P L A N È T E  G A Ï A 
 
   
   
 Index ASTRONOMIE -> EXOPLANÈTES - Exobiologie 
   
 
Vie Extraterrestre : la Chasse est Ouverte

À la Recherche de la Vie Extraterrestre

F.B. - ÇA M'INTÉRESSE N°472 > Juin > 2020

Communication avec les Extraterrestres : C'est Parti




B.R. - SCIENCE & VIE N°1222 > Juillet > 2019

Où en est la Quête d'un Signal Extraterrestre ?

S.B. - SCIENCE & VIE Questions N°32 > Mars-Mai > 2019

Nous ne Sommes pas Seuls dans l'Univers




J.S. - NATIONAL GEOGRAPHIC N°234 > Mars > 2019

Recherche Extraterrestres Passionnément

F.D. - SCIENCES ET AVENIR N°865 > Mars > 2019

Vie Extraterrestre : la Chasse est Ouverte

Le rêve de dénicher de la vie ailleurs est enfin à portée de main. Parce que des exoplanètes sont bel et bien rocheuses. Et qu'y repérer des traces de vie est désormais possible via des bio-marqueurs bien identifiés. De quoi lancer le compte à rebours...

Barcelone, la 14 septembre 2009. Le musée des Sciences de Barcelone est fermé au public, mais une population inhabituelle peuple ses allées... Plus de 200 astrophysiciens s'engouffrent dans le grand amphithéatre. Spécialistes de la détection, de la simulation, du climat, de l'exobiologie, responsables d'agences spatiales... un seul et même sujet lie tous ces chercheurs : les exoplanètes. L'objectif de la conférence : "la recherche de la vie sur une exoplanète est notre but ! Il nous faut réfléchir ensemble aux étapes nécessaires pour l'atteindre", scande James Kasting, chercheur à la Penn State University, USA. Car ce rêve qui, depuis Epicure, anime l'humanité est en passe d'être atteint. Dans deux jours, tous le savent, la détection de la première planète rocheuse sera rendue publique.
Pourtant, la découverte de Corot 7b ne date pas d'hier. C'est en février 2009 que cette petite planète, orbitant autour d'une étoile banale de la constellation de la Licorne, nommée TYC 4799-1733-1, a été détectée par Didier Queloz, chercheur à l'Observatoire de Genève, et son équipe. Grâce à la baisse de luminosité que la planète engendre en passant devant - son transit -, les chercheurs ont pu calculer le diamètre de Corot 7b, via le télescope spatial Corot : seulement 1,7 fois celui de la Terre. Elle est donc la plus petite exoplanète jamais détectée ! Un record qui suscitait un espoir : prouver qu'il s'agissait de la première planète rocheuse trouvée hors de notre système solaire. Pour cela, il fallait déterminer la masse et, par conséquent, la densité de Corot 7b. L'équipe a donc employé les grands moyens : le spectrographe Harps de l'Observatoire de La Silla au Chili. Elle a mesuré les infimes mouvements de l'étoile et en a déduit la masse de sa planète : cinq fois la masse de la Terre. Sachant que Corot 7b est plus grande que la Terre, le calcul indique une densité de 5,6 g/cm³. Or, celle de la Terre est de 5,52 g/cm³. Plus aucun doute possible : il s'agit bien d'une rocheuse, et non d'une gazeuse. En un mot, d'une autre Terre !
À la joie de cette découverte, une déception a hélas succédé : impossible que Corot 7b puisse abriter la vie. Car cette planète cumule une autre distinction : celle de l'exoplanète connue la plus proche de son étoile. Elle ne vogue qu'à 2,5 millions de kilomètres de Corot 7b, soit 23 fois plus près que Mercure ne l'est du Soleil. À sa surface règnent donc des conditions insoutenables : plus de 2000°C sur sa face éclairée et -200°C du côté nuit. "Un enfer !", résume Didier Queloz.
Mais alors, rien de neuf ? Si... Car parmi les 407 exoplanètes découvertes à ce jour, dont la plupart sont des géantes gazeuses, les chercheurs s'interrogeaient sur les planètes décrites comme intermédiaires entre la Terre et Neptune, c'est-à-dire d'une masse comprise entre 5 et 10 fois celle de notre planète : les super-Terre, dont Corot 7b fait partie. "Tout l'enjeu était de savoir si elles étaient rocheuses ou non... précise Didier Queloz. Désormais, on peut trancher : Corot 7b est rocheuse et il est logique de conclure de la même manière pour les autres corps aux dimensions comparables. Pourquoi seraient-ils différents ? Tous sont des Terre !" Du coup, les chercheurs disposent désormais d'une quinzaine d'objets à inspecter qui promettent de ressembler un peu à notre planète bleue. Et les astronomes de commencer leurs prévisions : "On estime que les systèmes planétaires sont peuplés à 30 % de super-Terre, précise Didier Queloz. Reste à procéder aux évaluations pour les planètes de la masse de la Terre..."

L'EAU, MAIS SOUS FORME LIQUIDE

De là à envisager d'y rechercher la vie, il n'y a qu'un pas, allègrement franchi dans l'amphithéâtre catalan. "Nous ensommes à l'ère de la collection de timbres. Maintenant, toutenouvelle exoplanète n'est qu'une découverte de plus, analyse Jean-Philippe Beaulieu, chercheur à l'Institut d'astrophysique de Paris (IAP). Le nouveau défi, c'est bien la recherche de lavie." D'ailleurs, comme pour lui donner raison, pas moins de 32 exoplanètes viennent d'être découvertes grâce au spectrographe Harps (<-) par Stéphane Udry, chercheur à l'université de Genève, dont plusieurs super-Terre. Leur étude devrait prendre des mois... Parmi elles se cache peut-être une candidate idéale : une planète rocheuse qui se trouve à bonne distance de son étoile pour qu'elle abrite de l'eau liquide, c'est-à-dire dans la zone dite d'habitabilité (->). Au-delà, la glace règne en maître. En deçà, la chaleur est trop intense pour que la vapeur d'eau présente dans l'atmosphère puisse se condenser. Car les exposés s'enchaînent... le message demeure : l'eau liquide est LA première condition à la naissance de la vie... telle qu'on la connaît - car faute de véritables indices sur ce que pourrait être une autre forme de vie que la nôtre, les exobiologistes traquent la vie terrestre, et aucune autre. Non seulement ce solvant miraculeux dissocie les molécules dans le cytoplasme des cellules, favorisant ainsi la création de nouvelles espèces, mais il sert aussi à véhiculer les nutriments, évacuer les déchets, réguler la température... "La vie sans eau est difficile à imaginer, résume François Forget, chercheur au Laboratoire de météorologie dynamique de l'université Paris-VI. A contrario, sur Terre, il y a de la vie quasiment partout où il y a de l'eau. Dans une simple gouttelette, à haute température, en milieu acide..." La bonne candidate devra donc être non seulement de la bonne taille, mais aussi à la bonne place... Et les chercheurs en ont déjà une sous le coude : Gliese 581 b, située pile au bon endroit ! En effet, même si elle orbite quatre fois plus près de son étoile que la Terre du Soleil, à 0,25 unité astronomique de son étoile ! Problème, les premières évaluations de sa masse la placent à la limite supérieure des super-Terre, autour de 10 masses terrestres : à huit masses terrestres. Des mesures plus complètes comme celles effectuées sur Corot 7b seraient bienvenues, mais il y a un hic : Gliese 581 b ne transitant pas, on ne peut détenniner sa densité ni, par conséquent, sa composition. Il faudra donc attendre l'envol de nouveaux télescopes spatiaux pour l'analyser. Et quand bien même les astronomes sauraient de quoi elle est composée, comment faire pour d étecter la vie à des dizaines d'années lumières de distance ?
Pour réponclre à cette question cruciale, les chercheurs ont pris le problème à l'envers. Dès la mission Voyager en 1989, puis les sondes Galileo, Mars Express, Messenger, ils se sont mis à la place d'un... extraterrestre observant la Terre. Au total, dix sondes destinées à l'exploration du système solaire se sont un jour retournées vers la planète bleue pour l'observer sous toutes les longueurs d'ondes.
Car le rayonnement qu'elle émet ou réfléchit passe par son atmosphère et une partie reste piégée au passage par les gaz qui la composent... Etudier les "absents" du spectre lumineux terrestre, c'est reconstituer la composition de son atmosphère et dresser, en creux, la liste des traceurs du vivant. Dioxyde de carbone, vapeur d'eau, ozone, méthane, gaz technologiques comme les flurorocarbones... autant de composés qui ont été détectés depuis l'espace et qui ne s'expliquent pas sans vie. Si un chimiste extraterrestre observait la Terre, et s'il avait des cheveux, il se les arracherait ! Car la vie a profondément modifié l'atmosphère terrestre. Les chimistes ont essayé de retrouver, avec des modèles, sa composition sans la contribution de la vie. Impossible ! "C'est la première preuve qu'une télédétection de la vie est possible !", assure Vincent Coudé du Foresto, de l'Observatoire de Paris. "Quand on y réfléchit, c'est un hasard extraordinaire, renchérit Alain Léger, chercheur à l'Institut d'astrophysique spatiale. Car finalement, qu'est-ce que la vie ? Quelque chose qui contient de l'information, qui est capable de se répliquer et qui est capable d'évoluer... Impossible de détecter à distance ces paramètres. Mais sur notre planète, les modifications de l'atmosphère dues à la vie sont détectables à distance."

PLUSIEURS PISTES DE DÉTECTION

Sur le grand écran de l'amphithéâtre barcelonais, les spectres donnant la composition de l'atmosphère terrestre se succèdent. Une série de molécules qui, si elles étaient détectées dans l'atmosphère d'une planète, signeraient la vie : les bio-marqueurs. Par quoi commencer ? Les gaz technologiques ? Non, leur concentration est trop faible et il est impossible d'envisager de détecter leur présence sur une exoplanète à des dizaines d'années-lumière. Seuls les composants majoritaires de l'atmosphère pourront être captés. Le méthane ? Si, sur Terre, il est bien produit par la vie, il peut aussi provenir de l'activité géothermique d'une planète et ne saurait donc constituer à lui seul une preuve de la présence de la vie. "Ce qui n'empêche que nous allons chercher à le détecter, précise Luc Arnold de l'Observatoire de Haute-Provence. Car cette molécule s'oxyde très rapidement pour former de l'eau et du dioxyde de carbone. La présence simultanée d'oxygène et de méthane est donc une anomalie bel et bien due à la vie." Autre possibilité : détecter la végétation. Sa couleur verte ne peut être due qu'à la vie. Les chercheurs ont en effet observé que dans une gamme de longueurs d'ondes précise, à la limite de l'infrarouge et du visible, on pouvait détecter la signature spectrale de la végétation : "À 650 nanomètres, les pigments photosynthétiques réfléchissent plusieurs dizaines de % et la végétation apparaît donc en blanc, tandis qu'à 700 nanomètres, ils absorbent la quasi-totalité de la lumière et la végétation apparaît en noir", explique Luc Arnold. Pour savoir si cette signature serait détectable à distance, le chercheur et son équipe ont analysé le spectre de la lumière terrestre... réfléchie par la Lune. "La signature est bien là, mais elle est très faible et il reste à savoir si on pourra la détecter sur une exo-Terre..."

UNE GRANDE MISSION SPATIALE

Un candidat plus évident, l'oxygène, a bien été identifié comme un bio-marqueur car son niveau est artificiellement maintenu par la photosynthèse. Si la vie s'éteignait, ce gaz disparaîtrait en quelques millions d'années, consommé par les réactions d'oxydation. "On peut essayer de détecter l'oxygène... ou son marqueur : l'ozone. Car la photodissociation du dioxygène par le rayonnement UV conduit inévitablement à la production d'ozone, précise Franck Selsis du Laboratoire d'astrophysique de Bordeaux. Mais ce n'est pas si simple : qu'il s'agisse d'ozone ou d'oxygène, la détection de ces seules molécules sur une exo-Terre ne pourra suffire." "Le rayonnement UV peut casser les molécules d'eau présentes dans la couche supérieure d'une atmosphère : l'hydrogène, léger s'échappe alors vers l'espace et reste l'oxygène", ajoute-t-il !
Modélisant la formation des différents composants, les chercheurs en sont finalement arrivés à une conclusion : le seul marqueur solide de la présence de vie est en fait un trio gagnant composé d'oxygène, de dioxyde de carbone et de vapeur d'eau. "Aucune simulation n'a réussi à trouver des mécanismes chimiques qui, sans faire intervenir la vie, prédisent la présence simultanée de ces trois molécules dans une atmosphère", précise Franck Selsis. "Si on trouve les trois, alors, on aura mis en évidence de la photosynthèse, ajoute Alain Léger. Un phénomène dont on est convaincu qu'il découle d'une évolution biologique... et donc qu'il signe la vie."
Savoir reconnaître à coup sûr la vie où qu'elle puisse se trouver dans l'espace : voilà l'ultime pièce du puzzle qui ouvre aujourd'hui la voie à la détection de la vie extraterrestre. Et dès à présent, les chercheurs font leurs armes sur les géantes qui transitent autour de leur étoile. "Plus grosses, dotées d'une atmosphère très étendue, elles sont plus faciles à étudier", précise Giovanna Tinetti, de l'University College de Londres. Les mesures ont déjà porté leurs fruits : en 2007, l'équipe a découvert de l'eau sur les exoplanètes HD189733b et HD209458b. En 2008 du méthane, il y a quelques mois du dioxyde de carbone (->).
"Il y a d'autres molécules en stock", assure Jean-Philippe Beaulieu qui participe aux recherches à l'IAP. Ces mesures sont des amuse-gueules, une étape indispensable avant de s'attaquer au plat principal : le lancement, dans les 20 ans qui viennent, d'une grande mission spatiale traquant les molécules de la vie. "Cela peut paraître désespérant de chercher des bio-marqueurs sur des géantes gazeuses, de toute façon stériles... Mais nous affûtons les instruments, précisons nos modèles", ajoute Giovanna Tinetti. Sachant que la mission est déjà plus que délicate ! "Caractériser l'atmosphère revient à détecter une variation de 0,01 %. On mesure sur 1 mètre de longueur avec la précision d'une feuille de papier à cigarette, prévient Philippe Beaulieu. Il faut préparer l'expérience et ne pas se précipiter... Sinon, le risque de se tromper sera trop grand."

"UNE AFFAIRE DE 20-25 ANS"

Tel est d'ailleurs le message qui, en conclusion, revenait à la conférence de Barcelone : "Si près du but, soyons prudents." Une retenue bien scientifique, qui est finalement comme le signe d'un optimisme général. Un petit sondage réalisé à la pause-café, entre deux conférences, le confirme d'ailleurs : tous sont d'accord. La quête de la vie extraterrestre est lancée. Non, il ne s'agit pas d'un rêve. Oui, ils ont une chance inouïe de vivre cette époque : "Pour la première fois, nous sommes en possibilité de répondre. C'est juste une question d'envie ! J'ai l'intuition que d'ici vingt à quarante ans, ce sera fait !", s'enflamme Alain Léger. "Cela n'est plus de la philosophie... c'est réaliste !", renchérit Anthony Boccaletti de l'Observatoire de Paris. "Trouver des bio-marqueurs, c'est une affaire de vingt à vingt-cinq ans", prédit même Vincent Coudé du Foresto. Mais pourra-t-on alors conclure à l'existence d'une vie extraterrestre ? "Il faudra être prudent, tempère François Forget. Une découverte extraordinaire demande des preuves extraordinaires !" Et des moyens sortant de l'ordinaire. Car pour l'heure, le premier objectif est de concevoir des missions spatiales à la hauteur de l'enjeu. Les chercheurs y travaillent... il leur reste à convaincre les agences de se lancer elles aussi, à coup de milliards d'euros, dans la quête.

LES EXOPLANÈTES VONT-ELLES SAUVER SETI ?

"Si on trouve des traces de vie sur une exoplanète, Seti sera complètement relancé !", assure Alain Léger, chercheur à l'Institut d'astrophysique spatiale. Voilà qui ne serait pas du luxe car cinquante ans après son lancement, le programme Seti (Search for Extraterrestrial Intelligence, recherche d'intelligence extraterrestre), dont le but est de capter les signaux radioélectriques émis par une éventuelle civilisation extraterrestre, semble dans une impasse. Pourtant, l'idée paraissait excellente car les ondes radio sont capables de traverser la Galaxie sans jamais être absorbées par les gaz ou les poussières interstellaires. Mais seules des fausses alertes ont, jusqu'ici, fait vibrer les antennes des détecteurs, à commencer par le plus grand radiotélescope du monde, l'antenne géante d'Arecibo (Porto Rico). Et ce, même avec l'aide de Seti@Home. Lancé en 1999, ce programme informatique a permis à des millions d'internautes de partager la puissance de calcul de leurs ordinateurs afin de traiter les données transmises par les radiotélescopes. Rien... Aucun bip extraterrestre. "D'un autre côté, tempère Alain Léger, si la Terre abrite la vie depuis des milliards d'années, elle n'émet des signaux radioélectriques que depuis cinquante ans !"

M.F. - SCIENCE & VIE > Décembre > 2009

Mission : repérer la "Vie Ailleurs"

Pour détecter la présence de vie extraterrestre, trois types de projets ont été élaborés, complémentaires les uns des autres. Or, une seule mission devrait voir le jour. Un choix cornélien.

"L'imagerie directe d'exo-Terre ne sera bientôt plus un rêve !", assure Raffaele Gratton, de l'observatoire de Padoue. De fait, le satellite Corot, inauguré fin 2006, ne devrait pas tarder à découvrir d'inédites exoplanètes rocheuses ; Kepler, lancé en mars 2009, a été conçu pour apporter son lot à la moisson. Surtout, la mission Plato, à l'étude à l'Agence spatiale européenne (ESA), est attendue avec impatience : "Corot observe 4 degrés carrés du ciel, Kepler en balayera 100 et... Plato 3600 ! De plus, il sera spécifiquement dédié à la détection de planètes terrestres", précise Claude Catala, astrophysicien à l'Observatoire de Paris, et qui participe au projet.
Et ensuite ? Cap sur la détection de la vie extraterrestre ! C'est-à-dire l'analyse de l'atmosphère des exoplanètes, dans l'espoir de capter le signal d'un trio de marqueurs de la vie : oxygène, dioxyde de carbone et vapeur d'eau. Un exploit exclu depuis le sol. Et pour cause : "Les pics d'absorption que l'on cherche sont précisément ceux de l'atmosphère terrestre. Du sol, nous ne verrions donc rien !", explique Vincent Coudé du Foresto, de l'Observatoire de Paris.

UNE AFFAIRE DE BUDGET

En clair : impossible de se passer d'un télescope spatial. Ce qui implique un budget bien supérieur au milliard d'euros. Hubble, le plus ancien, a, en vingt ans d'utilisation, coûté 4 milliards de dollars ! Or, l'âge d'or de l'exploration spatiale paraît bien loin. L'heure est à la rigueur, et les agences spatiales serrent leur budget. Pour les astrophysiciens, cela signifie qu'ils vont devoir choisir un et un seul instrument, faute d'avoir les moyens de financer deux missions. Problème : ils ont imaginé au moins trois concepts de missions spectaculaires, chacun porté par une partie de la communauté. Pis, tous ces projets sont complémentaires et aucun ne peut se targuer d'être, à lui seul, la panacée...

Concrètement, ces projets s'appuient sur deux techniques d'observation - la coronographie et l'interférométrie - qui donnent chacune accès à une gamme de longueurs d'onde : le rayonnement visible (autour de 0,5 micromètre) pour la première et, pour la seconde, l'infrarouge (autour de 10 micromètres). Or, "la résolution d'un télescope répond à une équation simple : la longueur d'onde de la lumière observée divisée par la taille du miroir, précise Anthony Boccaletti, qui travaille sur la technique à l'Observatoire de Paris. Dès lors, le calcul est vite fait : pour observer une exo-Terre dans l'infrarouge, il faut un télescope de... 50 mètres !" Financièrement irréaliste. Mais les chercheurs ont trouvé une ruse : en envoyant une flottille de quatre engins de 2 m distants de 50 m, ils sont en mesure de simuler un télescope de 50 m ! C'est le principe de l'interférométrie (infographie ->).

Rien de tel pour observer dans le visible. Ici, la longueur d'onde étant dix fois moindre, la taille du miroir peut être réduite d'autant. Les chercheurs envisagent même possible un classique télescope de "seulement" 4 m... en masquant la lumière de l'étoile avec la technique de la coronographie. Dans cette perspective, deux concepts rivalisent : un télescope dont l'optique est dotée d'un masque (à d. ci-dessous) et un instrument classique accompagné d'un occulteur cachant le rayonnement de l'étoile... exactement comme lors d'une éclipse naturelle (à g. ci-dessous).

   

INFRAROUGE OU VISIBLE ?

Derrière ces projets, ce sont finalement deux grandes familles qui s'opposent : "les 'infrarougistes' défendent l'interférométrie, tandis que les 'visiblistes' plaident pour la coronographie", analyse Olivier Absil, de l'Institut d'astrophysique de Liège. Chacun des deux domaines du spectre lumineux donne accès à son lot de bio-marqueurs : dioxygène, vapeur d'eau et chlorophylle dans le visible ; ozone, vapeur d'eau, dioxyde de carbone et méthane dans l'infrarouge... Difficile de trancher entre les deux, d'autant que les avis varient selon les chercheurs.
"L'infrarouge est le domaine des gaz à effet de serre, argumente Franck Selsis, du Laboratoire d'astrophysique de Bordeaux. Du coup, aussi exotique soit la composition de l'atmosphère, les gaz détectés ont un rôle climatique important. C'est une assurance de pouvoir recueillir des informations, même si l'exoplanète que l'on observe s'éloigne de notre modèle terrestre." Autre argument en faveur des infrarougistes : les signatures des constituants atmosphériques sont plus larges et, donc, détectables à basse résolution.
D'un autre côté, le visible a l'avantage d'offrir une signature de la vapeur d'eau plus facile à détecter et donnera des informations complémentaires à l'analyse de l'atmosphère comme l'albédo, la lumière de l'étoile réfléchie par la surface de l'exoplanète, qui pourrait renseigner sur la présence de continents, voire de chlorophylle. "Et rien ne dit que techniquement, les instruments de coronographie, classique ou avec occulteur, n'arriveront pas à compenser l'étroitesse des raies dans le visible...", ajoute Anthony Boccaletti.
Réunis en congrès à Barcelone en septembre, les chercheurs n'ont pas encore tranché entre tous ces projets. Mais pour voir décoller le premier instrument de cette nouvelle catégorie en 2025 comme ils l'espèrent, ils ont un plan : tout miser sur une première mission. Laquelle ? "Les trois concepts sont explorés en parallèle. Nous choisirons celui qui sera le plus mature et nous verrons, conclut Vincent Coudé du Foresto. Nous allons faire des découvertes, avoir des surprises... et alors, les budgets afflueront !" On a hâte.

M.F. - SCIENCE & VIE > Décembre > 2009

 

   
 C.S. - Maréva Inc. © 2000 
 charlyjo@laposte.net