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Naissance du Soleil

Le Soleil n'est pas une Étoile comme les Autres

B.R. - SCIENCE & VIE N°1189 > Octobre > 2016

Coatlicue, l'Étoile qui a Engendré le Soleil

CIEL & ESPACE N°509 > Octobre > 2012

On sait Comment le Soleil est Né

Faute de scénarios réellement convaintants, nul ne savait jusqu'ici comment notre étoile était née. Mais voici qu'un astrophysicien, au terme de quinze ans d'enquête passés à étudier les météorites, est parvenu à reconstituer les toutes premières heures du Soleil. A la clé : le récit enfin complet de la génèse solaire.

Il y a 4,6 milliards d'années, notre Soleil (au centre ->) émergeait de son cocon gazeux, à la périphérie d'une étoile massive.

"Il était une fois"... commence Georges Meynet, de l'Observatoire de Genève. Il était une fois, il y a 4,6 milliards d'années, un nuage qui gravitait paisiblement dans un coin de la Voie lactée... quand soudain, une vague irrésistible secoua ses poussières et ses gaz qui se mirent à s'enrouler, à s'entrechoquer. Au cour de ce maelström, la chaleur devint insoutenable, la pression colossale. Et une lumière jaillit : un photon, puis dix, puis des milliards... le premier rayon de notre Soleil !
Ça y est ! Après des dizaines d'années de simulations, d'analyses et d'observations, ponctuées de moult rebondissements, l'histoire de notre astre peut enfin être racontée. On est capable de détailler le composition du cocon gazeux originel ; de dresser le portrait de sa mère, une étoile géante qui vécut juste le temps de couver, avant d'agoniser dans une monstrueuse explosion. On peut prédire le destin de ses sours jumelles, dispersées à travers toute la galaxie ; et même imaginer ses grands-parents, une armée de géantes massives...
Disons-le, Matthieu Gounelle a réalisé le rêve des astrophysiciens : parvenir à décrire comment notre étoile a émergé d'un nuage de gaz au côté d'une centaine de sours jumelles. Et il aura fallu à ce cosmochimiste du Museum national d'histoire naturelle une enquête acharnée de quinze ans pour offrir enfin sa genèse à notre petit Univers. Le secret de cet exploit ? Le chercheur a déroulé toute l'histoire de la naissance du Soleil en tirant sur un fil, un indice infime : une anomalie dans les analyses chimiques des météorites. Car c'est dans les défauts d'un vulgaire caillou tombé du ciel que se trouve la clé du grand commencement.
Une clé dont l'existence fut posée... dès 1976. En analysant la composition de morceaux d'astéroïdes tombés sur Terre (->), une équipe de l'université de Californie détecte une abondance anormale de magnésium 26 (un isotope du magnésium dont le noyau est composé de 26 nucléons : 12 protons et 14 neutrons) et de nickel 60. Ces deux éléments chimiques sont le produit de la décomposition de deux isotopes radioactifs : respectivement, l'aluminium 26 et le fer 60. "Ces radioéléments sont présents dans le milieu interstellaire. Il est donc normal de les retrouver dans les météorites, qui sont des échantillons intacts de la nébuleuse qui a donné naissance au Soleil, précise Matthieu Gounelle. Mais là, il y en avait beaucoup trop"... Il fallait donc trouver une source d'aluminium 26 et de fer 60 qui aurait abreuvé le nuage dans lequel est né le Soleil.
Et c'est là qu'était le problème... Car l'aluminium 26 et le fer 60 naissent de réactions nucléaires au cour d'étoiles des dizaines de fois plus massives que le Soleil, mais ils ne peuvent se répandre dans l'espace que lorsqu'elles meurent en formant des supernovae, ces explosions monstrueuses qui émettent autant de lumière qu'une galaxie entière. Or, ces deux isotopes ont une durée de vie très courte : en 2,6 millions d'années, la moitié du fer 60 se transforme en nickel 60 ; tandis que 700.000 ans suffisent pour la désintégration de l'aluminium 26. "Il n'a pas le temps de se répandre qu'il est déjà décomposé, précise Matthieu Gounelle. Sa présence nous oblige à considérer que les deux phénomènes, l'explosion de l'étoile et l'effondrement du nuage de gaz et de poussières qui a donné naissance au Soleil, sont très proches dans le temps, et donc dans l'espace".

DES ÉVÈNEMENTS EN CASCADE : Sauf que les supernovae ont tendance à repousser les nuages de gaz sur des années-lumière. Suivant ce scénario, le Soleil devrait donc s'être formé à une distance très précise d'une étoile qui aurait une masse bien particulière... Bref, sa naissance serait due à une incroyable collusion d'événements, à une rarissime configuration astrale. Un problème pour les astronomes, qui préfèrent trouver des causes générales aux événements observés... et pour les exoplanétologues, qui doivent revoir à la baisse les possibilités de voir un système jumeau au nôtre se former (encadré).

DES JUMEAUX DU SYSTÈME SOLAIRE DANS TOUT L'UNIVERS
"C'est une preuve de plus que notre système solaire n'a rien d'unique
, réagit Franck Selsis, spécialiste des exoplanètes à l'université de Bordeaux, à la lecture du nouveau scénario de la naissance du Soleil. C'est donc une bonne nouvelle pour la recherche de vie extraterrestre". Une de plus ! Il faut dire que les exoplanétologues ne savaient que faire de l'ancien scénario et de cette improbable coincidence qui aurait enrichi notre système planétaire en aluminium 26 et en fer 60. Ces isotopes pourraient-ils être la clé de l'apparition de la vie ? Quelques travaux avaient cherché à répondre à la question, certains concluant que ces éléments radioactifs peuvent offrir une source d'énergie en se désintégrant et favoriser l'apparition d'une vie ; d'autres montrant que leur impact est négligeable, compte tenu de leur faible abondance... Désormais, ce débat va se faire moins vif, car une multitude de systèmes exoplanétaires pourraient, comme le nôtre, être nés d'un nuage d'aluminium 26 et de fer 60... "Il nous reste à calculer combien, précise Matthieu Gounelle. C'est l'une des tâches auxquelles je vais m'atteler dans les prochains mois. Mais c'est un phénomène courant, c'est une certitude".

"J'avais la conviction que ce mécanisme n'était pas crédible car jamais il n'avait pu être observé par un télescope, relate Matthieu Gounelle. Et en 2009, j'ai montré qu'il ne tient pas la route". Les modèles du cosmochimiste sont en effet formels : pour avoir la bonne teneur en aluminium 26, le Soleil devrait s'être formé à deux années-lumière d'une supernova, ce qui est impossible. En revanche, le chercheur s'aperçoit que le mécanisme fonctionne pour le fer 60. Ses modèles indiquent que non pas une, mais des dizaines d'étoiles massives pourraient, en explosant, disperser l'isotope du fer, et que celui-ci pourrait survivre assez longtemps pour atteindre une pouponnière stellaire. "C'est là que j'ai commencé à penser qu'il fallait considérer deux échelles : l'une pour le fer 60, l'autre pour le magnésium 26", explique-t-il. Autrement dit : le Soleil serait né d'une cascade d'événements plutôt que d'un cataclysme unique.
Cela tombe bien, cette idée d'une formation d'étoiles en cascade est dans l'air. Plus ils gagnent en précision, plus les télescopes montrent que les lents échanges de matière et d'énergie à l'échelle des grands nuages moléculaires s'accompagnant de phénomènes locaux et rapides dans de petits amas de gaz. "Restait à trouver le mécanisme à petite échelle susceptible d'expliquer le présence d'aluminium 26", ajoute Matthieu Gounelle.
Et justement, les spécialistes de l'évolution stellaire lui offrent la solution sur un plateau : ils ont découvert que les astres n'ont pas besoin de mourir pour répandre dans l'Univers des éléments chimiques radioactifs ! "Les observations du télescope spatial Integral ont capté une émission d'aluminium 26 en scrutant des étoiles massives, précise Georges Meynet. Elles semblent éjecter continuellement cet isotope sous la forme d'un vent".
Les pièces du puzzle s'emboîtent merveilleusement... Portés par leur élan, les deux chercheurs modélisent les gaz tourbillonnants des étoiles géantes. Ils simulent la synthèse des éléments chimiques en leur cour et la naissance de leur vent, et s'aperçoivent qu'il suffit d'une étoile plus massive que 30 masses solaires pour donner naissance à un Soleil changé en aluminium 26. "Cela marche remarquablement bien - et avec une multitude de paramètres différents, remarque Georges Meynet. Nous avons enfin un scénario général". "Et tous les processus dont nous avons besoin ont déjà été vus par les télescopes", ajoute, ravi, Matthieu Gounelle.

UN TIMING PARFAIT : Le cosmochimiste n'en doute plus, il tient l'histoire de la naissance du Soleil. Soit un mécanisme en quatre étapes, enclenché il y a 4,6 milliards d'années et mettant en jeu trois générations d'étoiles (->). Le genèse est écrite. Matthieu Gounelle a mis un point final à sa mythologie. Il a même baptisé la mère
du Soleil Coatlicue, en hommage à la déesse qui, selon les Aztèques, a engendré le Soleil.
A présent, il goûte l'accueil reçu par son histoire dans la communauté des astronomes. A mi-chemin entre un état de félicité paisible et une petite déprime post-partum, il reprend des travaux qu'il avait jusque-là relégués au second plan : pointer les similitudes entre comètes et astéroïdes ; relier composition du milieu interstellaire et nucléosynthèse stellaire... "Ce n'est pas évident, relate-t-il. J'ai répondu à une question que je me posais depuis quinze ans". Et quelle question ! Un an après que les planètes ont livré les secrets de leur formation, c'est la naissance du Soleil elle-même qui se dévoile. Un à un, les chapitres scientifiques du système solaire sont en train de se clore. Le timing est parfait : serait-il temps, en ce début de millénaire, de regarder au-delà de notre monde ?

M.F. - SCIENCE & VIE > Décembre > 2012

Naissance du Soleil : Enfin un Scénario convaincant

Les astronomes s'interrogent depuis plus de trente ans sur la présence dans le système solaire primitif d'aluminium 26, un composé radioactif aujourd'hui disparu. Selon des chercheurs français, il nous aurait été légué par une étoile massive en fin de vie, après une longue course hors de son berceau stellaire. De quoi établir un nouveau modèle de la naissance du Soleil... Observée par Hubble, cette étoile massive (en bleu, à d.) a fui son amas d'origine (à g.). C'est une déserteuse comme celle-ci qui aurait accouché du système solaire.

C'était il y a presque 5 milliards d'années. Filant seule à plus de 46.000 km/h dans l'espace interstellaire, une étoile géante, partie depuis 5 millions d'années de son amas d'origine, explose. L'onde de choc de cette "supernova" est si puissante qu'autour d'elle de gigantesques nuages de gaz s'effondrent sur eux-mêmes.

PRÉCIEUSES MÉTÉORITES : Réduite à une boule de neutrons hyperdense, elle poursuit sa route, moribonde. Mais sa mort n'aura pas été vaine. Car 300.000 ans plus tard, ces nuages effondrés et enrichis par toute la matière que la fuyarde a expulsée dans l'espace finiront par s'allumer... en étoiles. Et parmi ces étoiles, notre Soleil, et son cortège de planètes. Notre système solaire serait donc né de la mort d'une étoile de passage. C'est en tout cas le scénario que vient d'élaborer l'équipe d'astronomes français dirigée par Vincent Tatischeff, du Centre de spectrométrie nucléaire et de spectrométrie de masse (CSNSM), à Orsay (Essonne). Une histoire étonnante qui, si elle se confirme, ferait de notre étoile - et donc de nous-mêmes - une rareté dans l'Univers.
Les traces de cette histoire céleste, les chercheurs les ont retrouvées sur Terre, au sein des météorites. Certaines d'entre elles, les chondrites, gardent en effet la mémoire des débuts du système solaire, ayant emprisonné les premiers solides à s'y être formés, il y a environ 4,56 milliards d'années. Dans ces grains microscopiques, un composé en particulier ne cesse d'intriguer les astronomes depuis sa découverte, il y a plus de trente ans, dans la météorite Allende : le magnésium 26. Toutes les analyses réalisées depuis sur d'autres météorites arrivent à la même conclusion : cet élément a été produit par la désintégration radioactive de l'aluminium 26, aujourd'hui totalement disparu. Seulement voilà : comment expliquer qu'un élément dont la durée de vie est très courte (la moitié des atomes d'aluminium 26 avaient déjà disparu 720.000 ans après la formation du Soleil) était justement présent pile au début du système solaire ? Un vrai casse-tête. "Certains affirmaient que le Soleil, extrêmement agité à ses débuts, aurait irradié le disque protoplanétaire et créé rapidement l'aluminium 26, explique Vincent Tatischeff. Mais cette vision ne tient plus la route". Pour le prouver, nos chercheurs ont étudié à la loupe l'activité de toutes jeunes étoiles comparables à ce que devait être le jeune Soleil, évaluant la quantité d'aluminium qu'elles étaient capables de fabriquer par leurs bouffées de rayons X. Leur verdict est tombé : "Dans sa prime jeunesse, notre étoile n'était pas assez puissante pour produire le composé radioactif dans les quantités observées au sein des météorites. La seule solution possible est que l'aluminium ait été apporté juste avant la naissance du Soleil par une source extérieure, proche de lui : une étoile massive en fin de vie, la seule capable de synthétiser cet élément dans de grandes proportions". D'où l'héroïne du scénario élaboré par Vincent Tatischeff, cette fameuse étoile massive explosant en supernova, et présidant à la naissance du système solaire. Cette découverte de taille pourrait bien être l'épilogue d'un long débat qui fait rage parmi les astronomes depuis plus de trente ans : le système solaire est-il né de façon "autonome", ou bien aux côtés d'une supernova ?

THÉORIES SANS CESSE RÉFUTÉES : Reprenons depuis le début. Tout commence en 1976, avec, on l'a vu, la découverte de l'aluminium 26 dans la météorite Allende. Certains astronomes soupçonnent déjà une étoile d'avoir explosé à proximité du berceau du Soleil, enrichissant d'une multitude d'éléments (dont l'aluminium 26) la nébuleuse de gaz qui, en se contractant, allait donner naissance à notre étoile. Plus incroyable encore : l'onde de choc de l'explosion aurait été le déclencheur même de la formation du Soleil. Car en comprimant la matière de la nébuleuse, elle l'aurait fait s'effondrer sur elle-même. Mais l'idée est loin de faire l'unanimité, "d'abord parce qu'on s'est aperçu que l'immense majorité des étoiles ne naissaient pas aux abords d'une supernova, explique Thierry Montmerle, de l'Institut d'astrophysique de Paris. Et puis on a constaté qu'une étoile massive n'éjectait pas de l'aluminium 26 seulement lors de son explosion, mais tout au long de sa vie, et notamment au cours d'une phase particulièrement active, baptisée 'Wolf Rayet', qui précède la supernova". Une nouvelle découverte relance le débat en 1988 : la présence, dans plusieurs météorites, de descendants d'un autre élément radioactif, le fer 60. Cette fois, les scientifiques en sont persuadés : de par sa structure atomique, le fer 60 n'a pu être produit qu'au cours d'un phénomène violent. Et revoilà la supernova. Cependant, un autre problème surgit : les simulations montrent que la matière éjectée par l'étoile géante s'incorpore difficilement au berceau de gaz d'une étoile. Impossible, donc, d'expliquer par ce biais la quantité d'éléments radioactifs présents dans le système solaire naissant. Les astronomes imaginent alors une fécondation du système solaire... juste après sa naissance. Hélas, l'idée ne tient pas non plus. "Il faudrait que la supernova ait explosé très près du Soleil, à une année-lumière environ, précise Vincent Tatischeff. Et dans ce cas, le disque protoplanétaire du Soleil aurait été évaporé par le fort rayonnement ultraviolet de l'étoile avant qu'elle n'explose". Les planètes auraient été ainsi tuées dans l'ouf.
Qu'à cela ne tienne : certains astronomes imaginent non plus une, mais plusieurs supernovae à l'origine du Soleil. Et cette fois, elles restent à distance. En explosant les unes après les autres, elles enrichissent progressivement de leur matière le berceau de notre étoile, et compriment au passage par leurs ondes de choc le gaz interstellaire qui finit par s'écrouler sur lui-même. "Mais ce scénario présente une faille, juge Vincent Tatischeff. Dans l'amas où se trouvent ces supernovae, il y a environ un millier de membres. Rapidement, l'activité conjuguée de tous ces astres crée une gigantesque bulle de gaz chaud d'une centaine d'années-lumière de rayon, dans laquelle aucune nouvelle étoile ne peut voir le jour. Le Soleil n'a donc pu apparaître qu'au-delà de cette frontière, dans le milieu interstellaire froid. Le fer 60, avec une durée de vie relativement longue (2,5 millions d'années), a eu le temps d'arriver dans cette région, mais pas l'aluminium 26, à la durée de vie bien trop courte pour être transporté sur une centaine d'années-lumière !"

ALUMINIUM EMBARQUÉ : C'est pour résoudre ce dernier paradoxe que Vincent Tatischeff a élaboré son nouveau modèle de l'étoile "fugueuse". Pour lui, si l'aluminium n'a pas pu faire le voyage, c'est qu'une étoile l'a fait... à sa place. Une étoile qui s'est enfuie de l'amas juste après sa naissance. L'idée n'est pas farfelue : on connaît des exemples de telles étoiles vagabondes dans notre galaxie. Des astres, pensent les astronomes, éjectés de leur groupe soit par l'explosion d'une étoile voisine, soit à la suite d'un passage serré aux abords d'un comparse, qui a fait office "d'effet de fronde" (l'étoile étant attirée, puis déviée et propulsée à toute allure). La suite de l'histoire est une succession d'événements très précis. Après une course effrénée de 4 millions d'années, la fuyarde sort enfin de l'énorme bulle chaude évoquée plus haut. Devenue une étoile de "Wolf-Rayet", elle se met alors à éjecter de grandes quantités de gaz riche en aluminium dans le milieu interstellaire. L'élément radioactif n'a aucun mal à se mélanger à la nébuleuse, car du fait de la grande vitesse de l'étoile, il se crée à l'avant de l'astre une zone turbulente où toute la matière est remuée. Puis c'est l'explosion en supernova, qui finit le travail, si l'on peut dire : elle ensemence le milieu d'autres constituants (dont le fer 60), tout en provoquant l'effondrement du nuage de gaz.
Complet, ce nouveau modèle de la naissance du Soleil est particulièrement convaincant. Car pour la première fois, un scénario parvient à expliquer la présence de l'aluminium dans le système solaire primitif. Et ce, sans qu'aucune observation ne vienne le contredire. Seule critique formulée par ses opposants : la probabilité d'un tel scénario serait trop faible pour qu'il ait eu lieu. Mais Vincent Tatischeff ne se démonte pas. "Dans notre galaxie, on recense moins d'un millier de ces étoiles Wolf-Rayet. Et parmi elles, on estime que 20 % ont fugué de leur amas d'origine. Certes, cela constitue un événement rare, mais pas du toutexceptionnel".
Pour aller plus loin, nos chercheurs confronteront bientôt leur hypothèse à un autre élément radioactif et à la durée de vie plus courte encore, le béryllium 10, que l'on retrouve aussi dans les météorites. Si leur scénario se confirme, cela voudrait dire que le système solaire est un des rares à avoir hébergé des éléments radioactifs très tôt dans son histoire. Certains astronomes affirment même que la présence de ces éléments y aurait joué un rôle fondamental dans le développement de la vie. Source de chaleur intense, ils auraient fortement chauffé les embryons de planètes, qui auraient alors perdu une partie de leur eau. Et conduit à des planètes constituées à la fois d'océans et de continents, et non pas à des mondes recouverts uniquement d'eau comme on pense qu'il en existe autour d'autres étoiles. Plusieurs millions d'années avant l'apparition du Soleil et de ses planètes, une étoile vagabonde avait peut-être scellé notre destin.

QUAND L'ÉTOILE SOLAIRE AVAIT DE NOMBREUSES VOISINES
A sa naissance, le Soleil n'était pas seul, mais entouré de centaines d'étoiles serrées les unes contre les autres. Comment les astronomes le savent-ils ? D'abord parce que la grande majorité (90 %) des étoiles de type solaire observées apparaissent dans des amas de 100 étoiles ou plus. Preuve plus directe : la présence dans le système solaire d'objets découverts au-delà de Pluton, comme Sedna, possédant des orbites très elliptiques. Ils se seraient formés bien plus près du Soleil qu'ils ne le sont actuellement, avant d'être perturbés par une de ces étoiles voisines. Dernier argument en date : les comètes provenant de la lointaine périphérie du système solaire, le nuage de Oort. Les modèles montrent que ce nuage est composé de plus de comètes que le disque protoplanétaire n'a pu en produire. Grâce à des simulations numériques, des chercheurs ont établi que la plupart de ces comètes étaient d'origine extrasolaire. Notre étoile les aurait volées à ses voisines, quand elles étaient encore proches. Et aujourd'hui, où sont-elles ? Personne ne peut le dire : chacune est partie de son côté de façon chaotique, quand le gaz de la nébuleuse qui les maintenait s'est dissipé.

J.B. - SCIENCE & VIE > Septembre > 2010
 

   
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