Cette fois-ci, les humains se sont vraiment donné les moyens de découvrir les Martiens, s'ils existent, ou bien d'établir qu'ils n'ont jamais existé. Il faut dire que la Nasa a sorti le grand jeu avec sa sonde Curiosity (ainsi baptisée après avoir
C'est la frustration des chercheurs, depuis des décennies d'études de Mars, qui a présidé à la conception de Curiosity. Viking, dans les années 1970, était censée, déjà, découvrir une eventuelle vie martienne. Echec : les expériences étaient peut-être mal conçues, ou trop peu sensibles. Sojourner a été le premier robot mobile martien, à la fin des années 1990. Mais trop petit, son rendement scientifique est resté très limité. Spirit et Opportunity eux, ont bien parcouru près de 50 km à eux deux, en huit ans de mission... Mais ils n'avaient pas de détecteur biologique, tandis que leurs sites d'atterrissage, trop plats, n'avaient qu'un intérêt géologique limité. Curiosity va corriger tout cela. On peut même dire que c'est la sonde martienne “définitive”. D'abord, le site choisi pour l'atterrissage : le cratère Gale, qui mesure 150 km de diamètre, est un paradis de géologue. L'analyse des relevés satellitaires a montré que de l'eau a coulé ici en abondance il y a des milliards d'années, y déposant de nombreuses strates sédimentaires. Lesquelles strates affleurent toutes sur les pentes du piton central du cratère qui s'élève jusqu'à 5.000 m de haut. Si la vie est apparue sur Mars, pensent les biologistes, c'est dans ces couches argileuses qu'il faut la chercher.
Deuxième point fort de la sonde : son autonomie. Dotée de six roues et pesant 900 kg (soit 300 kg seulement sur Mars, du fait d'une pesanteur trois fois moindre), elle sera propulsée non pas par des panneaux solaires, mais par une pile atomique alimentée par du dioxyde de plutonium. Puissance : 120 watts, contre 40 watts pour les panneaux d'Opportunity en plein soleil... Du coup, si tout se déroule correctement, ce sont des dizaines, voire des centaines de kilomètres que pourra, des années durant, parcourir la sonde, de jour comme de nuit, par tous les temps et en toute saison. Enfin, l'instrumentation scientifique embarquée par Curiosity n'a pas d'égale dans toute l'histoire de la conquête martienne. En plus de l'arsenal classique de la Nasa (des caméras qui permettent d'obtenir des vues spectaculaires des paysages traversés, une station de météorologie), Curiosity embarque des spectromètres ultrasensibles capables de détecter dans le sol et le sous-sol les éléments chimiques fondamentaux de la biologie : carbone, oxygène, hydrogène, azote, phosphore, soufre, acides aminés... Des détecteurs soigneusement stérilisés avant le décollage de la sonde, afin qu'on ne découvre pas sur Mars... de la vie importée de la Terre ! Ces performances hors-norme font de la sonde Curiosity une mission non seulement unique en son genre, mais à haut risque. Un dangereux “quitte ou double” technologique puisque, contrainte de se poser avec une précision extrême sur le site soigneusement choisi par les planétologues, Curiosity va expérimenter un système d'atterrissage particulièrement complexe.
Ce 6 août, comme toutes les sondes martiennes, elle traversera l'atmosphère à 25.000 km/h, protégée par un bouclier thermique. Puis, c'est un parachute qui prendra le relais, rien que de très normal. Mais la fin de l'atterrissage promet d'être plus corsée. Il s'agit d'une première, digne des missions lunaires Apollo : parvenue à environ 2000 m d'altitude, le parachute sera éjecté, et Curiosity continuera sa descente freinée par des rétrofusées... Enfin, à 20 m au-dessus du sol martien, Curiosity sera délicatement hélitreuillée jusqu'au sol, tandis que le système d'atterrissage, désormais inutile, ira s'écraser plus loin. Une mission à haut risque et sans précédent : déploiement d'un parachute, puis allumage de huit moteurs, puis extinction de quatre des moteurs, puis “grutage” du rover jusqu'au sol... La précision et la fiabilité absolues de la manouvre, complètement automatique, ne souffriront aucun "bug", même infime... Une fois posée au sol, la sonde à six roues motrices, remise de ses émotions, pourra déployer ses caméras et contempler le paysage autour d'elle... On croise les doigts. Tout est révu pour que la sonde puisse alors converser avec la Terre : une antenne de transmission directe, dirigée vers notre planète, et, en appoint, deux satellites en orbite martienne (Mars Reconnaissance Orbiteur et Mars Odyssey) qui pourront servir de satellites de télécommunication. Si tout se passe bien, ce 6 août, Curiosity prendra aussitôt contact avec la Terre pour dire qu'elle est bien arrivée... Un long moment de solitude en perspective pour les ingénieurs de la Nasa : il faudra près d'un quart d'heure au SMS de Curiosity pour leur parvenir...
Mars n'a pas d'océans qui permet de fixer une altitude zéro. La référence est donc une sphère fictive appellée "aéroïde" (à l'instar du géoïde terrestre, Arès étant le nom grec de Mars).
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