par les forces de marée. "Ce scénario est plausible, mais le problème, c'est qu'une comète de 400 km de diamètre, ça ne s'est encore jamais vu !", plaisante Sébastien Charnoz. Pour le chercheur, chaque obstacle franchi apporte son lot de nouvelles questions. "On peut très bien imaginer qu'il s'agisse d'un centaure, ces asteroides qui gravitent autour du Soleil entre Jupiter et Neptune, propose-t-il. Ou mème d'un objet en provenance de la ceinture de Kuiper, au-delà de Neptune. Sauf que ceux-ci contiennent entre 10 et 50 % de silicates or, les anneaux sont composés de glace quasiment pure ! Où serait alors passé le silicate ?" Quoi qu'il en soit, les chercheurs attendent avec impatience les prochaines années de la ulission Cassini, durant lesquelles la sonde va, par exemple, retracer l'historique des impacts sur les grosses lunes de Satume, comme Japet. Ceci devrait permettre de mieux cerner le moment de la fragmentation, en révélant à quelle époque les bombardements cométaires étaient les plus fréquents. Elle va également repasser à proximité des endroits qu'elle a déjà photographiés, mais avec des angles de vue nouveaux. Et surtout, quelques années plus tard ! Car "connaître l'évolution du disque sur plusieurs années est essentiel pour établir les interactions, les contraintes, la viscosité à l'intérieur de celui-ci, et ainsi remonter à une connaissance précise de se structure", assure Sébastien Charnoz. Pourtant, au fond, ce qu'espèrent les chercheurs, c'est pouvoir un jour travailler sur des images avec une résolution plus haute encore. Et si Cassini ne le permet pas, la planète Saturne conservera encore longtemps le secret de ses anneaux.

Si la taille des satellites Atlas (à g) et Pan n'est pas conforme au modèle, c'est qu'ils ont agrégé des poussières à l'équateur lors de la formation des anneaux.

Benoit Rey - SCIENCE & VIE > Mars > 2008
 

   
 C.S. - Maréva Inc. © 2000 
 charlyjo@laposte.net