Les Martiens existent bel et bien. Et ils seraient un milliard. Mais pas de panique : il ne s'agit que de bactéries... terrestres, échouées là par la faute des diverses missions envoyés sur la planète rouge. Oui, mais cette contamination pose problème. Que va devenir cette "vie" martienne ? Et quid d'une éventuelle vie extraterrestre ?
La planète rouge a gagné son statut de planète habitable ! Car les échantillons récoltés par Curiosity sont formels : il a régné sur Mars des conditions propices à la vie. Reste à savoir si celle-ci a émergé... 1/ Curiosity a creusé un trou de 25 cm de largeur sur 6,4 de profondeur dans le sol de Mars (->)... 2/ Révélant sous son écorse sanguine le gris de la magnétite, dont la présence signe l'habitabilité passée de la planète. Pour la première fois, on a creusé dans le sol de Mars. Le 8 février dernier, le rover Curiosity perçait sa surface rocailleuse et en extrayait un précieux échantillon. Quelques semaines et moult analyses plus tard, la Nasa annonçait que la planète avait été habitable par le passé. Les conditions nécessaires à l'émergence de la vie semblent en effet avoir été réunies au même endroit au même moment... bien qu'on ne sache pas quand précisément, si elle a effectivement émergé. UNE SORTE DE PARADIS... Le robot à effectué le forage dans Yelloknife Bay, one zone à l'écart de son chemin vers le Mont Sharp, la montagne de 5500 m, au centre du cratère Gale, qu'il doit atteindre cet été. Bonne pioche. Il y a découvert que, par le passé, les différents critères d'habitabilité y avaient été réunis : de l'eau liquide non acide et des couples oxydo-réducteurs pouvant servir au développement d'hypothétiques micro-organismes. Sous son écorce, la planète rouge est... grise. Car l'élément fer passe de sa forme oxydée, l'hématite (d'où la couleur orange de la surface) à de la magnétite. "Contrairement à l'hématite, celle-ci peut servir de source d'énergie des micro-organismes, explique Frances Westall, du Centre de biologie moléculaire d'Orléans. Elle pourrait aussi avoir été fabriquée par du vivant, bien qu'on n'en ait aucune preuve à l'heure actuelle. Dans les deux cas, sa présence est de bon augure quant à la possibilité qu'une vie ait pu s'y développer par le passé".
C'est l'histoire d'un cafouillage. Un ultime réglage a rompu la stérilité du rover réputé le plus propre jamais envoyé dans l'espace. Et ce sont toutes les découvertes dont il pourrait être porteur qui se trouveront entachées par la présence possible de nouvelles bactéries terrestres ! Curiosity avait été mal stérilisé... et qu'il pourrait déposer sur Mars des bactéries capables de résister aux conditions extrêmes qui y règnent telles que Streptomyos bacteria (à g.) ou Bacilus subtilis (à dr.). En 2006 (voir article plus bas), Science & Vie le révélait en couverture : Pathfinder, Viking, Opportunity... Les dix sondes entrées en contact avec la planète rouge y ont déposé des milliers de bactéries terrestres. Une contamination qui pourrait avoir un impact sur l'environnement de Mars et brouiller les cartes de la recherche de la vie extraterrestre. Curiosity, qui promettait d'être le robot le plus propre jamais envoyé dans l'espace, n'a pas fait exception... Son doigt a mal été stérilisé ! UNE MISSION DÉCLASSIFIÉE En août 2011, deux mois avant le lancement de la sonde, les responsables de la mission ont en effet sorti de son étui l'une des trois mèches qui devait être utilisée pour forer le sol martien et l'ont armée sur le bras du robot. "En faisant cela, ils augmentaient leurs chances de réussir un forage, mais ils rompaient la stérilité des forets, l'un des éléments du rover le plus en contact avec le sol, précise Cassie Conley, responsable de la protection planétaire à la Nasa. Quand on l'a su, il était trop tard pour le restériliser".
Les martiens existent. Ils s'appellent Bacillus licheniformis, Bacilluscerus cerus ou Lactobacillus brevis. Si ces noms vous semblent familiers, c'est normal : ces bactéries viennent de la Terre. Elles ont voyagé sur le dos des sondes envoyées sur la planète rouge, depuis 1971. Un exploit, car les conditions de ses 11 allers simples étaient épouvantables. Les bactéries ont dû endurer dans le vide spatial la déshydratation, le froid, les ultraviolets et les particules chargées bombardées par le soleil... La plupart n'en ont pas réchappé. Mais une minorité de bactéries sont capables de se munir d'un bouclier contre ces agressions. Soumis à un stress, elles fabriquent une spore, sorte de minicellule dont l'enveloppe est ultra-résistante, qui possède tout leur arsenal génétique. Elles peuvent ainsi patienter des centaines, des milliers, voire des millions d'années dans d'effroyables conditions, puis revenir à la vie quand l'environnement se fait plus clément.
Deux scientifiques français ont établi un modèle pour mieux comprendre l'atmosphère de Mars. Hélas, leurs conclusions vont à l'encontre d'une possibilité de vie martienne : le méthane, qui contient du carbone, y est décomposé en 200 jours à peine par des éléments chimiques très agressifs ! Ainsi, toute forme de vie à base de carbone semble impossible.
Certaines des bactéries apportées sur Mars par les sondes d'exploration pourraient bien survivre. Comment va évoluer cette vie venue de la Terre ? Les responsables des agences spatiales ne peuvent que le reconnaitre, ils se sont trompés. Non, la planète Mars n'est pas aussi inhospitalière que ce qu ils avaient imaginé. Eh oui, il existe sur Terre des formes de vie capables de supporter des conditions bien plus extrêmes qu'ils ne le pensaient. Au point (que certaines d'entre elles pourraient parfaitement survivre sur la planète rouge ? Oui. Et c'est même désormais une certitude : des bactéries terrestres reposent sur le sol martien. Des bactéries directement importées de la planète Terre via les différentes missions exploratoires conduites à la surface de Mars. Une sacrée bourde, dont ils s'inquiètent. Car ces bactéries peuvent parfaitement survivre durablement sur la planète Mars. Certes, il est peu probable qu'elles s'y développent jusqu'à donner un jour naissance à de nouvelles formes de vie. Mais cette hypothèse ne peut être totalement écartée, en particulier au moment où de nouvelles mesures donnent à penser qu'il y a bien de l'eau dans le sous-sol martien. Autre sujet d'inquiétude : la présence de ces bactéries complique singulièrement la tâche de ceux qui cherchent à découvrir des traces de vie extraterrestres (comment sauront-ils alors s'ils sont en présence d'une vie terrestre ou d'ailleurs ?).
A force d'envoyer des engins sur la planète rouge, l'homme y a inconsidérément déposédes bactéries bien de chez nous ! Une affaire doublement prise au sérieux par les scientifiques. Car cette contaminafion pourrait avoir un impact sur l'environnement de Mars. Et brouiller les cartes dans la recherche d'une éventuelle vie extraterrestre. Oui, il y a de la vie sur Mars ! Et qu'il ne s'agisse pas à proprement parler de "vie martienne" n'ôte rien à l'affaire. Bien au contraire. Certes, nous ne risquons pas de voir débarquer sur Terre d'horribles monstres venus de la planète rouge ou de tendres E.T. Pas pour l'instant, en tout cas... Mais il n'en demeure pas moins que les Martiens existent. Et que l'homme les a rencontrés. Ou plutôt reconnus. Car ces Martiens sont... fils de la Terre : il s'agit de micro-organismes et autres bacteries tout droit venus de notre planète (Bacillus subtilis ->) ! De fait c'est l'homme qui les a propulsés si loin de leur bercail à bord des multiples engins qu'il a réussi à poser sur le sol de la planète rouge. Comment le sait-on ? Tout simplement parce qu'avant chaque lancement, des prélèvements biologiques ont été faits sur les vaisseaux, les sondes et les autres appareils... et qu'ils ont révélé la présence de bactéries, malgré les décontaminations plus ou moins poussées qu'ils avaient subies. Et le résultat est là, étonnant, vertigineux, épineux : déposées sur de nombreux sites parfaitement délimités ou disséminées à la surface de la planète après un crash, ces créatures terrestres "vivent" aujourd'hui sur Mars. Et il semble que ce soit pour longtemps. Très longtemps... André Debus, chargé de mission à la protection planétaire au Centre national d'études spatiales (Cnes), a même estimé leur nombre : elles seraient plus d'un milliard ! Enfin, ça se discute : des scientifiques plus modérés avancent la probabilité de quelques centaines de milliers d'individus. Mais qu'importe leur nombre exact. L'incroyable est qu'il y ait bel et bien des bactéries sur Mars, ne serait-ce qu'une pincée. Comment ont-elles pu survivre à un voyage de près de 300 millions de kilomètres dans le glacial vide interplanétaire, traversant de mortelles radiations ? Une résistance absoluement stupéfiante qu'on ne soupçonnerait chez aucun autre organisme vivant. Mais au-delà de la fascination qu'on peut éprouver pour leur étonnant périple, ces désormais Martiens d'adoption posent un vrai problème : ils représentent une contamination qui préoccupe sérieusement les agences spatiales. L'affaire est grave. Dans un rapport encore en cours d'élaboration, le comité du Conseil national américain de la recherche chargé de la prévention de la contamination de Mars souligne deux négligences majeures des Terriens explorateurs de l'espace : les capacités d'accueil de la planète rouge, ainsi que la capacité de résistance des bactéries aux milieux les plus extrêmes ont été sous-estimées. DE L'EAU, DONC DE LA VIE ? "En l'état, les conditions martiennes sont tout de même peu favorables au développement de la vie, estime André Brack, du Centre de biophysique moléculaire du CNRS à Orléans, mais la probabilité n'est pas nulle". Et de mettre l'accent sur les récents travaux de Diedrich Mohlmann à l'Institut de recherche planétaire de Berlin. Ce chercheur estime en effet que le sol de Mars peut contenir de l'eau "interstitielle", c'est-à-dire de l'eau liquide piégée entre les cristaux qui forment certaines roches. "Peut être pas assez pour y trouver de quoi coloniser la planète, juge André Brack. Mais une chose est sûre, à mesure que progresse l'exploration martienne, la planète parait plus complexe qu'on ne l'imaginait". Les dernières nouvelles ne le démentent pas : l'antenne radar Marsis embarquée sur la sonde européenne Mars Express vient d'enregistrer un écho qui pourrait ressembler à celui de l'eau liquide à moins de 2,5 km de profondeur du cratère d'impact Chryse Planitia.
BACTÉRIES EXTRÊMOPHILES Par ailleurs, certains astronomes soutiennent que les ravines qui dévalent les flancs de certains cratères attestent des coulées d'eau récentes. Et puis, il n'est pas impossible que le climat de Mars change brutalement en cas de modification de l'inclinaison de son axe de rotation - cela s'est déjà produit il y a 5 millions d'années -, assez pour faire foudre la glace des pôles ou celle qui tapisse le fond de certains cratères... Et c'est ainsi que le comité américain résume la situation : "Les résultats scientifiques des dernières missions ont confirmé l'existence d'eau sur Mars dans le passé et rendent plus vraisemblable l'existence transitoire d'eau liquide près de la surface en de nombreux endroits". Cette abeille vieille de 25 millions d'années recélait... une bactérie endormie. La question se pose de savoir si les tempêtes, telle celle observée par Hubble cet automne, peuvent disséminer les bactéries "martiennes". Ce boitier contenant des bactéries, fixé à une capsule en orbite autour de la Terre, a permis dès 1999 de constater qu'elles peuvent résister aux conditions extrêmes de l'espace. UN SYSTÈME DE RÉPARATION DE L'ADN UNIQUE AU MONDE Dans le genre hyper résistant, Deinococcus radiodurans, fait des prouesses. Découverte par hasard au milieu des années 50 dans une boîte de viande hachée pourtant stérilisée par irradiation, cette bactérie encaisse sans broncher une dose de radiation 1500 fois supérieure à la dose létale pour l'homme. Cette résistance serait due au manganèse. Plus la concentration en manganèse intracellulaire est élevée et plus la souche est résistante. Et inversement. Le manganèse agirait comme un anti-oxydant qui limite les altérations de l'ADN dues aux rayonnements et accélère les réparations. Car, c'est tout le secret de Deinococcus radiodurans : elle dispose du meilleur système de réparation de l'ADN que l'on connaisse sur la planète. Les experts américains estiment que les extrêmophiles qui aiment le froid "sont ceux qui ont les meilleures chances de survivre et de se répliquer dans des environnements proches de la surface de Mars". Or, les dits experts remarquent que la présence de ces bestioles n'a jamais été testée sur les engins qu'on a envovés vers Mars... Ajoutons à cela qu'on est loin de tout connaître du monde microscopique et grouillant des bactéries. D'après Daniel Prieur, on n'aurait identifié qu'entre 0,01 % et 1 % des microbes vivant sur Terre, et peut-être moins encore. "Aucune méthode actuelle ne permet d'appréhender la totalité de la diversité microbienne d'un écosystème", précise le spécialiste. Les bactéries du sol, notamment, sont très difficiles à cultiver, et donc à identifier. On ne peut soupçonner ce dont elles sont capables. DES EXPÉRIENCES TROUBLANTES Faute d'avoir les moyens de vérifier sur Mars l'état dans lequel sont arrivées les spores qu'on y a transportées, les scientifiques ont tenté, à la fin des années 90, de mesurer leur capacité de résistance un peu plus près d'ici en orbite autour de la Terre. C'est à bord des capsules russes Foton qu'ont eu lieu les expériences les plus spectaculaires : baptisées Biopan, elles consistent à exposer des bactéries, des lichens et autres algues au vide, au froid et aux rayonnements non filtrés qui caractérisent l'espace interplanétaire. Et les résultats sont là, impressionnants les halobactéries, par exemple - celles qui vivent dans le sel -, sont protégées par la présence de cristaux dans leur enveloppe. Contenant très peu d'eau, elles survivent plus de 15 jours dans l'espace. Une autre expérience, Exobiologie, menée à bord de la station Mir en 1999, a montré que des spores directement exposées aux rayonnements solaires n'avaient que peu de chances de survivre, même protégées par une mince couche de matériau inorganique. En revanche, les spores survivent lorsqu'elles sont à l'abri d'une couche formée de leurs congénères détruites par les rayons ! "Nous n'avons pas été saisis de ce problème, déclare Hans Haubold, du Bureau des affaires spatiales de l'ONU. Cela dit, la contamination dont vous parlez ne semble pas, pour ce que j'en sais, pouvoir être qualifiée de préjudiciable". Une réponse pour le moins surprenante quand on sait, comme tous les spécialistes nous l'ont répété que, dès lors que des spores de bactéries terrestres sont sur une planète, il devient impossible de les distinguer d'éventuelles bactéries natives. Qu'elles soient encore vivantes ou qu'elles soient détruites. Car, même détruites, ces spores laissent des traces typiques de la vie. Ce qu'a clairement démontré Charles Cockell avec Chroococcidiopsis sp. 029. Après destruction des spores dans un environnement martien simulé, la signature chimique de l'ADN est toujours détectable et la morphologie des spores reste inchangée. "Les conséquences pour l'exploration planétaire sont considérables, explique André Debus. Une contamination peut induire un faux positif - la détection erronée d'une forme de vie extraterrestre -, et nous obliger alors à prendre trop de précautions, que ce soit pour ne pas interférer avec cette forme de vie ou pour éviter de la ramener sur Terre.
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